La haute saison commence pour le Centre de soins pour la faune sauvage de Dudelange, et le besoin en vétérinaires se fait de plus en plus pressant.
Que de chemin parcouru depuis le recueil des premiers animaux, il y a déjà trente ans! De 83 bêtes secourues en 1988 au sein de ce qui deviendra le Centre de soins pour la faune sauvage et qui n’était alors que le domicile de Jean-François et de son épouse Janny, le centre de Dudelange est passé à 3 730 pensionnaires en 2020!
Pour la grande majorité d’entre eux, «les trois quarts environ», il s’agit d’oiseaux. S’ensuivent des mammifères, comme les renards ou les écureuils, et enfin, dans 1 % des cas, des animaux exotiques et des espèces invasives.
Les raisons de leur venue au centre sont multiples : hypo ou hyperthermie, dénutrition, fractures, problèmes de parasites, zoonose… C’est d’ailleurs cette multitude de cas qui devrait ravir les potentiels vétérinaires désireux de travailler dans un environnement qui sort de l’ordinaire des cabinets classiques.
Le centre compte en effet actuellement trois vétérinaires, un à temps plein et deux à mi-temps, ainsi qu’une équipe de six soignants. Un nombre bien insuffisant pour assurer un suivi des animaux sept jours sur sept alors que la haute saison débute pour le centre, qui reçoit durant les mois d’avril à octobre 80 % de ses pensionnaires.
D’autant que le retour à la nature des citoyens, qui pour la plupart ont dû faire une croix sur des vacances à l’étranger en raison de la crise sanitaire, va sans doute garantir encore une meilleure vigilance de la faune environnante : le centre a reçu en janvier 2021 trois fois plus d’animaux qu’un mois de janvier habituel!
Un travail d’équipe
Le Centre de soins de la faune sauvage de Dudelange est donc à la recherche de deux CDD de vétérinaires. Un employé rare aujourd’hui au Luxembourg, déplore Roby Biewer, président du centre, qui pointe la difficulté de recrutement à l’heure actuelle : «Je suppose que cela est en partie dû au fait qu’il y a quelques années, on avait dit aux étudiants que la filière vétérinaire était complète. Or entretemps, le bien-être animal s’est fortement développé et la demande en vétérinaires a explosé.»
Une pénurie pour le centre qu’est venue aggraver la pandémie, de nombreux bénévoles s’étant retirés, certaines activités ne permettant pas réellement le respect de la distanciation sociale. «Nous avons dû recruter des professionnels, ce qui a quelque peu grevé notre budget», reconnaît le président dont le centre est financé pour moitié environ par l’État (ministère de l’Environnement, du Travail et de l’Agriculture), mais dont tout le reste dépend des dons.
«Travailler ici représente un vrai défi pour les vétérinaires», poursuit Roby Biewer. «En général, il existe deux filières dans les cabinets vétérinaires : les animaux essentiellement domestiques, comme les chiens et les chats, et les animaux agricoles, c’est-à-dire de grands animaux comme les vaches, les chevaux, les moutons… Ici, nous avons 189 espèces différentes, de tous les âges, et c’est un travail d’équipe. Chaque jour est un nouveau challenge.»
Des assistants vétérinaires en attendant
Chirurgie, prélèvement sanguin, médications, sutures, gestion des urgences… Les tâches à effectuer sont variées. L’euthanasie y est aussi pratiquée parfois. Car il y a des animaux qui ne peuvent plus être sauvés, reconnaît Roby Biewer, citant ce renard recueilli il y a quelques semaines dont la colonne vertébrale était brisée. «Notre but est de remettre en bonne santé les animaux de sorte qu’ils puissent survivre dans leur milieu naturel. C’est une question d’éthique, nous refusons qu’ils soient forcés de rester diminués dans une cage.»
Pas de panique toutefois pour ce qui concerne le bien-être des animaux : si le centre préférerait bien évidemment s’octroyer les services d’un vétérinaire, il dispose cependant «d’un petit filet de sécurité» au cas où le recrutement viendrait à tarder.
Les soigneurs peuvent en effet suivre une formation d’assistant vétérinaire. «Ils ne peuvent pas faire de rayon X ni de chirurgie, mais procéder aux autres soins et administrer des antidouleurs ou antibiotiques par exemple. Donc si un animal devait se faire opérer, nos vétérinaires en poste pourraient s’en charger. Mais cela nous rassurerait de trouver un vétérinaire.»
Tatiana Salvan
Retour impossible
Pour certains animaux, le retour à la nature s’avère impossible. Malgré une bonne santé recouvrée, leur habituation à l’homme empêche leur retour à l’état sauvage, comme l’explique Roby Biewer, président du Centre de soins pour la faune sauvage de Dudelange.
«Pour certains, nous travaillons à un retour progressif. Ainsi, nous pouvons mettre un renard dans un enclos en forêt et le nourrir discrètement, jusqu’à ce qu’il se soit familiarisé à son nouvel environnement. Mais d’autres fois, c’est tout bonnement impossible : les animaux ont développé un comportement anormal et pourraient s’approcher des enfants pour mendier à manger. C’est le cas pour environ 5 % de nos animaux.»
Dans ces cas-là, ou lorsqu’il se voit confier des espèces exotiques confisquées par les tribunaux, le centre, qui dispose d’un grand réseau de personnes et de structures capables de s’occuper de ces animaux, dans le respect de la convention de Washington, veille à ce qu’ils soient bien pris en charge.