Quand ils ne sont pas derrière les barreaux, Greg et Favio vivent dans des caves d’immeubles. Greg est suspecté d’en avoir visité trois, dont une avec son camarade de classe.
Mon vélo électrique manquait ainsi qu’un vieil ordinateur portable», témoigne une victime présumée de Greg. Le vélo, qui était équipé d’un traqueur GPS, a été retrouvé posé le long d’un mur de l’Abrigado avec des traces d’ADN du prévenu sur le guidon.
Pourtant, le jeune homme de 35 ans nie les faits. «J’étais à l’Abrigado. J’ai vu un homme arriver avec le vélo. Il l’a échangé contre de la drogue avec un autre homme. Un Marocain. Je les connais, mais je ne veux pas les donner», assure le jeune homme qui se défendait seul face à la 9e chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg, hier après-midi. La présidente a du mal à le croire : l’ADN de Greg a été trouvé sur le guidon du vélo.
Les faits remontent au 4 novembre 2020. Greg se serait introduit dans la cave d’un immeuble de la rue Michel Rodange, à Luxembourg. Le jeune homme de 35 ans est coutumier du fait. Un mois plus tard, des caves d’un ensemble de résidences de la rue Grand-Duc Jean, à Howald, sont visitées et un vélo électrique est également volé, ainsi que 35 euros traînant dans le vide-poches d’une voiture, des perceuses électriques, de l’alcool et quelques denrées alimentaires. L’ADN de Greg est là aussi trouvé. Sur une porte. Le jeune homme ne se souvient plus. «Je suis rentré dans beaucoup de caves pour dormir quand je vivais dans la rue», explique le prévenu. «J’ai toujours reconnu tout ce que j’avais fait.»
Entre ces deux faits, Greg est soupçonné de s’être introduit avec Favio dans la buanderie d’un immeuble de la rue du Couvent, à Howald, entre le 6 et le 7 novembre 2020. Ils y auraient pris des vêtements.
Une habitante raconte : «Je suis descendue à la cave. J’ai vu de la lumière et que les portes des caves étaient ouvertes. Comme il y a déjà eu plusieurs cambriolages dans les caves, je suis remontée chez moi et j’ai prévenu la police. (…) C’est facile de rentrer dans l’immeuble.» Les deux trentenaires reconnaissent avoir pris des vêtements dans la buanderie.
«Pas la première fois que j’y dormais»
«Il faisait nuit. Nous ne savions pas où dormir. Il faisait froid. Nous avons vu une voiture sortir d’un garage et nous en avons profité pour rentrer. On a cherché des couvertures», se souvient Favio.
«Nous nous sommes changés avec les vêtements que nous avons trouvés sur place et jeté les nôtres», enchaîne Greg. Les deux jeunes hommes sont d’anciens camarades de classe dont les vies ont basculé. Ils enchaînent les condamnations. «C’est tout le code pénal!», lance la présidente de la chambre criminelle en épluchant les condamnations inscrites à leurs casiers judiciaires.
«Prenez un abonnement à la prison ! Vous rentrez, vous sortez… On se demande pourquoi vous sortez. (…) Cela ne s’arrête jamais. Qu’est-ce qu’on va faire de vous ? Vous avez une solution ?» Ils n’ont pas de réponse. Tous deux purgent actuellement des peines de prison pour vol.
La représentante du ministère public a demandé la jonction des trois affaires. Elle ne croit pas en la coïncidence que les caves dans lesquelles Greg a dormi aient justement été cambriolées par la suite par quelqu’un d’autre. Elle estime que le deuxième et le troisième faits qui lui sont imputés sont donnés et que Favio était présent lors du troisième fait.
Concernant le vol du premier vélo électrique, elle demande au tribunal de retenir le recel plutôt que le vol avec effraction étant donné qu’il n’existe pas de preuves matérielles du passage de Greg dans cette cave. Elle a requis une peine d’emprisonnement de 9 mois à l’encontre de Favio et de 18 mois à l’encontre de Greg qui comparaissait dans trois affaires.
«Comment expliquez-vous les tentatives d’ouvrir des caves dans l’immeuble dans lequel vous avez passé la nuit ?», demande la présidente au duo. «L’endroit est bien connu par les toxicomanes. J’y ai déjà croisé d’autres personnes. Ce n’était pas la première fois que j’y dormais», argumente Greg qui se défend seul, contrairement à Favio qui peut compter sur Me Says.
«Il retombe dans le même milieu à chaque sortie de prison. Cela ne justifie pas de commettre des infractions, mais c’est un peu sa vie», avance l’avocat qui plaide l’acquittement du prévenu de l’infraction de tentative de vol.
«Aucun élément probant ne permet de le rattacher aux faits», argumente-t-il. «Même le témoin reconnaît qu’il y a souvent des vols dans ces caves.» Il demande à la chambre criminelle de ne retenir que le vol simple à son encontre et de le condamner à du travail d’intérêt général «pour ne pas aggraver son cas».
Le prononcé est fixé au 14 juillet.