Le constructeur des fusées Ariane s’apprête à supprimer 600 postes en France et en Allemagne d’ici à la fin 2022 pour regagner en compétitivité, notamment face à la concurrence de l’américain SpaceX, a-t-on appris auprès de la direction et des syndicats.
« Nous avons effectivement annoncé un plan d’adaptation des effectifs d’un maximum de 600 personnes qui concerne la France et l’Allemagne », a déclaré la directrice des ressources humaines de l’entreprise, Florence Gallois.
Aucune fermeture de site n’est prévue, mais « l’ensemble des directions et des sites » de l’entreprise, qu’ils soient en Allemagne ou en France, sont concernés, a-t-elle ajouté.
« Tous les postes de travail sont concernés, sauf les personnels en atelier », a précisé une source syndicale. Les suppressions de postes envisagées touchent en effet les « fonctions liées à la structure de l’entreprise », comme la gestion de projets ou les fonctions support, selon Florence Gallois.
« Sachant qu’en France on a 350 départs naturels chaque année, si on y ajoute le flux d’embauches que l’entreprise va maintenir, il faudra faire partir 150 à 200 personnes », a estimé Philippe Gery, délégué syndical central CFE-CGC.
Dévoilé par l’hebdomadaire Challenges, ce plan vise à redonner de la compétitivité et réduire les coûts du fabricant des fusées Ariane face à la féroce concurrence de l’américain SpaceX et ses lanceurs réutilisables.
Coentreprise entre Safran et Airbus, ArianeGroup développe le lanceur lourd Ariane 6, dont le tir inaugural a été reporté au deuxième trimestre 2022 en raison de difficultés techniques aggravées par les conséquences de la crise sanitaire.
La direction dit travailler avec les deux groupes actionnaires pour étudier des solutions de redéploiement de salariés vers Safran et Airbus. « On ne parle pas de plan social », a déclaré Florence Gallois.
Les perspectives de lancement d’Ariane 6 portent sur un besoin de sept tirs par an, 30% de moins que lors du lancement du projet 2014, forçant l’entreprise à réduire ses coûts.
« Le ver était dans le fruit »
Un accord franco-allemand conclu en juillet prévoit que l’Agence spatiale européenne (ESA), dont les deux pays sont les principaux contributeurs, apporte un financement supplémentaire de 140 millions d’euros par an pour assurer la viabilité économique d’Ariane 6.
L’accord franco-allemand comprend également le transfert de la production de Vinci, le moteur réallumable de l’étage supérieur du lanceur, de Vernon (Eure) vers le site d’Arianegroup à Ottobrunn, en Allemagne.
Ce transfert représente « 40 000 heures de travail annuel », avance Philippe Gery, soit 40 emplois environ à Vernon, d’après la direction.
« Le ver était dans le fruit, mais c’est un coup dur », a reconnu le responsable syndical, pour qui « cela va affaiblir la maîtrise française sur la technologie de projection ».
Le transfert prendra de nombreux mois et ne s’inscrit pas dans le cadre du plan de suppressions d’emploi qui doit être en place d’ici la fin 2022, a insisté Florence Gallois.
Mais Philippe Gery dit craindre qu’il en appelle d’autres. Comme celui du moteur Prometheus, fer de lance de la stratégie européenne pour rester dans la course à l’espace face à la compétition internationale. Moins coûteux, polyvalent et réutilisable, ce futur moteur fabriqué à 70% en impression 3D est développé à Vernon.
Le transfert de Vinci « pourrait signer la fin de l’usine de Vernon à plus long terme », estime Philippe Gery. Cette dernière employait 952 CDI fin décembre 2020.
« Rien ne nous fait croire que le plan de 2 500 effectifs en moins d’ici 2025 n’est plus d’actualité », a réagi Benoit Dalgalarrondo, délégué syndical CGT, même si la direction refuse de se projeter au-delà de 2022. « Pour nous, ce plan n’est pas justifié », a-t-il ajouté.
ArianeGroup emploie 7 600 salariés et a réalisé 2,5 milliards de chiffre d’affaires en 2020.
AFP/LQ