Dans Ricki and the Flash, de Jonathan Demme, qui sort en salles ce mercredi, Meryl Streep interprète une vieille star de la scène rock. Et retrouve sa famille. Portrait de celle qui est, à 66 ans, considérée comme la meilleure actrice de l’ère moderne.
Une sacrée réputation. À 66 ans, elle présente un CV plus long que le bras : plus de 70 films, trois Oscars (pour 19 nominations dont 15 pour la catégorie «meilleure actrice»), huit Golden Globes, deux Bafta, un César… La recordwoman du monde (ciné) et une légende pour sous la photo : Meryl Streep, la meilleure actrice de l’ère moderne. Rien que ça! Et cette semaine, on retrouve l’Américaine (née le 22 juin 1949 à Summit, New Jersey) chez Jonathan Demme pour Ricki and the Flash – un «feel good movie», un de ces films qui font du bien.
L’histoire est toute simple : des années après avoir quitté sa famille pour devenir une rockstar, une femme revient vers ses enfants, tandis que l’un d’eux est en plein divorce. C’est Ricki Rendazzo. Elle confie : «Faut renoncer à plein de trucs pour devenir une rockstar», alors que sa fille lui lance : «Bienvenue dans les années 80!»
Une fois encore, Meryl Streep offre un jeu distancié, précis et rigoureux. Une fois encore, devant les caméras de Jonathan Demme (entre autres, The Silence of the Lambs , Philadelphia et The Truth about Charlie), elle joue avec son image, comme elle l’avait fait précédemment dans She-Devil , The Devil Wears Prada , Death Becomes Her … On la retrouve en vieille carcasse de la scène rock. Elle ne sait pas raccrocher et avec son groupe, The Flash, dans le personnage de Ricky, elle chante pour une Amérique de sitcom. Avec son cœur de rockeuse, elle en propose et offre pour tous les goûts : de la bluette rose emplie de bons sentiments, de l’humour crasseux d’arrière-salle de bar…
Évoquant Ricki and the Flash et son rôle, Meryl Streep confie : « La proposition de Jonathan a été, pour moi, inattendue et belle. À 60 ans passés, c’est merveilleux de pouvoir se glisser dans la peau d’une rockeuse. D’autant plus que la musique a toujours joué un rôle important dans ma vie. C’est la raison pour laquelle j’ai souhaité participer à des comédies musicales comme Mamma Mia! ou Into the Woods .»
Une fois encore, elle ajoute qu’il n’est pas question, pour elle, de prendre sa retraite – et de glisser qu’une des belles surprises de ce Ricki and the Flash , c’est d’avoir tourné avec sa fille Mamie Gummer (laquelle y joue le rôle de la fille de la rockstar) : « Au départ, ce n’était pas prévu. Et puis un jour, le producteur me dit qu’il a pensé à quelque chose, mais qu’il n’osait pas me le dire. Il avait pensé à Mamie pour jouer ma fille. J’ai trouvé que c’était une brillante idée mais, promis juré, ce n’est absolument pas moi qui ai suggéré cette option! »
Une femme d’engagament(s)
Mariée depuis 1978 avec le sculpteur américain Don Gummer, Meryl Streep a tourné son premier long métrage en 1977 dans Julia, de Fred Zinnemann. Après Ricki and the Flash, on la retrouvera cet automne (novembre) dans Suffragette, de Sarah Gavron, puis dans Florence Foster Jenkins , de Stephen Frears, avec Hugh Grant. À la question : comment expliquez-vous votre carrière au cinéma?, elle répond : « Je crois que je suis simplement toujours arrivée au bon moment, au bon endroit. J’ai surtout eu la chance de jouer des rôles d’avant-garde par rapport à la société de l’époque. Certaines femmes se sont par exemple retrouvées en moi dans des films comme Kramer vs. Kramer, de Robert Benton, avec Dustin Hoffman. À cette période, à la fin des années 1970, le divorce était encore un sujet tabou et il était impensable qu’une mère puisse quitter mari et enfant. Sans fausse modestie, je pense avoir simplement bénéficié d’un concours de circonstances… »
Et puis, il y a l’autre Meryl Streep. Une femme d’engagament(s). Ainsi, au printemps dernier, elle a lancé le Writers Lab, un laboratoire destiné à aider les femmes scénaristes de plus de 40 ans à réaliser leur rêve d’écriture. Ce n’est pas seulement un effet d’annonce : l’actrice américaine a précisé qu’elle financera ce laboratoire qui proposera aux huit femmes scénaristes sélectionnées un séminaire d’écriture à New York – elles y seront encadrées par des scénaristes, des productrices et des réalisatrices. En 2012 déjà, lors d’une remise de prix, elle avait dénoncé la sous-représentation féminine dans l’industrie du cinéma : « Dans cette salle, nous connaissons très bien ces statistiques terribles concernant la sous-représentation choquante des femmes dans notre business… Les films avec des héroïnes rapportaient bel et bien de l’argent, contrairement à ce que certains producteurs laissaient entendre. »
En novembre 2014, le président Barack Obama lui remettait la médaille de la Liberté, la plus haute distinction des États-Unis. Et de se laisser aller à ce commentaire : «Elle a reçu le pouvoir de l’empathie. Meryl utilise ce don pour aider les autres. Elle est vraiment l’une des plus grandes dames des États-Unis.»
Serge Bressan
Ricki and the Flash, de Jonathan Demme.