Ils se sont enfin rencontrés. Le président américain Joe Biden et le président russe Vladimir Poutine ont décidé de discuter des sujets qui fâchent en tête-à-tête à Genève hier. Loin des caméras. Après cette rencontre, les deux chefs d’État ont donné une conférence de presse. Chacun de leur côté. Oui, nous ne sommes pas encore au niveau de la franche camaraderie entre les deux hommes. Il faut dire que le fossé s’est considérablement creusé entre les deux pays au fil des ans, pour ne pas dire des décennies. Depuis que Vladimir Poutine est entré au Kremlin en 2000, les images d’un Eltsine et d’un Clinton rigolards ont vite été remisées aux archives. Car l’ours russe s’est réveillé après avoir été un temps désorienté par la chute de l’Union soviétique. Et il était d’humeur plutôt massacrante. Dès l’arrivée de Vladimir Poutine au pouvoir, les Américains, et les pays occidentaux en général, ont bien senti qu’un vent nouveau soufflait depuis l’Est… et c’était plutôt un vent mauvais.
Vladimir Poutine a remis la Russie au cœur des enjeux géostratégiques mondiaux jouant sa partition, avec ses moyens. L’ambiance a parfois viré à la guerre froide ces dernières années entre les deux pays avec arrestations d’espions, expulsions de diplomates, accueil d’opposants, face-à-face militaires tendus. Un «bon vieux temps» que personne ne souhaitait revivre. Et pourtant. C’est avec une poigne de fer que Vladimir Poutine gère son pays et son peuple le lui rend bien car le président russe jouit d’une belle notoriété chez lui. Les Russes avaient besoin de stabilité après des années 90 considérées comme une décennie noire, mais ils désiraient aussi retrouver une certaine dignité face à un bloc de l’Ouest qui les a parfois méprisés lorsqu’ils avaient un genou à terre. Grossière erreur.
La rencontre d’hier a permis aux présidents américain et russe de poser sur la table leurs différends et d’éviter toute escalade. Un rapprochement, vraiment? Certains observateurs expliquaient hier que Biden ne voulait pas d’une nouvelle guerre froide avec les Russes. Pourquoi? Parce qu’une autre guerre froide va bientôt avoir lieu avec un autre colosse qui avance ses pions calmement et patiemment : la Chine.
Laurent Duraisin