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Droits LGBTIQ+ : le Luxembourg peut mieux faire


Le Luxembourg recule de deux petites places mais reste dans le top 10 des pays européens les plus progressistes pour les droits LGBTQI+. Photo : Pixabay

Si le Luxembourg reste l’un des pays les plus progressistes pour les droits LGBTIQ+, la situation semble toutefois stagner depuis plus de deux ans. Un constat «compréhensible», mais qui désole quelque peu l’association « Rosa Lëtzebuerg ».

Bien, mais peut mieux faire. Voilà en quelques mots comment qualifier la cinquième place détenue par le Luxembourg pour cette année 2022 dans le traditionnel index “Rainbow” d’ILGA Europe.  

L’association publie en effet chaque année une carte évaluant les progrès ou les reculs de 49 pays européens (dont les 27 États membres) en ce qui concerne la mise en œuvre des exigences visant à améliorer la situation juridique des personnes LGBTIQ+, sur une échelle allant de 0% (violations graves des droits humains, discrimination) à 100% (respect des droits humains, égalité complète).  

Si, depuis plusieurs années, le Luxembourg figurait dans le top trois des pays européens les plus impliqués pour les droits homosexuels, le pays se classe cette année à la cinquième place, rétrogradant ainsi de deux positions par rapport à l’an dernier. 

La faute à une vague de progression constatée dans d’autres pays, comme le Danemark par exemple, qui a gagné 7 places grâce à une stratégie à grande échelle visant à combler les lacunes de la législation anti-discrimination. 

«Forcément, si des pays font mieux que nous, nous rétrogradons», ironise Tom Hecker, président de l’asbl « Rosa Lëtzebuerg », l’organisation nationale LGBTIQ+ du Luxembourg. Depuis 1996, cette association milite pour offrir davantage de droits aux personnes LGBTQI+ et œuvre avec le gouvernement pour les mettre en place. 

S’il admet que le pays a «fait beaucoup d’efforts très vite ces dernières années» pour les personnes LGBTQI+, il regrette toutefois un manque d’action de la part des politiques depuis un peu plus de deux ans et le début de la pandémie. 

«C’est compréhensible, mais aussi assez dommage. Plus rien n’a été fait depuis deux ans. Il ne faut pas s’arrêter en si bon chemin non plus», explique-t-il. 

Une jeunesse plus ouverte 

Des projets sont en effet attendus depuis longtemps, comme le projet de loi concernant l’interdiction des interventions médicales pour les enfants sans leur consentement informé, que le gouvernement voulait faire passer au parlement avant la fin 2021, mais qui se font toujours attendre.  

D’autres revendications de longue date de l’asbl “Rosa Lëtzebuerg”, comme la reconnaissance automatique de la parentalité indépendamment de l’identité sexuelle ou de l’orientation sexuelle des parents, ou l’interdiction des thérapies de conversion (tentative de “guérison” par la force physique ou psychique des personnes queer), seraient également des chantiers urgents qui seraient relativement «faciles à mettre en place», selon Tom Hecker.

L’asbl « Rosa Lëtzebuerg » en bref

Rosa Lëzebuerg asbl est l’organisation nationale LGBTIQ+ du Luxembourg, qui défend les intérêts et les droits de la communauté LGBTIQ+ locale depuis sa création en 1996.

Outre la recherche de l’égalité juridique et la lutte contre la discrimination, ses responsabilités incluent divers projets socioculturels, tels que la « Luxembourg Pride », qui visent à créer un environnement sûr pour tous les membres de la communauté et à éradiquer les préjugés

«Notre gouvernement est ouvert et à l’écoute, mais nous pouvons encore mieux faire, c’est certain», martèle le président de l’asbl, qui a également constaté un bel élan parmi la jeune génération luxembourgeoise. 

Une jeunesse plus ouverte sur les questions de genre et d’orientation sexuelle, qui n’hésite plus à rejeter les étiquettes classiques “hétéro”, “bi” ou “homo” pour apporter davantage de nuances. «On constate vraiment un état d’esprit plus libre, une volonté de vivre ouvertement, sans être jugé sur son orientation sexuelle ou son genre», appuie Tom Hecker. 

Manque de “safe-space” pour la communauté queer 

Un constat qui pousse plus que jamais l’association à demander la modification de la Constitution, pour sortir du système actuel très binaire (femme versus homme) et proposer davantage d’options de genre dans l’état civil. «Nous sommes en 2022, il faut dépasser tout cela. Si on ne fait rien, nous risquons de rendre la Constitution déjà obsolète avant même qu’elle n’entre en vigueur.» 

Au-delà de l’aspect juridique, “Rosa Lëtzebuerg » regrette également l’absence de “safe-space” au Luxembourg, pour permettre aux personnes de la communauté de se retrouver tous ensemble, sans crainte.

«La plupart des établissements du pays sont queer friendly, mais il y a un vrai manque d’espace dédié à la culture queer. Il est important d’offrir aux jeunes des lieux pour échanger sans crainte, demander des conseils, sans forcément se rendre dans un centre d’information», détaille le président de l’asbl.

«On veut être comme tout le monde, avoir les mêmes droits que tout le monde», clame Tom Hecker. (Photo : Fabrizio Pizzolante)

Un festival de “queer art” en juillet 

Pour ouvrir la voie, “Rosa Lëtzebuerg » proposera le premier week-end de juillet un événement jusqu’ici inédit au Luxembourg : un festival “queer art”, qui permettra à des artistes queer de tout le pays et de la Grande Région de présenter leurs œuvres. 

«Nous voyons ici la possibilité de montrer ce qui se fait et ce qui a déjà été fait par le passé par des artistes queer et dont personne ne savait que c’était justement de l’art queer. C’est un vrai message d’ouverture, une façon de prouver que nous ne sommes pas différents, nous sommes tous des êtres humains et nous pouvons faire de belles choses».

Pourquoi le 17 mai est important ?

Ce mardi 17 mai marque la journée internationale contre l’homophobie. Une date importante pour la communauté LGBTQI+ puisqu’il y a 32 ans jour pour jour, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) retirait l’homosexualité de la liste des maladies mentales.

«Nous attendons aussi avec impatience le 9 juillet prochain», glisse Tom Hecker dans un sourire. «C’est la journée dédiée à la Luxembourg Pride», créée en 2015 et qui défilera dans les rues d’Esch-sur-Alzette.