Dans un climat de tension avec la Ville de Luxembourg, l’association ProVelo organise samedi une manifestation pour réclamer un réseau cyclable digne de ce nom.
Les relations compliquées ces dernières années entre la communauté des cyclistes et la Ville de Luxembourg ne risquent pas de s’apaiser avec les remous autour de la manifestation de ProVelo prévue samedi à l’occasion de la journée mondiale de la Bicyclette.
D’abord annulée purement et simplement par l’équipe municipale qui craignait de gêner le Stroossemaart organisé le même jour, la manifestation a finalement été autorisée lundi, lors d’une entrevue de la dernière chance, à condition, selon le collège échevinal, que les cyclistes évitent l’avenue de la Liberté et l’avenue Marie-Thérèse.
Or le tracé prévu par ProVelo, diffusé cette semaine, emprunte bien ces voies, de quoi provoquer la colère de la Ville : dans une prise de position publiée mercredi, les autorités locales soulignent que cet itinéraire «constitue une violation de l’autorisation et engage la responsabilité personnelle de chaque participant du cortège». Ambiance.
L’association y voit surtout une tentative de déstabilisation car, si elle tient tant à parcourir l’avenue Marie-Thérèse, c’est précisément pour dénoncer ce point noir du réseau cyclable de la capitale : «À cet endroit, la bande réservée aux cyclistes est matérialisée par un simple trait blanc sur la chaussée, et finit carrément sur un trottoir», s’agace Monique Goldschmit, la présidente de l’ASBL ProVelo. «Nous demandons depuis longtemps la création d’une vraie piste cyclable sécurisée et bidirectionnelle dans cette rue.»
Le long du boulevard Prince-Henri adjacent, ProVelo plaide pour l’aménagement d’une piste qui irait du pont Adolphe jusqu’à l’avenue de la Porte-neuve, ce qui nécessiterait la suppression d’une bande de stationnement : refus catégorique de la Ville. «Ils nous ont dit que ce n’était pas possible. Nous leur avons signifié que nous n’acceptions pas cette décision, ils ont alors répondu qu’il réexaminerait le problème», précise Monique Goldschmit.
Une politique «vieille de 50 ans»
Loin de les faire renoncer, ce contexte délétère renforce la détermination des cyclistes à obtenir gain de cause : «On a besoin de plus de sécurité et davantage de place pour le vélo en ville», insiste Monique Goldschmit, qui ne se déplace qu’à vélo. «Une nouvelle planification de l’espace public est nécessaire, tout comme des itinéraires cyclables connectés les uns aux autres et fiables.»
Des revendications qui tardent à se concrétiser – certaines datent de plus d’une décennie, alors que la pratique du vélo, devenue «tendance», séduit de plus en plus d’usagers : «Il semble que notre bourgmestre ne voit pas les signes du temps», commente la présidente, qui déplore par ailleurs le manque d’interlocuteur «sérieux» à la Ville. «Au temps de Paul Helminger, avec François Bausch au poste de premier échevin, on avait des gens à qui s’adresser. C’est à eux qu’on doit le nouveau plan cyclable. Mais c’était en 2007 ! Depuis, peu de choses ont bougé.»
Un immobilisme que la présidente de ProVelo attribue avant tout à un manque de courage politique : «Si la Ville de Luxembourg avait la volonté d’agir pour les cyclistes, elle l’aurait déjà fait.» Selon Monique Goldschmit, dans les discussions, la priorité va systématiquement au trafic motorisé, un héritage des années 1970 : «Notre ville a besoin de changer cette politique vieille de 50 ans, à l’époque où on a fait le choix d’investir dans le trafic motorisé. Aujourd’hui, on doit réfléchir autrement.»
Samedi, ProVelo compte sur environ 200 participants, attendus à vélo, à 15h, sur le plateau du Saint-Esprit.
Christelle Brucker