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Retour de bâton

Sueurs froides dans les bureaux du Grand-Duché. Nombre de patrons transpirent à grosses gouttes et sentent la fièvre monter. Rien à voir avec l’épisode caniculaire que connaît le pays actuellement, la climatisation fonctionne plutôt bien. Et plus que les températures, c’est une pétition publique qui bat tous les records depuis quelques jours.

La pétition n°2384, précisément, qui réclame l’introduction de deux jours de télétravail par semaine pour tous les travailleurs, y compris pour les frontaliers. Dès son ouverture à signature le 13 juillet, le texte affolait le compteur et hier soir, il cumulait plus de 12 200 paraphes sur les 4 500 requis pour être débattu à la Chambre des députés. Inédit dans l’histoire de cet outil de démocratie participative. Preuve que le sujet dépasse les frontières autant qu’il les rapproche. Et même en l’allégeant des signatures non recevables et autres doublons, cette pétition aura droit à coup sûr à son audience parlementaire d’ici à sa clôture le 23 août.

De quoi refroidir les ardeurs de certains, donc. Après deux ans de pandémie, les pourfendeurs du télétravail jubilaient d’en avoir enfin fini avec cette maudite invention. Les chefs en mal d’autorité peuvent de nouveau imposer leur loi depuis le 1er juillet et le retour obligatoire en présentiel des frontaliers. C’est quand même bien plus facile ainsi pour fliquer les employés tentés de resquiller. Il ne s’agirait pas de laisser le vent souffler plus longtemps sur les braises de la liberté, non plus. Vive le monde d’avant, si possible en pire. Qu’importe si le travail à distance a prouvé ses bienfaits et son efficacité, permis de trouver l’équilibre entre vie privée et activité professionnelle. Et tant pis si les congés de maladie ont nettement diminué, du fait de la possibilité de bosser chez soi malgré un coup de mou.

Dans le management à l’ancienne, l’on considère qu’un salarié n’est jamais plus productif que lorsqu’il est asphyxié par les bouchons et pressé comme un citron sans jus. Qu’il n’est jamais aussi docile qu’avec une bonne tape sur le museau. Les dirlos ont ressorti la règle prête à claquer sur le bout des doigts. Ils feraient bien de s’inquiéter du retour de bâton…

Alexandra Parachini

Un commentaire

  1. Patrick Hurst

    Bonne analyse: Surtout que le changement démographique guette aussi au prochain coin de rue: En Allemagne, c’est désormais plus de 300000 postes qui ne peuvent être pourvus chaque année, s’y ajoutent les bas salaires dans à peu près tous les métiers du service et les collaborateurs désertent, autant qu’ils le peuvent (cf la « great resignation » des États-Unis). Et ces manques frappent cruellement: longues files dans les aéroports, longues attentes pour les réparations, restos en passe de fermer, personnels éducatifs surchargés… Le télétravail n’est finalement qu’un moindre mal, qui se justifie en plus par des coûts d’énergie qui explosent!