Le tribunal de Diekirch a reconnu l’auteur de l’accident à Wiltz coupable de meurtre et de tentative de meurtre. L’homme avait foncé en voiture sur un groupe de piétons parmi lesquels se trouvait son fils, qui n’a pas survécu.
L’affaire avait horrifié tout le pays. Une marche blanche avait été organisée. Le 2 janvier 2019, une voiture folle fonçait sur un groupe de piétons rue Grande-Duchesse-Charlotte à Wiltz, percutant au passage trois adultes et deux enfants en bas âge. La thèse terroriste écartée et l’enquête bouclée, on avait appris l’effroyable vérité derrière cet accident : l’ex-compagne et le fils de 2 ans du chauffard faisaient partie du groupe. L’enfant décédera dans les heures qui ont suivi.
L’histoire glace le sang. Elle est à l’image de l’attitude du père meurtrier à la barre. Durant les trois jours d’un procès extrêmement éprouvant pour tous les protagonistes, il était resté froid et n’avait montré aucune émotion. Monsieur Tout-le-monde de 47 ans, il se fendra toutefois d’un pouce en l’air en direction de son ex-compagne après avoir entendu le réquisitoire du procureur qui demandait une condamnation à perpétuité contre lui.
Les juges du tribunal d’arrondissement de Diekirch ont suivi ce réquisitoire. Le chauffard a été reconnu coupable de meurtre et de tentative de meurtre et condamné à une peine de prison à perpétuité. Il devra également payer 45 000 euros de dommage moral à son ancienne compagne ainsi que les frais d’expertise et des indemnités de procédure. Il est également condamné à indemniser l’amie de son ancienne compagne et son compagnon, qui souffrent des séquelles physiques consécutives au choc. Seule une petite fille était sortie indemne de l’accident.
Geste fou ou erreur de conduite ?
Geste fou ou erreur de conduite ? C’était au tribunal de trancher. Le Luxembourgeois aurait très mal supporté la séparation d’avec la maman de son fils. Il espérait pouvoir revivre avec eux. Le jour de l’accident, alors que les blessés étaient emmenés dans l’ambulance, il lui aurait dit «espérer qu’ils allaient tous crever». Lui dit ne se souvenir de rien. Diabétique, il suppose avoir fait une crise d’hypoglycémie – thèse réfutée par les experts médicaux auprès du tribunal. Il avait croisé le groupe et avait fait demi-tour pour les saluer. Puis, plus rien, le trou noir.
Experts et enquêteurs ont tenté de reconstituer les faits. La voiture se déplaçait à une vitesse allant de 40 à 60 kilomètres à l’heure quand elle a percuté le groupe à quelques mètres de l’emplacement choisi pour effectuer le demi-tour. Selon des témoins, l’homme n’avait pas tenté de freiner ni d’éviter le groupe. Il n’était pas sous l’empire d’une drogue ou de l’alcool et son discernement n’avait pas été aboli, ont indiqué les experts. Pour les avocats des parties civiles, le père de famille était pleinement conscient de son geste et, «conduit par la haine», avait voulu faire le plus de mal possible. Ruiner la vie de son ex-compagne qui le rejetait. Sur un réseau social, il avait écrit à la mère : «Je t’aurai.»
L’avocat du prévenu, Me Stroesser, avait peiné à convaincre face à l’attitude peu amène de son client. Il avait demandé aux juges de retenir uniquement les infractions de coups et blessures sans intention de donner la mort. «Face à un tel drame, il faut un responsable», avait-il estimé. Pour lui, le prévenu n’avait «pas les épaules pour être coupable d’un quintuple assassinat. Le costume est trop grand pour lui.»
Le parquet et les juges n’ont pas été de cet avis. Pour le ministère public, le père meurtrier a agi en pleine conscience, poussé par la frustration, la jalousie et la haine contre le nouveau compagnon de la mère de son enfant.
Sophie Kieffer