ITALIE Issa Bah, sur le banc de Venise contre l’Inter, en Serie A, samedi dernier, est passé de l’ombre à la lumière en quelques mois. Mais il n’oublie pas le Grand-Duché.
Comment vous sentez-vous, quelques jours après cette première apparition sur une feuille de match de Serie A et le déplacement de Venise sur la pelouse de l’Inter Milan ?
Issa Bah : Fatigué, mais ça va. C’était très très très dur, même sans avoir joué. Mais c’était beau, car je viens de très loin. Ces deux dernières années, j’ai quand même été blessé au dos près d’un an, j’ai aussi un problème de cheville qui a duré trois mois, mais je n’ai pas abandonné. Surtout que je souffrais encore de ma cheville en arrivant à Venise et qu’en plus de la soigner, je devais m’adapter.
À la langue aussi.
Les cours, ça avance petit à petit. Je comprends déjà ce qui se dit sur le terrain en italien.
Comment êtes-vous installé ?
Je partage un appartement avec deux autres jeunes joueurs de la Primavera. C’est bien et pas dur de resté concentré sur l’essentiel, parce qu’eux comme moi, on veut la même chose : aller plus haut. Et en Italie, dans un pays où l’on fait énormément confiance à l’expérience, il faut avoir de la patience.
Et une hygiène de vie impeccable. Facile quand on a 19 ans et qu’on se retrouve loin de chez soi ?
Marco (NDLR : Selvaggi), mon agent, m’a beaucoup aidé au niveau de l’alimentation. Je me fais livrer ma nourriture. Avant, quand je m’éloignais, pour des essais à l’Udinese ou à Strasbourg, je savais que je n’allais pas rester. Mais là, entre les pâtes et les pizzas, il faut pouvoir digérer (il rit).
Je prends des cours de luxembourgeois, par Facetime. Je fais des efforts
Comment trouvez-vous Venise ?
Quel endroit ! Je crois que j’ai dû avoir un jour de pluie depuis mon arrivée ! Et j’adore la place Saint-Marc quand le soleil se couche.
Regrettez-vous de ne pas être entré en jeu contre l’Inter, samedi ?
C’est chiant, forcément, mais bon, je viens d’Afrique et quand j’étais jeune, là-bas, jamais je n’aurais imaginé que je me retrouverais à San Siro. M’échauffer au milieu de ces stars, c’est un rêve devenu réalité! Je n’ai même pas encore fini d’ouvrir tous mes messages. J’en ai plein de potes qui jouaient avec moi, jeunes, en Guinée et qui se rendent compte que ce n’est pas facile d’atteindre la Serie A. J’en ai fait des sacrifices, mais gloire à Dieu – oui, je suis très croyant – j’y suis arrivé. Beaucoup travaillent très fort pour y arriver, mais peu y arrivent. Peut-être n’est-ce pas leur destin.
Beaucoup de coéquipiers du Progrès vous ont contacté ?
Eh bien, pas trop. Surtout de la part des joueurs avec qui je trainais et notamment Lamine Ba. Il y a eu aussi Antoine Mazure, un gars super sympa que je n’ai pourtant pas fréquenté longtemps. Et puis, Fabio Marochi et Thomas Gilgemann. Mais c’est avec Lamine que je suis quotidiennement en contact. Il était avec moi, le dernier jour du mercato, quand je suis parti à la toute dernière seconde. On sortait de l’entraînement et je lui dis : « Je sais qu’il ne reste plus qu’un jour, mais je sens que quelque chose va venir! C’est le moment, j’ai plein de choses à apprendre ». Lui, il me répond : « C’est quand même chaud au niveau du timing ». Dans la voiture, je finis par lui dire : « T’as raison, concentrons-nous sur la saison à venir ». Et voilà qu’à 18 h je reçois un message. Comme il en arrivait souvent. Du bla-bla habituel. Je ne réponds pas. Et puis, finalement si. Le type me demande si j’ai un agent, je réponds oui et je l’oriente vers lui. J’étais choqué. Mon agent m’a rappelé alors que j’étais en chemin pour aller voir ma copine. J’ai immédiatement fait demi-tour. Le lendemain, je prenais l’avion et je signais. C’est allé si vite… Mais qu’est-ce que je suis fier de moi!
Êtes-vous amené à rester dans le groupe de Serie A, dorénavant ?
Si ça ne tenait qu’à moi… Mais l’expérience, ça compte. Et la mienne, à part un peu d’Europa League, elle n’est pas bien grande. Je ne me dis pas que je devrais rester dans le groupe professionnel pour ne pas être déçu. Mais mon objectif principal, c’est surtout que Venise m’achète.
Nani m’a déjà demandé si je parlais portugais, mais non
C’est au programme, a-t-on cru comprendre.
Oui, je crois qu’ils comptent lever l’option d’achat auprès du Progrès. Mais pour le moment, ce ne sont que des paroles. Même si je vois qu’ils m’aiment bien, on est en pleine période des transferts et il n’y a pas que moi. Là, ils sont plutôt en train d’envisager l’arrivée de nouveaux joueurs. Normal.
Il y a Nani qui est arrivé. Comment est-il ?
Un gars simple. C’est magnifique de le voir. Un gars que je regardais avec Cristiano Ronaldo, étant jeune. Et je suis dans le même vestiaire que lui. Il m’a déjà demandé si je parlais portugais (il rit)… mais non.
Si l’option est levée, on parle d’un prêt. Avec, potentiellement, une option américaine…
Ce n’est pas de l’arrogance que de dire ça, mais je crois que c’est mieux pour moi de me montrer en Europe, même si ça doit être en D2. En Italie, par exemple… Mais les États-Unis, c’est encore plus loin de chez moi, ça parle anglais et je ne parle pas bien anglais. Mais c’est surtout que ce sera difficile de revenir si ça ne marche pas…
Quelles nouvelles de la FLF ?
Oui, je parle avec eux.
Vous parlez avec eux ?
J’apprécie Manou Cardoni. Je l’apprécie beaucoup. Il me permet de prendre des cours de luxembourgeois en Facetime. Je fais des efforts. Le Luxembourg reste une option pour moi. Je verrai bien si j’obtiens la nationalité. Mais après tout, c’est grâce à la FLF – et à Hamm – si j’en suis là. J’avais quinze ans, ils m’ont aidé pendant deux ans et demi avec ma formation, ils m’ont aidé à grandir. Il y avait une navette qui m’amenait tous les jours directement après les cours. Ça m’a détourné des bêtises que d’autres pouvaient faire. Mais bon, pour le moment, je me focalise sur ma carrière. Le choix du pays viendra plus tard.