La ministre des Finances, Yuriko Backes, a fait le point sur la situation financière de l’État. Si les finances semblent au beau fixe après la crise du Covid-19, la récente crise ukrainienne pourrait menacer leur stabilité.
«La situation des finances publiques à la fin du premier trimestre 2022 illustre la résilience du tissu économique luxembourgeois et le rebond de la croissance à l’issue de la crise sanitaire au tournant de l’année. Ces chiffres soulignent la solidité des finances publiques de notre pays, mais ils ne doivent toutefois pas être compris comme une indication quant à l’évolution sur l’ensemble de l’année 2022, dans la mesure où la situation au 31 mars ne reflète pas encore l’impact de la guerre en Ukraine, ni celui des mesures décidées dans le cadre de la tripartite et de l’Energiedësch.»
C’est en ces termes que la ministre des Finances a fait le point, ce lundi 25 avril, devant les députés, sur la situation financière du Luxembourg. Si les recettes encaissées par l’Administration centrale s’élèvent fin mars à «6,1 milliards d’euros, soit +13,4% ou 716 millions d’euros de plus par rapport à fin mars 2021», cette croissance importante est toutefois «à considérer par rapport au contexte particulier de 2021, où le début d’année était encore marqué par des restrictions sanitaires et une activité économique perturbée à l’époque».
2,8 milliards d’euros déboursés depuis le début de la pandémie
Les dépenses de l’Administration centrale se sont chiffrées au 31 mars dernier à près de 5,3 milliards d’euros. En comparaison avec l’exercice précédent, les dépenses demeurent stables, ce qui s’explique notamment par le recours moins important aux aides mises en place dans le cadre du paquet de relance économique dit «Neistart Lëtzebuerg».
Les dépenses afférentes ne s’élèvent plus qu’à 61 millions d’euros au 31 mars 2022. Au total, l’État a déboursé quelque 2,8 milliards d’euros depuis le début de la pandémie en mars 2020 pour soutenir les ménages et les entreprises.
L’évolution positive des recettes couplée à des dépenses globalement stables mène à une «amélioration considérable du solde de l’Administration centrale», fait savoir le ministère des Finances dans son communiqué. Ce dernier passe ainsi de +56 millions d’euros au 31 mars 2021 à +757 millions d’euros au 31 mars 2022. Il ne s’agit pourtant que d’une photo momentanée de la situation comptable.
Une dégradation à venir dans les prochains mois
Attention toutefois : face au contexte de la guerre en Ukraine, couplé au renchérissement des prix de l’énergie, le Luxembourg, «en tant que petite économie ouverte, tournée vers l’extérieur», sera directement impacté par cette évolution. «Ensemble, avec le coût des mesures du Solidaritéitspak et de l’Energiedësch, ce renversement de la conjoncture est susceptible d’aboutir à une dégradation considérable du solde de l’Administration centrale dans les mois à venir», avertit Yuriko Backes.
Quant au détail des recettes, l’Administration des contributions directes (ACD) a perçu des recettes de l’ordre de 3,1 milliards d’euros, ce qui représente une hausse de +344 millions d’euros, soit +13% par rapport au mois de mars 2021.
Les recettes encaissées par l’Administration de l’enregistrement, des domaines et de la TVA (AED) s’élèvent à 1,9 milliard d’euros. Par rapport à l’exercice budgétaire précédent, elles ont augmenté de +233 millions d’euros, soit +14%.
Une dette publique de 16,9 milliards d’euros
Concernant les recettes de l’Administration des douanes et accises (ADA), celles-ci s’élèvent fin mars à près de 483 millions d’euros, soit une hausse de 79 millions d’euros ou +20% par rapport à 2021. Alors qu’en termes de quantités, les ventes de carburants ont progressé par rapport à 2021, ce sont surtout les ventes de diesel qui continuent à afficher une tendance baissière par rapport à 2019, «confirmant ainsi l’efficacité de la taxe CO2 comme outil de réduction des ventes de carburants».
Quant à la dette publique, son niveau a diminué d’un milliard d’euros suite au remboursement d’un emprunt obligataire venu à échéance le 21 mars 2022. Ainsi, la dette publique s’élève pour l’instant à 16,9 milliards d’euros, ce qui correspond à un ratio de 23,7% du PIB. Le taux d’endettement du Luxembourg continue par conséquent à se situer à un niveau bien inférieur au plafond des 30% du PIB fixé au programme gouvernemental, et elle reste la moins élevée au sein de la zone euro hormis l’Estonie.
«Si les chiffres au 31 mars 2022 sont encourageants, ils doivent être nuancés au regard de l’évolution macroéconomique actuelle. Dans le sillage de la guerre en Ukraine et de la remontée de l’inflation, les prévisions de croissance ont été revues à la baisse. Tel que cela ressort également des chiffres du Programme de stabilité et de croissance (PSC) qui sera présenté ce mercredi, on doit donc s’attendre à une détérioration significative de la situation financière de l’État dans les mois à venir. Il faudra donc faire preuve de prudence face à ces développements et appliquer une rigueur continue dans l’exécution du budget pour assurer des finances publiques saines.», a conclu la ministre des Finances.