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La menace russe s’éloigne de Kharkiv, selon l’Ukraine


"Les occupants sont progressivement repoussés de Kharkiv", a dit le président Volodymyr Zelensky dans une vidéo (Photo : AFP)

L’étau russe se desserre sur Kharkiv, la deuxième ville de l’Ukraine située dans l’est et qui était pilonnée depuis fin février, ont affirmé les autorités ukrainiennes dans la nuit de mardi à mercredi, alors que le conflit pourrait s’étendre vers le sud-ouest selon Washington.

« Nos forces armées nous ont donné à tous de bonnes nouvelles de la région de Kharkiv. Les occupants sont progressivement repoussés de Kharkiv », a dit le président Volodymyr Zelensky dans une vidéo. « Je suis reconnaissant à tous nos combattants qui tiennent bon et font preuve d’une force surhumaine pour chasser l’armée d’envahisseurs ».

« Les localités de Cherkasy Tychky, Rusky Tychky, Roubijné et Bayrak ont été libérées » dans la région de cette grande ville, a précisé l’état-major ukrainien sur Facebook. « Ainsi, l’ennemi a été repoussé encore plus loin de Kharkiv, et les occupants ont eu encore moins de possibilités de frapper le centre régional ».

Mais « l’intensité des bombardements dans le district de Kharkiv a augmenté », a-t-il aussi relevé. De plus, selon Oleg Snegoubov, chef de l’administration régionale de Kharkiv s’exprimant sur Telegram, « en se retirant, les occupants russes laissent derrière eux des pièges mortels », des mines.

Les quartiers nord et nord-est de Kharkiv, qui comptait environ 1,5 million d’habitants avant la guerre, sont depuis des semaines frappés par des roquettes russes, causant la mort de civils. Fin février, les Russes ont voulu prendre la ville, en vain: les forces ukrainiennes ont résisté et les ont repoussés à quelques kilomètres de là, au prix d’âpres combats.

L’Institut américain d’étude de la guerre (ISW) avait noté en fin de semaine dernière que, dans cette partie orientale du pays, l’armée ukrainienne « fait des progrès significatifs et avancera probablement jusqu’à la frontière russe dans les jours ou semaines à venir ».

Cela semble aussi confirmer la tendance qui a émergé sur le front est au cours de ce troisième mois de l’invasion russe: d’un côté, les unités ukrainiennes contre-attaquent et progressent à l’est de Kharkiv, de l’autre, les Russes grignotent petit à petit du terrain à environ 150 km au sud-est de l’avancée ukrainienne, en direction de la partie du Donbass qui n’est pas encore sous contrôle russe ou séparatiste prorusse.

Quid de la Transdniestrie ?

La « deuxième phase » de « l’opération militaire spéciale » annoncée par Moscou vise une emprise totale sur le Donbass, et les combats sont particulièrement intenses dans la région de Lougansk. Mais l’attention se porte désormais également sur le sud-ouest du pays. Le président russe Vladimir Poutine veut « étendre » le conflit jusqu’à la Transdniestrie, région de Moldavie qui a fait sécession en 1990, a déclaré mardi la cheffe du renseignement américain, Avril Haines.

Le 22 avril, un général russe, Roustam Minnekaïev, avait d’ailleurs fait valoir que « le contrôle du sud de l’Ukraine, c’est également un couloir vers la Transdniestrie, où on observe également des cas d’oppression de la population russophone ». Or, la défense des russophones est l’une des justifications par Moscou de la guerre actuelle. Outre la Crimée annexée en 2014, les troupes russes occupent une grande partie du sud de l’Ukraine, notamment la capitale régionale de Kherson.

Selon le commandement ukrainien pour le sud, les troupes russes sont en train de frapper « sans merci » la région de Mykolaïv, qui représente l’ultime verrou avant Odessa, à l’ouest. « Des maisons privées, des installations agricoles ont été endommagées et l’alimentation en électricité de l’une des localités a été interrompue », a-t-il affirmé dans la nuit de mardi à mercredi. Odessa, centre culturel majeur tant pour les Ukrainiens que pour les Russes, a été sporadiquement frappée par des missiles russes depuis le début du conflit. Cette ville portuaire russophone avait reçu lundi la visite surprise du président du Conseil européen, Charles Michel.

Dans les environs d’Odessa, « la pression psychologique se poursuit sur la population voisine de la Transdniestrie » avec « le possible blocage de la région en raison de la mise hors service du pont du Dniestr, qui a de nouveau été attaqué par des missiles », a aussi avancé le commandement ukrainien pour le sud. Fin avril et début mai, des explosions avaient secoué la Transdniestrie, où stationnent des troupes russes depuis une trentaine d’années.

La Russie s’était aussitôt dite « alarmée » par ces « actes terroristes », indiquant suivre la situation de près. De son côté, l’Union européenne a annoncé le 4 mai qu’elle allait « considérablement accroître » son aide militaire à la Moldavie. Ce petit pays, non membre de l’Otan, a également reçu le soutien fin avril de Paris et Berlin.

Vote sur l’aide militaire américaine

Dans le sud-est, les forces russes ont encore pilonné l’aciérie Azovstal, à Marioupol, où se terrent toujours des dizaines d’Ukrainiens, soldats et civils. « Des dizaines de frappes », « chaque heure », a écrit sur Telegram Petro Andriouchtchenko, adjoint au maire de cette ville portuaire prise par les Russes et presque entièrement détruite.

La cheffe du renseignement américain a par ailleurs dit que M. Poutine compte sur un essoufflement du soutien occidental à l’Ukraine et se prépare à « un conflit prolongé », pour lequel il va « probablement » imposer la loi martiale en Russie. Ce qui pourrait conduire à une « trajectoire plus imprévisible et potentiellement une escalade » dans les prochains mois, selon Mme Haines.

A Kiev, vidée de la majorité de ses résidents au début de l’invasion russe, près des deux tiers des 3,5 millions d’habitants de la capitale sont revenus, a indiqué mardi le maire Vitali Klitschko.

Dans la soirée, il a annoncé le décès à l’âge de 88 ans du premier président de l’Ukraine indépendante, Léonid Kravtchouk (1990-1994). Cet ancien apparatchik était revenu sur la scène politique en 2020 en devenant, à la demande du président Zelensky, un des négociateurs ukrainiens dans les pourparlers avec la Russie portant sur le conflit du Donbass.

Du côté de l’aide américaine à l’Ukraine, la Chambre des représentants a adopté mardi soir une enveloppe faramineuse de près de 40 milliards de dollars, suivant Joe Biden dans son soutien indéfectible à Kiev. Le texte voté par des élus des deux camps comprend un volet économique et humanitaire, mais aussi des armes et des munitions. Il doit désormais être voté au Sénat, en fin de semaine ou en début de semaine prochaine, avant d’être promulgué par le président américain.

Concernant les sanctions contre la Russie, les négociations se poursuivent sur le projet d’embargo de l’UE sur le pétrole russe, actuellement bloqué par la Hongrie. Un accord est possible « dans la semaine », a assuré mardi le secrétaire d’Etat français aux Affaires européennes, Clément Beaune.

Le Premier ministre italien Mario Draghi, dont le pays est très dépendant au gaz russe mais livre des armes à l’Ukraine, a rencontré mardi Joe Biden à la Maison Blanche. Le premier a appelé de ses voeux « une Union européenne forte (…) dans l’intérêt des Etats-Unis », le président américain louant « un bon ami et un grand allié ».