Hamm ne peut plus payer ses joueurs. Maxime Deruffe, qui devrait vivre du foot cette saison mais doit se contenter de survivre, nous raconte.
Le RM Hamm Benfica fait partie de ces clubs qui souffrent énormément de la crise, au point que visiblement les joueurs ne peuvent plus être payés. Malgré tout, à l’heure actuelle, les hommes de Pedro Resende sont lentement en train de sortir la tête de l’eau et pourraient même, en cas de succès sur un Pétange qui va très mal, sortir de la zone des «relégables» (qui ne le sont plus vraiment, puisque personne ne descendra en fin de saison) après avoir passé quasiment toute la phase aller dans la peau de la lanterne rouge.
Un miracle alors que, forcément, le staff s’inquiète de savoir si cela peut continuer longtemps comme ça ? Non, nous dit Maxime Deruffe, meilleur buteur du club avec cinq réalisations : les efforts de garçons qui ne veulent rien lâcher, même dans des conditions de dénuement total. Une interview tout en pudeur.
Les joueurs hammois ne sont plus payés. Quelle est l’ampleur de cette inconfortable situation ?
Maxime Deruffe : Elle n’est pas simple. Cela fait quelque temps qu’il nous faut serrer les dents. Disons que cela fait quelques mois que plus rien ne tombe au niveau salaire et qu’on a dû apprendre à gérer nos dépenses. Oui, il y a eu des baisses de moral, surtout les personnes qui vivent de ça, mais le retour des bons résultats permet de s’accrocher. Le club a de la chance d’avoir un tel groupe. Ce ne serait pas la même façon de gérer en France, par exemple. Là-bas, le problème serait vite réglé. Ici, tout le monde garde son calme, des dirigeants au staff, mais surtout les joueurs qui ont été très courageux.
Le football est, à titre personnel, votre seule source de revenus en ce moment. Comment le vivez-vous ?
Oui, je n’étais censé vivre que du football cette année. Alors je m’accroche. Heureusement, je suis quelqu’un de prévoyant et j’avais fait des réserves. Alors je ne le vis pas trop mal parce que je m’étais mis des sécurités (sic). Alors disons que je regarde ça comme un moment faisant partie des épreuves de la vie. Le club fait son maximum pour trouver des solutions et je ne doute pas de sa détermination. Je vois qu’ils le font à 100 %, avec le cœur et je sais que s’ils peuvent rétablir la balance, ils le feront. Les choses sont dites. On n’est pas dans le flou. Cela peut arriver à n’importe quel club.
Je n’ai pas besoin qu’on me dise que pour un gamin de 20 ans qui est censé vivre de ça, la situation doit être très, très dure (…) S’ils n’ont pas leurs parents derrière…
Cette décision de continuer à vous entraîner et à jouer s’est-elle prise de manière concertée ou allait-elle de soi ?
Je ne vous cache pas qu’on s’est concertés. Et on s’est dit que personne ne devait lâcher. Alors oui, pour certains jeunes, c’est beaucoup plus dur. Je ne rentre pas dans le détail de leur vie privée, je respecte, mais je n’ai pas besoin qu’on me dise que pour un gamin de 20 ans qui est censé vivre de ça, la situation doit être très, très dure. Les gens du club, ou ceux qui ont un travail au Luxembourg, franchement, pour eux, ça va, mais ces jeunes, s’ils n’ont pas leurs parents derrière… Alors on s’entraide. Et là, je tiens à remercier certains garçons qui ont compris que d’autres, effectivement, n’ont plus de ressources et ont décidé de se sacrifier pour eux. Ça, c’est un véritable acte de solidarité que je n’oublierai pas. Certains mettent en suspens leurs versements pour que d’autres puissent recevoir. Voilà aussi pourquoi on continue à aller jouer.
Je tiens à remercier certains garçons qui ont compris que d’autres, effectivement, n’ont plus de ressources et ont décidé de se sacrifier pour eux. Ça, c’est un véritable acte de solidarité que je n’oublierai pas
Cette capacité à s’oublier individuellement pour exister collectivement, c’est aussi l’une des clefs qui vous permet de revenir fort à l’heure actuelle ?
Oh non, je crois que si on a de bons résultats en ce moment, on le doit surtout à notre qualité. Il nous manque du vice, de l’intelligence, on est trop naïfs, mais de la même manière que le financier n’impacte pas trop notre manière de jouer, notre manière de jouer, justement, ne tient pas à notre motivation.
Comment voyez-vous le futur ?
La saison prochaine ? Je ne suis pas médium, je ne sais pas si la situation peut s’améliorer. Le club continuera à avoir des difficultés, mais comme d’autres. Alors après, chez les joueurs, qui fera quoi ? Ça… Moi, je n’ai la tête qu’à la fin de saison. J’avais dit un petit mot aux joueurs : peu importe ce qui se passe, il faut aussi jouer pour soi mais dans le sens du collectif. On a tous pris un engagement, on le tient. On gère, on s’accroche, on reste positifs. Il nous suffit d’une petite série pour sortir de la zone rouge et avec tous les sacrifices qu’on fait, on le mériterait. Oui, on le mérite et c’est ce qui va nous arriver.
Et vos familles ? Restent-elles positives ?
La famille… Disons qu’une telle situation impacte le foyer, oui. Mais ce sont des gens qui nous aiment et comprennent. Ce genre de choses peut arriver à tout le monde dans une vie.
Entretien avec Julien Mollereau