Saïd serait sur une mauvaise pente. Le substitut du procureur espère freiner sa descente avec une peine de prison jugée sévère pour lui passer le goût des délits.
Saïd vient d’avoir 18 ans et commence sa vie d’adulte en prison. Saïd est ce qu’on appelle un mineur non accompagné. Il était hébergé dans un foyer pour demandeurs d’asile à Luxembourg et encadré par des éducateurs. On n’en découvrira pas plus de l’histoire personnelle de ce grand gamin. Il comparaissait ce jeudi face à la 18e chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg pour des faits de vol avec violence, de menaces, de coups et blessures volontaires et de destruction de véhicule.
Les faits remontent au mois d’août 2021. Le 6 août, le jeune homme a pété un câble au foyer. Pour une raison qu’il n’explique pas. «Il a crié le nom d’un des résidents du troisième étage du foyer et s’est précipité dans les escaliers», le directeur du foyer à ses trousses. «C’était impossible de communiquer avec lui. Il jetait des poubelles en l’air», se souvient ce dernier, qui parvient à l’immobiliser. Selon lui, un cutter tombe alors de la poche du jeune homme qui n’était pas prêt à se calmer tout de suite. Le directeur dit avoir mis son personnel et les résidents à l’abri avant d’appeler la police. Pendant ce temps, Saïd aurait lancé des pierres sur les voitures de l’équipe du foyer avant de prendre la fuite.
Six jours plus tard, Saïd et un complice sont arrêtés par la police après le signalement de deux vols de colliers et de montres. Ils auraient caché leur butin dans une chaussette. Guy, une de leurs victimes présumées, se souvient avoir emprunté l’ascenseur d’un des parkings souterrains du centre-ville de la capitale. «Je leur ai demandé à quel étage ils se rendaient. Ils m’ont dit que cela leur était égal», raconte-t-il. «Je me suis méfié.» Le piège s’est tout de même refermé sur lui.
Les deux jeunes hommes descendent avec lui au -4 et ne l’auraient plus lâché d’une semelle. Saïd lui aurait dit «danser comme Ronaldo» et aurait esquissé des pas de danse. «J’ai compris plus tard que c’était un truc pour détourner mon attention et me faire baisser la tête pour faciliter le vol de ma chaîne en or», témoigne le sexagénaire. «Cela n’a duré que quelques secondes.» Heureusement pour lui, le collier qui, dit-il, était «un souvenir de (son) père», lui a été rendu quelques jours plus tard par les policiers.
Un autre monsieur aurait été dépouillé par les deux jeunes hommes le même jour alors que, comme Guy, il revenait d’avoir été faire ses courses. L’un d’eux lui aurait asséné un coup de poing.
Saïd, en aveux, demande pardon. Il aimerait une deuxième chance pour pouvoir reprendre sa vie en main. Le substitut du procureur ne se laisse pas émouvoir. «Son casier judiciaire est encore vierge parce qu’il est tout juste majeur», estime-t-il. «Il n’a pas conscience de ses actes et s’en prend aux personnes qui sont là pour le protéger.» Saïd n’aurait « pas de remords», «aucun mal à faire des menaces» et «aucun respect envers qui que ce soit». Il a requis une peine de 38 mois de prison ferme et une amende à son encontre.
Une peine jugée beaucoup trop sévère par l’avocate de Saïd, qui a plaidé la clémence du tribunal. Son client ne serait, selon elle, pas indigne d’un sursis intégral étant donné qu’il s’agirait alors de sa toute première condamnation.
Saïd sera fixé sur son sort mercredi prochain.
Munir : «N’importe qui aurait pu le prendre»
Munir aurait eu beaucoup de chance le 31 octobre 2021. Le jeune homme vit dans la rue et a faim. Il dit avoir trouvé un portefeuille dans une voiture et s’en être emparé. «Je n’ai rien cassé. Je l’ai juste pris. Il était posé là», a-t-il expliqué hier matin à la barre de la 18e chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg. «N’importe qui aurait pu le prendre.» Le jeune homme se serait servi de l’argent qu’il contenait et des cartes de crédit pour s’acheter des boissons et de la nourriture, selon son avocate.
Il est arrêté, puis relâché. Les policiers auraient estimé qu’il était de bonne foi et l’avaient laissé repartir après un rappel à l’ordre. Le propriétaire du portefeuille n’a pas porté plainte et ne s’est pas constitué partie civile. Les sommes d’argent utilisées auraient été minimes. Mais, lui reproche le parquet, cela ne l’a pas freiné et il a dû être arrêté quelques jours plus tard. Il est accusé d’avoir, dès le lendemain, volé des cannettes de bière à une station-service, puis d’avoir, le 30 octobre, subtilisé de la vodka. De plus, il s’est avéré que Munir se trouve sous le coup d’une interdiction de se trouver sur le territoire luxembourgeois depuis le 5 juin 2019.
Le substitut du procureur a requis une peine de 20 mois de prison ferme et une amende. L’avocate du jeune homme a plaidé en faveur d’une réduction de peine ou d’un sursis et demande que le tribunal fasse abstraction de l’amende.
Munir connaîtra, lui aussi, son sort mercredi prochain.