Changement climatique et insectes ravagent progressivement les forêts du pays. Pour contrer ce phénomène, des projets sont lancés, comme à Differdange.
C’est dans le cadre de la journée internationale des Forêts, qui se tiendra dimanche sur le thème de la résilience des forêts face au changement climatique, que la ministre de l’Environnement, Carole Dieschbourg, s’est rendue mercredi à Differdange au Thillenberg.
Les forêts dépérissent à vue d’œil depuis quelques années et la forêt communale de la Cité du fer n’est pas épargnée par la sécheresse et les attaques du bostryche (une espèce de scolyte), cet insecte nuisible car friand de l’écorce, plus particulièrement du liber (entre l’écorce et le bois), des épicéas. Une parcelle de cette forêt, située à deux pas de la frontière française (du côté d’Hussigny-Godbrange), dont les épicéas ont été ravagés par les derniers étés, fait d’ailleurs désormais l’objet de soins particuliers. En effet, les arbres pourris par les attaques de scolytes et par la chaleur ont été abattus et il a été décidé d’y planter de nouvelles essences, adaptées au type de sol et à l’exposition au soleil.
«La diversité des essences doit être garantie, car il a été observé qu’une forêt mixte résiste mieux aux sécheresses et aux fortes chaleurs estivales», a souligné la ministre de l’Environnement, Carole Dieschbourg. Par ailleurs, des enclos ont été érigés afin de préserver les jeunes arbres contre les abroutissements par la faune sauvage, tandis que les différents feuillus ont été préservés dans le cadre de la régénération de cette parcelle, de même que des bois morts, car garants d’une plus grande biodiversité en forêt.
Des aides financières
«Les forêts étant nos meilleures alliées contre le changement climatique et les émissions de CO2», la ministre souligne que le ministère a réagi très rapidement : «Afin de soutenir les propriétaires forestiers et les communes dans ce contexte difficile d’adaptation aux aléas du changement climatique, le ministère, en collaboration avec l‘administration de la Nature et des Forêts (ANF), prévoit une série de différentes aides financières. Ces aides ont pour fonction de dédommager les forestiers pour les pertes de revenus des superficies attaquées par le bostryche, mais surtout et également ces moyens financiers ont pour objectif de maintenir et de créer des forêts qui seront plus résilientes au changement climatique.»
De son côté, la bourgmestre de Differdange, Christiane Brassel-Rausch, a insisté sur «l’importance de ce genre d’espace», en évoquant ce plateau de la forêt communale située au Thillenberg. «Il y existe des structures pour enfants, un parcours de fitness et ces bois, remplis d’épicéas, se trouvent au pas de la troisième ville du pays. D’ailleurs, combien de coups de fil d’habitués avons-nous reçus à la commune, lesquels se sont inquiétés de voir ces arbres abattus. Ils se demandaient si le garde forestier n’était pas devenu fou ! Mais, plus sérieusement, c’est dramatique ce qui se passe et je souhaite beaucoup de succès au projet qui est prévu sur cette parcelle.»
Claude Damiani
Au cours de sa visite, la ministre de l’Environnement a notamment mis en avant le fait que «les bois ont aussi une fonction sociale» non négligeable : «Les gens ont besoin de leurs forêts, et pas uniquement pendant le confinement. Ils ont besoin de savourer des promenades en pleine nature et il faudra que nos enfants et petits-enfants puissent aussi en profiter à l’avenir. De plus, le volet économique, dans un contexte de changement climatique, constitue un défi. Et il faut tout aussi bien encourager l’éducation des enfants à l’école. Il faut un équilibre entre tous les acteurs concernés.»
Un mot d’ordre : diversification
D’après la ministre de l’Environnement, Carole Dieschbourg, il faut s’atteler à sauver les forêts en les diversifiant.
Une étude menée de 1989 à 2019 illustre le phénomène, qui s’est généralisé au niveau de l’ensemble du pays, lié à la prolifération des scolytes pendant les périodes de chaleur. «Une gestion durable des forêts selon les pratiques d’une sylviculture proche de la nature n’a jamais été aussi importante. Une grande diversité au niveau des essences forestières, tout en tenant compte des différents types de stations, se traduit généralement par une plus grande stabilité des écosystèmes forestiers», ont estimé les spécialistes présents, parmi lesquels le directeur de l’administration de la Nature et des Forêts, Frank Wolter, et le chef de son arrondissement Sud, Michel Leytem, le président de la Fondation Hëllef fir d’Natur de natur&ëmwelt, Patrick Losch, et des représentants de partenaires tels que le lycée technique agricole.
Tous les orateurs ont plaidé pour un sauvetage des forêts en les restructurant et en mélangeant les essences qui les composent, car les forêts mixtes sont moins sensibles aux perturbations telles que les événements météorologiques extrêmes et les insectes nuisibles.
Chênes et tilleuls plus résistants
Inversement, les forêts à faible diversité réagissent plus fortement à ces influences et sont plus sensibles aux perturbations. «La combinaison d’un niveau élevé de structures et d’essences diversifiées et de différentes pratiques sylvicoles est le garant d’une plus grande stabilité de nos écosystèmes forestiers», a indiqué Michel Leytem. Il exclut cependant toute idée de faire table rase en abattant tous les épicéas. Selon lui, il faut plutôt se «baser sur une diversification de nos forêts en se concentrant sur les chênes et les tilleuls, plus résistants à la sécheresse».
C.D.