Deux as du cambriolage. L’un les revendique et l’autre a de bonnes excuses pour écarter les soupçons. Au final, ils risquent tous les deux de rester à l’ombre un moment encore.
Nevres s’est rendu coupable de quatre faits de vols qualifiés et d’une tentative commis entre mai et septembre 2017 au Grand-Duché. Le jeune Bosnien de 29 ans a fait des aveux complets au juge d’instruction. Il a même avoué deux faits desquels il n’était pas directement suspecté et où rien ne l’incriminait, a avancé son avocate jeudi. Son ADN avait été retrouvé à certains endroits.
Ce grand costaud actuellement en détention n’aurait fait que jouer les guetteurs pendant que son complice s’introduisait à l’aide d’un tournevis dans les domiciles qu’ils cambriolaient. À la barre de la 18e chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg, le prévenu raconte qu’ils se sont rencontrés en prison «vers 2015 ou 2016 » en Bosnie où il était incarcéré pour des braquages. «Il m’a proposé de le rejoindre en France dès ma sortie de prison pour commettre des cambriolages», a expliqué Nevres qui n’en aurait pas commis plus que ceux pour lesquels il comparaissait jeudi.
C’est cet ami qui, dit-il, avait repéré et choisi les maisons à cambrioler. «Il connaissait bien le Luxembourg.» C’est lui aussi qui a revendu le butin et en a partagé les bénéfices. «Vous donnez l’impression de n’avoir été qu’une marionnette», note le président de la chambre correctionnelle avant de l’interroger sur ses motivations à commettre les faits et ce qu’il y a gagné.
«Il est fatigué de cette vie»
Le jeune homme au crâne rasé à l’exception d’une fine crête est incarcéré à Schrassig depuis six mois en détention préventive. Il a été livré à la justice luxembourgeoise par l’Allemagne où il était également incarcéré pour des faits de vols qualifiés à la suite d’un mandat d’arrêt international. Ces vols sont concomitants avec ceux réalisés au Luxembourg. Ces allers-retours derrière les barreaux lui auraient fait prendre conscience de ses actes. «Il est fatigué de cette vie», a précisé son avocate et il aimerait pouvoir retrouver ses jumeaux.
Mais son profil et la nature des biens volés – des bijoux et une collection de baskets rares – l’incriminent, selon la représentante du parquet. «Il a fait cela toute sa vie», juge-t-elle, soulignant le professionnalisme avec lequel le duo a agi. «En rentrant dans les maisons, ils sont entrés dans l’intimité de leurs victimes. C’est un traumatisme, même si les pertes ne sont que matérielles», a-t-elle poursuivi. Une de ces victimes s’est portée partie civile. Elle a demandé 11 700 euros en remboursement des bijoux que le duo lui a volé.
Le parquet a, quant à lui, requis une peine de prison ferme qui ne doit pas être inférieure à 30 mois et ne s’est pas opposé à un sursis partiel de la peine à prononcer. Sa représentante n’a pas requis d’amende à son encontre. Cela ne ferait qu’engendrer qu’un risque de récidive, selon elle. L’avocat du prévenu a demandé que la peine la plus courte possible soit prononcée et de l’assortir d’un sursis, mais pas d’une amende pour les mêmes raisons avancées par la représentante du parquet. Il sera fixé sur son sort le 17 mars.
«Le Saint-Esprit existe-t-il?»
«Je n’ai jamais mis les pieds au Luxembourg. La première fois, c’est quand j’ai été extradé par la police, s’est défendu Barys. Je n’ai pas pu commettre les faits.» Une empreinte d’ADN de ce Russe de 41 ans a pourtant été retrouvée sur une étagère de l’entreprise qu’il est accusé d’avoir cambriolée le 29 septembre 2019. «J’ai beaucoup réfléchi. Quelqu’un a pu mettre mes vêtements et commettre le vol à ma place. Je connais beaucoup de monde en Allemagne», a-t-il encore tenté sans parvenir à convaincre la 18e chambre correctionnelle. Son président soulève que le prévenu, toxicomane, est connu en Allemagne pour des vols.
En l’espèce dans cette affaire, il lui est reproché d’avoir volé 2 000 paquets de cigarettes, des boîtes de tabac, de l’argent et un ordinateur. «Le Saint-Esprit existe-t-il? L’ADN de Barys peut-il se trouver à un endroit au Luxembourg et Barys ne pas y être?», interroge la représentante du parquet, incrédule. «Il a dû participer au coup sans se rendre compte qu’il avait passé la frontière.» Elle explique qu’apprenant qu’il avait été repéré par la police et ne sachant pas comment, le prévenu avait dans un premier temps prétexté avoir perdu son passeport pour détourner les soupçons. «Il sait ce qui lui pend au nez. C’est pour cette raison qu’il nie avoir commis les faits», poursuit-elle estimant qu’«il doit être puni». Elle a requis une peine de 24 mois de prison et s’oppose à un sursis intégral «étant donné son comportement».
L’avocat de Barys a mis en avant son passé compliqué et pointé «un doute dans ce dossier». La seule empreinte génétique trouvée sur les lieux du vol et des images de vidéosurveillance peu concluantes ne permettraient pas de l’accuser. Il a simplement et de manière expéditive demandé l’acquittement de Barys. Tout comme Nevres, il sera fixé sur son sort le 17 mars.