L’élimination de son RFCU à Breidablik, mais aussi du Fola et du Swift doivent inciter le foot luxembourgeois à se remettre en question, selon Jeff Saibene.
Une claque. C’est, à l’entendre, ce qu’a pris Jeff Saibene en Islande, d’où il est revenu vendredi matin bredouille et «fatigué», après un voyage nocturne qui a succédé à l’élimination de son RFCU sur le terrain de Breidablik (2-0, défaite 2-3 à l’aller) au premier tour préliminaire de Ligue Europa Conférence. Mais cette claque, le nouvel entraîneur du Racing ne l’a pas tant prise sur le terrain, où les actuels deuxièmes du championnat islandais se sont dans l’ensemble montrés «plus forts, plus solidaires, plus volontaires» qu’en dehors.
«Là-bas, c’est incroyable, tous ces jeunes qui jouent au foot, s’émerveille le technicien luxembourgeois. On en voyait partout, y compris des filles, je n’ai jamais vu ça ! On a vu tellement de gamins et de gamines, tellement de terrains, de gymnases, qui pour certains font la taille d’un terrain de foot… C’est vraiment un pays qui vit pour le sport, avec énormément de gens qui courent dans la nature. Ce voyage nous a choqués positivement, j’ai trouvé ça fantastique de voir un pays si sportif, avec une mentalité tout à fait contraire au Luxembourg. Chez nous, les jeunes paient pour jouer au foot : là-bas, l’État leur donne 400 euros par an pour en faire.»
«Déçu par le résultat», Saibene n’en est pas moins «content», donc, «d’avoir vu cette mentalité, de voir ce qu’on peut réussir dans un petit pays, d’une taille et d’une population (NDLR : l’Islande compte 357 000 habitants) comparable au nôtre, avec une mentalité sportive. Quel bel exemple ! Quelle différence avec le Luxembourg. Ces trois jours là-bas m’ont fait du bien. Ce pays m’a impressionné par sa volonté, sa mentalité, son envie de faire du sport, de faire du foot». Une volonté qui s’est traduite sur le terrain, où les joueurs de Breidablik, «à 90 % des Islandais», ont selon lui fait preuve d’une supériorité mentale et technique.
Mais aussi dans l’entretien de celui-ci : «Les terrains de football sont bien soignés. Je me suis demandé comment ils font pour être en si bon état, il pleut tellement là-bas ! Alors oui, il y a beaucoup de vent, donc ça sèche vite, mais ça veut aussi dire que la commune s’occupe des terrains. Quand je vois nous, les problèmes qu’on a sur l’état des terrains, les discussions pour qu’on les coupe ou qu’on les trace… Si on ne veut pas, c’est difficile de réussir.»
«Il ne faut pas se mentir»
Un message qui renvoie aux limites du football luxembourgeois, dont les trois représentants engagés en Coupes d’Europe ces deux dernières semaines ont pris la porte, celle de la C1 pour le Fola, rossé par les Lincoln Red Imps, modestes champions de Gibraltar (2-2, 5-0) et reversé en Conference League, et celle de la C4 pour le Swift et le RFCU, dominés par les Slovènes de Domzale (1-0, 1-1) et Breidablik, donc.
Et si son équipe «a fait de bonnes choses» et «n’a pas eu de chance», Mabella touchant le poteau à 0-0 jeudi, le constat dressé par Saibene est sans appel : «Il ne faut pas se mentir, c’est une catastrophe. C’est triste et décevant de se dire qu’il n’y a pas un club qui passe contre des équipes à notre portée». Ce premier bilan de campagne européenne, en attendant l’entrée en lice du F91 en C4, doit selon l’ancien coach de Kaiserslautern inciter «les clubs et la fédération» à «se poser des questions et trouver des solutions. Les gens qui ne voient que le foot luxembourgeois le dimanche trouvent ça peut-être intéressant, moi aussi, mais il faut se confronter avec ce qui se fait ailleurs».
Passé un petit break de quatre jours, mérité après déjà quatre semaines de préparation, l’ancien milieu international (64 sélections avec les Roud Léiwen entre 1986 et 2001) entend d’ailleurs s’appuyer sur son échec européen et ce choc des cultures pour préparer la saison de BGL Ligue et la réception, le 8 août, du Swift lors de la 1re journée. «Mon but désormais est de trouver un collectif qui fonctionne, joue bien ensemble, travaille en bloc, en équipe, sans individualités mais avec une grande solidarité. Une équipe de caractère qui travaille ensemble.» Une équipe à la sauce islandaise, en somme…
Simon Butel