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Décès du président du Tchad, allié de l’Occident face aux jihadistes


Le président Déby venait d'être réélu pour un sixième mandat. (photo AFP)

Le Tchad, immense pays pauvre enclavé du Sahel et allié stratégique des Occidentaux dans la lutte antijihadiste, a perdu son président Idriss Déby Itno décédé mardi des suites de blessures reçues au front après 30 ans de pouvoir.

Histoire mouvementée

Le pays a connu une forte instabilité après l’indépendance en 1960, avec une rébellion dans le nord dès 1965.
En 1980, une guerre civile éclate entre partisans de Goukouni Weddeye, président du Gouvernement d’union nationale de transition (appuyé par la Libye) et ceux de son ministre de la Défense Hissène Habré, qui prend le pouvoir en 1982.

En 1990, Hissène Habré est chassé du pouvoir par Idriss Déby. Selon une commission d’enquête tchadienne, la répression sous son régime a fait 40 000 morts. Hissène Habré sera condamné à la prison à vie pour crimes contre l’humanité par un tribunal spécial africain à Dakar en 2017.

En février 2008, une attaque rebelle qui atteint les portes du palais présidentiel est repoussée grâce au soutien français. En 2019, la France aide le président Déby en bombardant une colonne de rebelles tchadiens entrés par la Libye dans le nord-est.

Élu d’abord en 1996, le président Déby, décédé mardi des suites de blessures reçues alors qu’il commandait son armée dans des combats contre des rebelles dans le nord, venait d’être réélu pour un sixième mandat avec 79,32% des suffrages, selon des résultats provisoires énoncés lundi soir par l’instance électorale nationale.

Le pouvoir est accusé de réprimer toute opposition.

Menaces multiples

Le Tchad est confronté à des défis militaires à toutes ses frontières. Dans la région du lac Tchad, l’armée lutte depuis 2015 contre la fraction du groupe nigérian Boko Haram affiliée à Daech. Elle fait partie d’une force multinationale mixte appuyée par les Occidentaux, regroupant le Nigeria, le Niger et le Cameroun.

N’Djamena abrite le siège de l’opération antijihadiste française Barkhane lancée en 2014. La France est présente de manière quasi permanente dans son ancienne colonie depuis l’indépendance. Le Tchad participe aussi à la force antijihadiste de l’organisation régionale G5 Sahel (comprenant également la Mauritanie, le Mali, le Burkina Faso et le Niger).

Un grave conflit intercommunautaire entre éleveurs et agriculteurs sévit également dans les provinces du Ouaddaï et du Sila. Dans le massif du Tibesti et à la frontière avec la Libye, l’armée affronte des rebelles et des orpailleurs.

Pays pétrolier, mais pauvre

En 2020, le PIB réel s’est contracté de 0,6%, après une croissance de 3% en 2019 selon la Banque africaine de développement, pâtissant d’une suspension de la production pétrolière et de la fermeture des frontières face au coronavirus.

Le pétrole, dont le Tchad est producteur depuis 2003, génère près de 40% du PIB et plus de 60% des revenus de l’État.  Entre 2014 et 2016, la baisse des cours de l’or noir a provoqué une crise de la dette. La part détenue par le groupe suisse Glencore a été restructurée en 2018.

Le Tchad est classé 187e pays sur 189 pour l’Indice de développement humain du Pnud. En 2018, 42% de la population vivait sous le seuil de pauvreté (Banque mondiale). Le pays affiche aussi un des taux les plus élevés de mortalité maternelle en Afrique centrale, tandis qu’un enfant sur cinq y meurt avant sa cinquième année, selon la Banque mondiale.

Enclavé au cœur du continent

Niché au cœur du Sahel, ce pays d’une superficie d’environ 1,3 million de km² est frontalier du Cameroun, du Nigeria, du Niger, de la Libye, du Soudan et de la Centrafrique. Sa population s’élève à près de 16 millions d’habitants (Banque mondiale 2019), dont 53% sont musulmans, 35% chrétiens, le reste animistes.

Le pays accueille plus de 450 000 réfugiés.

Doyen de l’humanité

Plusieurs restes d’australopithèques ont été découverts au Tchad, notamment en 2001 « Toumaï », vieux de 7 millions d’années, considéré par certains scientifiques comme le premier représentant de la lignée humaine.

LQ/AFP

Élections après une transition militaire

Des élections « libres et démocratiques » seront organisées au Tchad à l’issue d’une « période de transition » de 18 mois dirigée par un conseil militaire présidé par le fils du chef de l’État Idriss Déby Itno, a promis mardi l’armée.

« Le Conseil militaire de Transition (CMT », présidé par le général de corps d’armée Mahamat Idriss Déby, 37 ans, fils du défunt président, « garantit l’indépendance nationale, l’intégrité territoriale, l’unité nationale, le respect des traités et accords internationaux et assure la transition pour une durée de 18 mois », a annoncé à la télévision d’État le porte-parole de l’armée, le général Azem Bermandoa Agouna, dans une déclaration signée par le nouvel homme fort du régime.

« De nouvelles institutions Républicaines seront mises en place à l’issue de la transition par l’organisation des élections libres, démocratiques et transparentes », a-t-il assuré.