L’impact du coronavirus sur les hôpitaux du pays reste gérable. Le variant Omicron constitue toutefois encore une inconnue. Et la complexité du traitement des malades du covid n’est toujours pas à sous-estimer.
Le bilan chiffré de vendredi est le suivant : 72 malades du covid sont hospitalisés, dont 50 en soins normaux et 22 en soins intensifs. S’y ajoutent 30 patients testés positifs, mais hospitalisés pour des raisons «non covid», dont 1 en soins intensifs. «Les seuls chiffres bruts ne sont pas toujours très parlants», admet la ministre de la Santé, Paulette Lenert. Vendredi, elle s’est donc présentée face à la presse entourée de cinq responsables médicaux des différents établissements hospitaliers du pays pour livrer une image plus détaillée de la situation covid vécue dans le CHL, le CHEM, les HRS et le CHdN.
Premier constat majeur : pour l’instant, les hôpitaux tiennent bon face au covid. «Les déprogrammations d’interventions chirurgicales et de traitements administrés à l’hôpital sont très rares», souligne le Dr Romain Schockmel, directeur médical adjoint au CHEM. Un accent plus particulier est mis sur les traitements ambulatoires. «Nous planifions au jour le jour les interventions et traitements afin de maintenir un maximum de capacités pour les patients non covid», indique le Dr Marc Berna, membre de la direction médicale des Hôpitaux Robert-Schuman (HRS).
Un patient covid sur trois en réanimation meurt
Depuis le début de la pandémie, le système hospitalier du Luxembourg n’a jamais atteint ses toutes dernières limites. «Il nous faut éviter de tomber dans un cercle vicieux», met toutefois en garde le Dr Berna, en faisant référence à l’épuisement mental et physique des soignants. S’ajoute aujourd’hui une hausse des absences dues à des infections et quarantaines provoquées par le variant Omicron, et ce, en dépit du fait que plus de 92 % des soignants et même 98 à 99 % des médecins sont vaccinés. «Ce ne sont pas les lits qui posent problème. La pierre angulaire, ce sont les ressources en personnel», martèle le Dr Schockmel.
Le nouveau variant du covid-19 constitue donc le prochain défi majeur des hôpitaux, confrontés depuis maintenant près de deux ans à une maladie sans précédent. «En 20 ans de service en soins intensifs, je n’ai jamais vécu une telle situation», témoigne le Dr Christophe Werer, chef du service réanimation du CHL. Un patient covid sur trois admis aux soins intensifs décède des suites de son infection.
En 2019, l’occupation des soins intensifs au CHL était de 85 %. «On peut donc affirmer que l’on était plein sur l’ensemble de l’année. Depuis 2020 et l’arrivée du covid, il nous faut gérer en plus ces patients», reprend le Dr Werer. Les malades du covid en réanimation ont entre 45 et 70 ans et présentent tous un ou plusieurs autres facteurs de risque : diabète, obésité (même légère) ou hypertension artérielle, sans oublier d’autres pathologies chroniques (lire également ci-contre). «Leur séjour en réanimation varie entre 7 et 15 jours, mais il n’est pas rare non plus que ces patients covid restent plus de 21 jours en soins intensifs. Ils ont peut-être vaincu le covid, mais souffrent d’autres séquelles graves», détaille le Dr Werer.
Armés pour contrer Omicron
L’impact de la récente explosion des nouvelles infections au coronavirus sur les hospitalisations reste à évaluer. «Il est trop tôt pour en dire plus. Actuellement, les patients Omicron deviennent plus fréquents en soins normaux», avance le Dr Staub, infectiologue travaillant également au CHL. Aucun patient triplement vacciné n’a encore été admis en soins intensifs. «Il faut toutefois avoir à l’œil la tendance et voir si elle s’inverse», annonce la ministre Lenert.
Les hôpitaux se disent armés pour faire face à Omicron, a priori moins virulent que le variant Delta. «Nous sommes flexibles pour nous adapter à la situation. Le seul effet secondaire est que les traitements non urgents de patients non covid devront être déprogrammés en plus grand nombre», indique le Dr Berna.
Il y a un an, 70 malades du covid se trouvaient en soins normaux et 20 en soins intensifs, soit les mêmes ordres de grandeur qu’actuellement. Moins de 300 cas positifs par jour étaient cependant rapportés début janvier 2021. Le bilan est tout autre aujourd’hui…
Le covid pas seul en cause
chez les vaccinés admis en soins intensifs
Les covidsceptiques et antivax renvoient encore et toujours vers la hausse du nombre des patients vaccinés pour dénigrer l’efficacité du sérum. Les chiffres bruts sont cependant à remettre dans leur contexte.
Le fait marquant est ainsi que le covid n’est, et de loin, pas seul en cause de l’hospitalisation de personnes vaccinées. Le Dr Christophe Werer est ainsi venu préciser, vendredi, que sur les trois derniers mois de 2021, ce sont 11 patients vaccinés qui ont été admis aux soins intensifs du Centre hospitalier de Luxembourg (CHL).
Parmi ces 11 figurent 3 patients testés positifs, mais pour lesquels le covid n’est pas à l’origine de l’hospitalisation (e.a. grave accident de voiture). Au vu de leur infection, ils doivent toutefois être isolés et occupent donc un contingent des lits covid. S’y ajoutent 2 autres patients souffrant de leucémie, dont le système immunitaire n’est pas en mesure de produire des anticorps, en dépit d’une vaccination. Sur les 11 hospitalisés, 5 autres souffrent d’antécédents médicaux graves, tels que des infections chroniques des poumons ou du cœur (péricardite).
Il reste donc un seul patient vacciné où le covid est la raison majeure de l’hospitalisation. Il s’en est sorti indemne.