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Guerre des nerfs

Il coupe le gaz. Et il remet le gaz. Il adore, il adore, Vladimir Poutine, jouer avec les nerfs de l’Occident. Nord Stream a redémarré partiellement, mais pas pour longtemps. Le géant Gazprom a prévenu hier que le tuyau, long de quelque 1 200 kilomètres, réduira encore son débit à partir de demain. Toujours pour une question de «maintenance».

Le président russe ouvre et ferme le robinet comme ça lui chante. Comme il adore jouer aussi avec les nerfs des Africains qui attendent désespérément leurs rations de céréales toujours bloquées dans le port d’Odessa, attaqué au lendemain de l’accord signé en Turquie. En parlant de rationnement, il va inévitablement falloir se serrer la ceinture cet hiver, faire du gras et porter de grosses laines. Au Luxembourg, on s’y prépare. Psychologiquement, du moins. Dans sa dernière note de conjoncture, le Statec estime le risque de coupure totale «de plus en plus probable» et le gouvernement a déjà appelé à la sobriété énergétique. Pas sûr que l’on évitera la gueule de bois pour autant.

Les Européens ne peuvent s’en prendre qu’à eux-mêmes, a aboyé Dmitri Peskov, l’un des plus dociles serviteurs de son maître. C’est surtout que certains trinqueront pour d’autres et le Kremlin ne le sait que trop bien. L’Allemagne, incapable de se débrancher de la bonbonne russe, compte sur la solidarité des autres membres de l’UE. En bons voisins prêts à la dépanner. La Commission a proposé une réduction de 15 % de la consommation de chauffage, avec la possibilité de rendre cette mesure contraignante en cas d’urgence. Bronca en Espagne et au Portugal, comme en Grèce, pas question de baisser le thermostat. «Nous, nous n’avons pas vécu au-dessus de nos moyens», a piqué l’Espagne en écho aux leçons de la fourmi berlinoise aux cigales du sud après la crise financière.

Il adore, il adore, Vladimir Poutine, semer la zizanie géopolitique pour imposer son nouvel ordre mondial. Déstabiliser nos démocraties fragilisées dans une Union en désordre de bataille. Et que dire de l’attitude hongroise, dont le gouvernement s’est précipité à Moscou pour s’assurer ses livraisons en solo. Dans la cacophonie européenne, DJ Poutine reste aux platines et aux commandes. Il a remis le gaz. Et il recoupe donc le gaz.

Alexandra Parachini