Le syndicat des villes et communes propose de réformer le statut de l’élu local et se penche en particulier sur sa responsabilité pénale. Le Syvicol fait des propositions et affiche sa préférence.
En octobre 2006, le bourgmestre de Steinsel, Jean-Pierre Klein, vivait un drame dans sa commune. Un enfant de 6 ans fréquentant la maison relais était décédé accidentellement après qu’une armoire eut chuté sur lui. L’élu s’était retrouvé sur la liste des prévenus pour homicide involontaire avant de bénéficier, après trois ans d’instruction, d’un non-lieu prononcé par la chambre du conseil de la Cour d’appel.
Le syndicat des villes et communes (Syvicol) reconnaît que les condamnations sont rares, mais n’en demeure pas moins que l’élu local voit toujours sa responsabilité pénale engagée dans l’exercice de son mandat. «Les retombées personnelles et politiques d’une instruction sont perçues comme une menace», écrit le syndicat.
La responsabilité pénale est une composante essentielle d’un statut de l’élu qui doit être réformé, selon le Syvicol qui a fait un gros travail au niveau juridique pour présenter une proposition dans ce sens. Le tout devrait être intégré dans le cadre de la refonte de la loi communale, suggère encore le syndicat des élus locaux.
Le droit pénal luxembourgeois ne connaît pas la responsabilité pénale des personnes morales de droit public alors que les risques encourus par les élus sont toujours plus nombreux. Le Syvicol cite quelques exemples en matière d’aménagement du territoire et de développement urbain, de gestion des déchets, de protection de la nature et des ressources naturelles ou encore d’accessibilité à tous.
«Cette pénalisation excessive de la vie publique porte préjudice à son attractivité et a comme conséquence que de moins en moins de personnes décident de s’engager politiquement au niveau communal», regrette le syndicat en préambule de sa proposition de réforme.
Préférence pour le régime belge
Le Syvicol relève que pour toute autorisation de construire accordée, toute personne qui s’estime lésée y compris le bénéficiaire de l’autorisation si celle-ci a été annulée, peut poursuivre le bourgmestre sur un délai de cinq ans à partir de la date de délivrance de l’autorisation. De plus, les juridictions répressives sont compétentes pour connaître des infractions aux règlements sur les bâtisses, indépendamment de toute affaire administrative.
Qu’il accorde ou refuse une autorisation, le bourgmestre s’expose à la moindre erreur à une double sanction pénale et administrative.
Pourtant, avant de se prononcer, un bourgmestre s’appuie toujours sur le travail du service technique et sur l’avis de la commission des bâtisses. Mais le système luxembourgeois retient l’idée que le bourgmestre est d’office pénalement responsable au lieu de prévoir des cas et motifs précis dans lesquels il pourrait être poursuivi.
Le Syvicol envisage dès lors deux options : des modifications ponctuelles dans les lois spéciales qui préciseraient la qualité des auteurs des infractions. Actuellement, la plupart des infractions visent «toute personne», sans distinction. Le syndicat cite encore l’exemple de la Wallonie qui dans son code de développement territorial désigne individuellement les contrevenants : le maître d’ouvrage, le propriétaire du bien, les personnes qui, en raison de leur profession ou de leur activité, achètent, procèdent à l’urbanisation, offrent en vente ou en location, vendent ou donnent en location des immeubles, construisent ou placent des installations fixes ou mobiles ou qui interviennent dans ces opérations.
«Toutefois, une telle énumération semble difficile à envisager en pratique, dans la mesure où elle risquerait d’aboutir à une rupture de l’égalité entre les élus communaux et les personnes ne revêtant pas cette qualité», estime le syndicat. Surtout, il y aurait un paquet de textes à modifier ponctuellement pour mieux protéger l’élu.
Le Syvicol avoue sa préférence pour la création d’un régime garantissant une protection générale des élus agissant dans le cadre de leurs fonctions. En d’autres termes, il soutient l’idée d’une responsabilité pénale de la commune. Elle couvrirait «les actes des élus commis dans l’exercice de leurs fonctions « en bon père de famille » et n’ayant pas le caractère d’une faute personnelle», précise le Syvicol dans sa proposition.
En France, l’existence d’une faute caractérisée s’évalue à travers le degré de connaissance du risque par l’élu que le juge pénal doit apprécier. Le législateur belge a modifié le code pénal en 2018 rendant les communes responsables pénalement. Quel que soit l’exemple retenu, il faudra absolument éviter «de créer une sorte d’immunité», insiste le Syvicol qui invite cependant à suivre le régime belge.
Geneviève Montaigu