Accueil | Politique-Société | Affaire Engel : «Ce qui allait être fait était clair»

Affaire Engel : «Ce qui allait être fait était clair»


Me Lydie Lorang, l’avocate de Frank Engel et membre du CSV, est venue fustiger, hier, le «putsch» que Parti chrétien-social aurait mené contre son client.  (Photo : fabrizio pizzolante)

La plaidoirie de l’avocate de Frank Engel, accusé d’avoir bénéficié d’un emploi fictif lorsqu’il était président du CSV, laisse conclure à un acquittement. Le parquet va répliquer mardi.

Nous titrions ce jeudi que Frank Engel se retrouvait seul contre tous ses anciens collègues de parti. Soupçonné d’avoir créé de toutes pièces un emploi fictif comme chargé de mission de l’ASBL CSV Frëndeskrees, le président déchu se retrouve depuis mardi devant les juges du tribunal d’arrondissement de Luxembourg. Il doit faire face à des accusations d’escroquerie, de faux et d’usage de faux, d’abus de confiance et même de blanchiment. Mais Frank Engel n’est pas seul. Avec Félix Eischen, André Martins, Stéphanie Weydert, Elisabeth Margue, Georges Pierret et Georges Heirendt, six membres du CSV se trouvent à leur tour inculpés dans cette affaire qui a comme base un clash politique sans précédent.

Au bout du troisième jour de procès, il s’avère en outre que Frank Engel bénéficie toujours du soutien de son ancien secrétaire général Félix Eischen. Et de celui du trésorier André Martins et de son prédécesseur Georges Heirendt. Les trois autres prévenus, en tête les anciennes vice-présidentes Stéphanie Weydert et Elisabeth Margue se montrent bien plus réservées. Les ponts avec Frank Engel semblent définitivement coupés. Il faudra attendre mardi et la plaidoirie de leur avocat pour y voir plus clair.

Une alliance pour défendre Frank Engel

Lors de sa plaidoirie, l’avocate de Frank Engel n’a pas hésité à qualifier de «putsch» l’action menée contre son client par les ténors de la fraction parlementaire du CSV. «Cela est indigne d’un aussi grand parti. Je suis moi-même membre du CSV et suis outrée», fustige Me Lydie Lorang, qui siège toujours pour le Parti chrétien-social au Conseil d’État. Hier matin, elle a soumis son argumentaire aux juges qui doit démontrer que le contrat de travail offert à Frank Engel était tout à fait légal. Dans cet exercice, l’avocate a obtenu du soutien de la part de ses confrères Me Philippe Penning, Me Frank Rollinger et Me Daniel Baulisch, les conseillers respectifs d’André Martins, de Georges Heirendt et de Félix Eischen. Leur choix est opportun, car sans faux contrat, pas de malversation de leurs clients.

À lire aussi Affaire CSV Frëndeskrees : Engel seul contre tous 

«Ce qui allait être fait était clair pour tous», clame Me Lorang à la barre. Sont ciblées Stéphanie Weydert et Elisabeth Margue, qui, elles, affirment n’avoir appris qu’en janvier l’existence du contrat signé en juin 2020. «Le principe même de ce contrat de travail a été validé à l’unanimité lors de la réunion du 24 avril 2020. La version définitive retranscrit une à une les dispositions validées», poursuit l’avocate de Frank Engel. Elle ne nie pas que seuls son client, le secrétaire général et le trésorier ont eu le contrat entre leurs mains. «Rien n’a empêché les deux vice-présidentes à décrocher leur téléphone pour se renseigner sur l’avancement du projet présenté par Frank Engel», renchérit Me Penning. Le seul fait que la transparence aurait été limitée «ne constitue pas un fait pénal», complète Me Baulisch.

Les quatre avocats qui ont plaidé jeudi affirment n’avoir aucun doute que Frank Engel a exécuté comme prévu son contrat de travail. Me Lorang cite les démarches entreprises pour doter le CSV de nouveaux locaux, qui n’ont pas abouti, ou encore la recherche de nouveaux donateurs. «Une énorme frustration a gagné mon client. Bon nombre des personnes contactées ont affirmé qu’elles étaient prêtes à le soutenir, mais elles ont fini par renoncer en raison des tensions régnant au sein du CSV», relate la conseillère de l’ancien président du CSV. Aussi bien Me Lorang que Me Penning ont avancé la jurisprudence qui conclut que le seul accord sur le cadre d’un contrat de travail le rend «effectif» (lire ci-dessous). Sans faux, pas d’escroquerie et donc pas non plus d’abus de confiance ni de blanchiment. «Et même si le contrat de travail n’avait pas été respecté, cela serait un cas pour la justice civile et non pas la justice pénale», complète Me Penning.

Le secrétariat général aurait été au courant

Autre argument livré ce jeudi pour décharger plus particulièrement les deux trésoriers inculpés : aussi bien les réviseurs de caisse que le congrès du CSV ont validé les comptes des années 2019 et 2020. Il s’agit plus particulièrement des 8 500 euros en cotisations sociales qui ont été remboursées à Frank Engel, un volet traité à part dans ce procès. En ce qui concerne le contrat de travail, le secrétariat général aurait été au courant de son existence. Les extraits de la sécurité sociale ont été adressés au siège que se partagent le CSV et le Frëndeskrees. «Les documents en question ont été tamponnés avant d’être transmis au trésorier», avance Me Penning.

L’audience d’hier a débuté avec une petite heure de retard. Le procès n’a donc pas pu être clôturé comme prévu. Les prolongations sont fixées à mardi matin. Ce sera alors au tour des avocats du trio Weydert-Margue-Pierret de plaider. Le réquisitoire du parquet suivra dans la foulée.

David Marques