Le sort de l’ex-président de la Catalogne, Carles Puigdemont, est désormais entre les mains de la justice belge, après la levée de son immunité mardi par le Parlement européen.
La vie de l’ex-dirigeant indépendantiste de cette région du nord-est de l’Espagne va devenir « compliquée », car privés de la protection de l’immunité dont jouissent les parlementaires européens, lui et ses amis politiques Toni Comin et Clara Ponsati « ne sont plus protégés », a expliqué mardi un responsable du Parlement européen.
Les trois eurodéputés sont poursuivis pour « sédition » et, dans le cas de Carles Puigdemont et Toni Comin, s’ajoute l’accusation de « détournements de fonds publics ».
Ils peuvent être arrêtés à tout moment sur exécution d’un mandat d’arrêt européen et extradés en Espagne si les autorités judiciaires des pays où ils vivent en exil donnent leur feu vert. Ils sont réclamés par Madrid pour la tentative de sécession de 2017.
Carles Puigdemont et Toni Comin vivent en Belgique. Le cas de Clara Ponsati relève en revanche des autorités judiciaires d’Écosse, où elle séjournait, et qui avaient suspendu l’examen de son extradition dans l’attente de la décision des eurodéputés.
Ils ont été élus au Parlement européen en 2019.
Cette condition essentielle à l’examen de leur extradition a été levée à la satisfaction du gouvernement espagnol dirigé par le socialiste Pedro Sanchez et des responsables de l’opposition de droite.
Ils ont obtenu des dirigeants des trois grands groupes où siègent leurs élus – ceux du Parti populaire européen, des socialistes et des libéraux de Renew – la consigne de voter pour la levée des immunités. Une majorité de 354 voix sur 705 était nécessaire. 400 ont voté en faveur d’une privation de la protection de Carles Puigdemont.
Le Parlement européen a été plus tranchant en votant également mardi la levée de l’immunité d’un élu portugais et d’un élu croate par 662 et 658 voix.
Rester en Belgique
Le vote du Parlement européen « envoie un triple message », a estimé dans une très brève déclaration la ministre espagnole des Affaires étrangères, Arancha González Laya.
Le premier est que « les problèmes de la Catalogne se résolvent en Espagne, ils ne se résolvent pas en Europe ». « C’est la ligne qu’a adoptée le gouvernement espagnol, celle de tendre la main aux forces politiques catalanes pour trouver une solution par le dialogue et la négociation », a-t-elle insisté.
Les deux autres messages portent sur le fait qu’un eurodéputé « ne peut se prévaloir de son statut pour éviter de comparaître devant une justice nationale » et sur « la solidité de l’État de droit en Espagne », a ajouté la ministre.
« Le vote d’aujourd’hui porte sur les valeurs que nous défendons, l’idée que nous nous faisons de la démocratie et l’avenir que nous voulons bâtir en Europe », avait averti lundi Carles Puigdemont dans un message sur son compte Twitter.
La levée de l’immunité parlementaire n’est pas la fin de l’histoire pour Carles Puigdemont, puisqu’il a annoncé son intention d’en appeler à la justice européenne. Et les tribunaux belges ont refusé en janvier d’exécuter un mandat d’arrêt européen visant un autre ancien ministre régional indépendantiste, Lluis Puig, mettant en avant un « risque sérieux de violation » de son « droit à un procès équitable » en Espagne.
Plusieurs anciens dirigeants catalans restés dans leur pays, comme Oriol Junqueras, l’ancien vice-président du gouvernement régional de Carles Puigdemont, purgent de lourdes peines de prison en Espagne pour l’organisation du référendum.
Mais la liberté de mouvement de Carles Puigdemont va être sérieusement réduite, en particulier ses déplacements à Perpignan, dans le sud de la France, où il retrouvait ses partisans. « Si j’étais lui, je ne quitterais pas la Belgique », a confié un responsable du Parlement.
AFP
Puigdemont dénonce « une persécution politique »
L’eurodéputé indépendantiste catalan Carles Puigdemont a dénoncé mardi « un cas clair de persécution politique », après la levée de son immunité par le Parlement européen, lors d’une conférence de presse à Bruxelles. « C’est un jour triste pour le Parlement européen. Nous avons perdu notre immunité mais le Parlement européen a perdu plus que cela et aussi la démocratie européenne », a ajouté l’ancien président catalan. La solution du conflit en Catalogne ne sera pas trouvé « en nous remettant aux mains de la justice espagnole », a-t-il poursuivi.