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Philippe Poirier : «Il ne faut pas surestimer l’isolement de la Russie»


Philippe Poirier. (photo Tania Feller)

Le Pr Philippe Poirier décrypte pour nous le conflit en Ukraine.

Philippe Poirier est, entre autres, professeur en sciences politiques à l’université du Luxembourg à Belval. Il est aussi expert auprès du Groupe d’États contre la corruption du Conseil de l’Europe et, dans ce cadre, il a eu à plusieurs reprises la responsabilité de réviser les rapports sur des États d’Europe orientale et centrale, notamment l’Ukraine, la Fédération de Russie et les États baltes (Estonie, Lettonie et Lituanie), dans lesquels il s’est rendu à plusieurs reprises.

Comment en est-on arrivé à cette guerre en Ukraine ?

Philippe Poirier : Il faut déjà revenir à la dissolution de l’Union soviétique. À ce moment-là, une Communauté d’États indépendants (CEI) a été créée, qui existe toujours sur le papier, mais qui a été vidée de son contenu, car les pays n’arrivaient pas à atteindre les objectifs économiques fixés. En outre, l’Ukraine est alors entrée dans un processus de dénucléarisation militaire. En contrepartie d’une aide technique et financière, la Russie s’engageait à reconnaître l’intégrité de ce territoire.

Le système politique ukrainien, comme toutes ces démocraties post-soviétiques, est complètement instable et la corruption sévit : les partis politiques naissent et meurent, les candidats qui se sont succédé au gouvernement ou à la présidence ont peu de légitimité et d’assise. Dans ce contexte interne, il faut ajouter des tensions entre oligarques. C’est la transformation de l’économie soviétique, avec des concessions économiques attribuées à des entreprises à la chute de l’Union, qui a entraîné l’apparition de ce système politico-économique.

Les oligarques ukrainiens soutiennent différentes factions politiques et s’affrontent. La tension s’est cristallisée entre 2005 et 2008 sur le point de savoir si le pays devait se rapprocher économiquement de l’Ouest ou maintenir le lien avec la Russie en raison du passage du gaz, dont l’Ukraine tire d’importants revenus : quatre milliards de dollars, ce qui est monumental pour ce pays.

Or la stabilité politique existe en Russie, même s’il s’agit d’un ...


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