L’amour n’aura pas duré entre Iulia et Teodor. Elle l’accuse de l’avoir frappée. Il conteste et évoque la vengeance d’une jeune femme éconduite et seule.
Iulia est venue au Luxembourg en septembre 2019 pour faire la connaissance de Teodor, un jeune homme rencontré en ligne. Sous le charme, elle reviendra une deuxième fois. Le confinement l’obligera à rester plus longtemps que prévu. Mais le conte de fées va virer au drame.
Le jeune homme se serait mis à boire plus que de raison et n’aurait plus du tout fait figure de prince charmant. Il serait devenu violent, insultant et aurait rabaissé ou humilié Iulia. À plusieurs reprises et de diverses manières, jusqu’au 4 décembre 2020.
Le jeune couple a emménagé ensemble. Jaloux, Teodor aurait contrôlé les moindres faits et gestes de la jeune femme, l’aurait isolée plus qu’elle ne l’aurait déjà été dans ce pays qui n’était pas le sien et où elle ne connaissait personne. Une énième dispute aurait éclaté. Il l’aurait frappée et, de rage, aurait détruit des objets de leur domicile. En sang, elle mettra dix jours à porter plainte auprès de la police. Elle était terrorisée, a-t-elle expliqué à la barre de la 7e chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg lundi.
Teodor s’obstine
Teodor nie les faits et dit être en possession de preuves qui contredisent les propos de la victime présumée. Il s’agit notamment de messages échangés avec Iulia après les faits, traduits par le prévenu lui-même. S’il reconnaît les nombreuses disputes, il indique que les violences n’auraient pas été à sens unique. Les faits se seraient, selon lui, passés le 7 décembre. Il l’aurait secouée, mais pas frappée. Elle l’aurait provoqué.
Restée dans la salle d’audience, Iulia lève ses yeux largement frangés de noir au ciel au fur et à mesure que le jeune homme raconte sa version des faits et tente de gagner du temps. La jeune femme aurait pu se blesser à l’extérieur après être sortie ou s’être griffée elle-même, insinue-t-il. Le président de la 7ᵉ chambre correctionnelle et le procureur perdent patience face aux réponses du jeune homme qui slalome pour éviter d’en venir aux faits. Le président le pousse dans ses retranchements, mais Teodor s’obstine : il n’a pas été violent envers Iulia.
Son avocat indique qu’il aurait même été surpris en voyant les photographies des blessures de la jeune femme. La situation serait tout autre que celle dépeinte par Iulia et les contradictions seraient nombreuses dans le dossier. L’avocat réaffirme que la jeune femme aurait pu s’infliger ses blessures au dos elle-même. Le certificat médical n’en ferait pas état. Le procureur ne croit pas en cette thèse.
«Elle n’a pas accepté la situation»
L’avocat continue d’argumenter. Leur relation, devenue toxique, aurait été sur le déclin. Teodor aurait rompu et Iulia lui aurait fait du chantage affectif et menacé de se suicider. «Elle n’a pas accepté la situation», explique l’avocat en s’appuyant sur les échanges de messages. Il s’agirait d’une vengeance. Pourquoi s’accrocher à un homme aussi violent?, interroge l’avocat qui estime que les infractions de coups et blessures volontaires ne peuvent être établies étant donné que les preuves ne seraient pas présentes à suffisance. «Le doute est permis», ajoute-t-il avant de réclamer l’acquittement et l’irrecevabilité des demandes de la partie civile. La jeune femme a demandé 7 000 euros de dommages moraux.
Pour le procureur, Iulia ne mentirait pas. Les photographies et les constatations médicales attesteraient de la véracité des faits. Les messages peuvent, selon le magistrat, être interprétés de manières différentes, notamment du point de vue d’une victime de violences domestiques. Il a requis une peine de 6 mois de prison avec sursis et une amende. Le président Maas a proposé d’éventuellement le condamner à du travail d’intérêt général et à des cours de gestion de la violence et de la colère s’il était reconnu coupable des faits qui lui sont reprochés. Le prévenu a refusé car, dit-il, il n’y aurait pas de raison de le condamner. Il sera fixé sur son sort le 28 octobre.
Sophe Kieffer