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Ukraine : les Européens surpris par la «dramatisation» de Washington


Le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, à son arrivée pour la réunion avec les ministres de l'UE consacrée aux tensions entre la Russie et l'Ukraine, ce lundi matin. (photo AFP)

L’UE attend ce lundi des explications du secrétaire d’État américain Antony Blinken sur la possibilité d’une invasion russe de l’Ukraine, surprise par la dramatisation de Washington qui a ordonné l’évacuation des familles de ses diplomates dans ce pays, un rappel critiqué par Kiev.

Londres a suivi le mouvement et annoncé le retrait d’une partie du personnel de son ambassade à Kiev. La ministre britannique des Affaires étrangères, Liz Truss, doit rencontrer ce lundi à Bruxelles le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg. Dans ce climat tendu, l’OTAN a annoncé placer des forces en attente et envoyer des navires et des avions de combat pour renforcer leur défense en Europe de l’Est face aux activités militaires de la Russie aux frontières de l’Ukraine.

Antony Blinken doit intervenir en visioconférence pendant une réunion des ministres des Affaires étrangères des Vingt-Sept. « Le secrétaire Blinken nous expliquera les raisons de cette annonce. Nous n’allons pas faire la même chose, car nous ne connaissons pas les raisons spécifiques », a déclaré le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, à son arrivée pour la réunion avec les ministres de l’UE consacrée aux tensions entre la Russie et l’Ukraine.

Asselborn : « Il ne faut pas se mettre dans la logique d’une guerre »

La décision de Washington a été jugée « prématurée » et « excessive » par les autorités ukrainiennes. « Je ne pense pas qu’on devrait dramatiser dans la mesure où les négociations se poursuivent et elles se poursuivent. Nous n’avons pris aucune décision pour demander le départ des familles de nos diplomates d’Ukraine, à moins que Blinken ne nous fournisse des informations justifiant un tel mouvement », a ajouté Josep Borrell.

« Il ne faut pas se mettre dans la logique d’une guerre. Il faut éviter la guerre », a estimé le doyen des ministres des Affaires étrangères de l’UE, le Luxembourgeois Jean Asselborn.

Antony Blinken doit informer les membres de l’UE des « pourparlers francs » qu’il a tenus vendredi avec son homologue russe Sergueï Lavrov. Russes et Américains sont convenus d’un nouveau rendez-vous, et Antony Blinken s’est engagé à « coucher des idées sur le papier » en réponse aux demandes de Moscou pour la sécurité en Europe. La Russie exige un engagement écrit sur le non-élargissement de l’OTAN à l’Ukraine et à la Géorgie et demande un retrait des forces et des armements de l’Alliance atlantique des pays d’Europe de l’Est ayant rejoint l’OTAN après 1997, notamment de Roumanie et Bulgarie. Des demandes inacceptables pour les Occidentaux.

La situation sécuritaire est jugée préoccupante. Moscou assure ne pas avoir l’intention d’intervenir en Ukraine, mais soutient les revendications des séparatistes pro-russes des républiques autoproclamées de Lougansk et Donetsk dans le Donbass (est) et a massé plus de 100 000 soldats, des chars et de l’artillerie aux frontières avec l’Ukraine. « Nous espérons qu’une attaque n’aura pas lieu. Mais si c’est le cas, nous sommes prêts à répondre par des sanctions économiques et financières massives », a affirmé jeudi la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen.

Sanctions « sans précédent » 

Les ministres réaffirmeront cette position lundi, selon le projet de déclaration commune. « Si la Russie envahit une nouvelle fois l’Ukraine, nous adopterons des sanctions sans précédent et la Russie sera totalement isolée », a confirmé le ministre danois Jeppe Kofod. Une série d’options ont été préparées par la Commission. La réduction des achats de gaz et de pétrole, respectivement 43% et 20% de l’approvisionnement de l’UE, et qui financent largement le budget russe, est sur la table, a confié une source européenne.

« Rien de concret ne sera approuvé aujourd’hui », a toutefois précisé Josep Borrell. « Le processus est en cours pour être sûr que tout sera prêt en cas de besoin », a-t-il assuré.

La réduction des achats d’énergie divise l’UE. Le Premier ministre hongrois, Viktor Orban, doit se rendre à Moscou en février pour discuter notamment des approvisionnements en gaz de son pays.

« La crédibilité de notre réponse à Moscou suppose d’éviter les vulnérabilités (…) face à l’utilisation des flux migratoires ou de l’énergie avec le jeu sur le prix du gaz ou les fournitures », a insisté le président français Emmanuel Macron mercredi au Parlement européen.

L’Allemagne aurait par ailleurs fait retirer une proposition visant à couper Moscou du système mondial de paiement SWIFT, selon une source diplomatique européenne. Et Berlin refuse de livrer des armes à Kiev, contrairement aux États-Unis qui ont envoyé 80 tonnes d’armements, a annoncé le ministre ukrainien de la Défense Oleksii Reznikov. Le chancelier Olaf Scholz a appelé dimanche à la « sagesse » dans l’examen des sanctions possibles et des « conséquences » pour l’Allemagne.