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Nazanin Zaghari-Ratcliffe, la liberté après l’enfer de la prison iranienne


Sur cette photo distribuée par la campagne "Free Nazanin" à Londres le 10 juin 2016, Nazanin Zaghari-Ratcliffe est avec sa fille Gabriella. (photo AFP)

Retenue contre son gré depuis six ans en Iran où elle a connu l’enfer de la prison, l’Irano-Britannique Nazanin Zaghari-Ratcliffe va enfin retrouver son mari et sa petite fille à Londres au terme d’un inlassable combat de ses proches pour sa libération.

Cette cheffe de projet de 43 ans employée par la fondation Thomson Reuters, bras philanthropique de l’agence de presse éponyme, a été remise mercredi au gouvernement britannique, après des années d’espoirs déçus.

Sa vie avait basculé le 3 avril 2016, quand elle avait été arrêtée avec sa fille Gabriella, alors même pas âgée de deux ans, à l’aéroport de Téhéran. Elle venait de rendre visite à sa famille pour le nouvel an iranien. Accusée d’avoir comploté pour renverser le régime islamique, ce qu’elle a toujours nié, séparée de sa fille dont le passeport britannique est confisqué, la binationale est condamnée en septembre de la même année à cinq ans d’emprisonnement.

C’est le début d’un long calvaire, marqué par de rudes séjours en isolement dans des cellules sans fenêtre, des grèves de la faim et des privations de soins médicaux. Elle dort plus d’un mois dans les mêmes vêtements et envisage même le suicide. « La prison a été quelque chose de très dur » pour elle, qui « a toujours eu un sens aigu de loyauté et de justice », avait confié son mari Richard Ratcliffe, comptable de profession.

Les visites de Gabriella, dont une photo trônait sur une table de chevet dans sa cellule de la prison d’Evin, à Téhéran, permettent à cette femme autrefois « enjouée » de s’accrocher, malgré une plongée dans la dépression. En mars 2019, Londres finit par lui accorder sa protection diplomatique. Non sans avoir auparavant commis une bourde préjudiciable : alors chef de la diplomatie, le Premier ministre Boris Johnson avait affirmé fin 2017 que Nazanin Zaghari-Ratcliffe formait des journalistes en Iran – ce qu’elle niait –, fournissant des arguments à Téhéran.

« Douleur sans mesure » 

En octobre 2019, Nazanin Zaghari-Ratcliffe vit une nouvelle déchirure : Gabriella, qui vivait depuis son arrestation chez ses grands-parents maternels, retourne chez son père à Londres pour y être scolarisée. « Ma douleur est sans mesure », écrit-elle alors. Un vide que Nazanin essaye de combler en appelant quotidiennement par vidéo la fillette depuis son placement en résidence surveillée en mars 2020 en raison de la pandémie de coronavirus.

Mais après sa sortie de prison, elle déchante rapidement : contrairement à des milliers d’autres prisonniers, elle ne bénéficie pas d’une mesure de grâce. Pire, en avril 2021, arrivée en bout de peine, elle est condamnée à une nouvelle peine d’un an d’emprisonnement pour avoir participé en 2009 à un rassemblement devant l’ambassade d’Iran à Londres. Elle perd son appel en octobre, faisant craindre son retour derrière les barreaux.

Pour Richard Ratcliffe, Nazanin était clairement l’«otage» d’un sinistre jeu politique portant sur une vieille dette de 400 millions de livres (475 millions d’euros) due par le Royaume-Uni dans le cadre d’un contrat d’armement. Qualifiant cette dette de « légitime », la cheffe de la diplomatie Liz Truss a dit mercredi s’être donné pour priorité de la solder – sans toutefois lier les deux affaires.

Richard Ratcliffe n’a jamais abandonné son combat pour la libération de sa femme, qu’il a rencontrée en 2007 à Londres où elle était venue poursuivre des études – entre eux, le courant passe immédiatement. Pour alerter sur son sort, il s’est mis deux fois en grève de la faim.

L’Irano-Britannique a étudié la littérature anglaise à l’université de Téhéran et travaillé en Iran pour des ONG, dont la Croix-Rouge, et l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Dans son pays d’adoption, elle a continué d’évoluer dans le secteur caritatif, collaborant avec BBC Media Action, association liée au groupe audiovisuel BBC, avant de rejoindre son employeur actuel.

Dans une lettre à son mari publiée un an après son arrestation, elle avait exprimé sa déception à l’encontre de son pays natal, dont elle était si « fière » mais qui l’a privée de « la possibilité de connaître les années d’or » de leur fille, désormais âgée de 7 ans.