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Femmes : la lutte continue, en ligne et dans la rue


Environ 1 200 personnes ont participé à la marche féministe organisée lundi à Luxemburg-Ville. (Photo : Photo : Alain Rischard)

Si la pandémie n’a pas eu raison de la grève des femmes à Luxembourg-Ville, la JIF avait aussi organisé un événement en ligne à l’occasion de la journée des droits des femmes, lundi.

C’est à la pause déjeuner et sur internet que la plateforme JIF (Journée internationale des femmes) avait donné rendez-vous à toutes celles et tous ceux qui, la faute au Covid, ne pouvaient ou ne voulaient se rendre à la manifestation de 17h organisée dans les rues du centre-ville de la capitale.

Un événement qui a remporté un succès certain : outre une réunion zoom complète, près d’une centaine de personnes ont suivi la visioconférence diffusée également en direct sur la page Facebook de la JIF. Deux heures durant, les intervenantes ont permis aux spectateurs de découvrir ou redécouvrir, entre des intermèdes musicaux et poétiques d’artistes luxembourgeoises, l’histoire de la lutte pour les droits des femmes dans le pays, les combats remportés et ceux qu’il reste à mener.

Car si les femmes au Luxembourg peuvent paraître plutôt bien loties au premier abord, il n’en demeure pas moins que l’égalité entre les sexes n’est toujours pas acquise. Pis, dans certains cas, le Luxembourg fait même figure de mauvais élève en comparaison de ses voisins européens. Ainsi, le Grand-Duché possède le «pension gap» (l’écart des retraites entre hommes et femmes) le plus élevé de l’UE : 44 %! Autre particularité : les familles monoparentales (dont les femmes sont en charge dans 80 % des cas) sont aussi plus touchées par la pauvreté qu’ailleurs en Europe.

En cause : le taux d’imposition élevé (une femme seule avec enfants paie plus d’impôts qu’un couple avec enfants), et le logement bien sûr. Le droit au logement demeure en effet encore et toujours l’une des principales luttes, car, comme l’a rappelé au cours de son intervention Rosa Brignone, fondatrice de l’initiative Time for equality, «le droit au logement est un droit fondamental car lié à de nombreux droits comme celui de la santé, de la famille… Ce droit devrait donc être reconnu dans la constitution. De plus, la problématique du logement peut être un amplificateur des inégalités, dont celles du genre.» Le fait de ne pas pouvoir trouver un logement abordable empêche notamment les femmes de quitter un foyer toxique, violent. Une situation d’autant plus dramatique en cette période de crise sanitaire, où la population a été contrainte de rester chez elle.

Discriminations
au travail

Les victoires, comme la taxe sur les articles d’hygiène féminines rabaissée à 3 % en 2019 au lieu des 17 % usuels des produits de luxe, ne font pas oublier que la lutte pour l’égalité salariale continue elle aussi : les femmes gagnent toujours 7,2 % de moins que les hommes au Luxembourg, selon les derniers chiffres du Statec datant de cette année. Et si elles sont 44 % à posséder un diplôme de fin d’études secondaires (contre 35 % des hommes), elles ne sont que 6 % à se trouver à des postes de direction.

En outre, 36 % des femmes, contre 6 % des hommes, travaillent à temps partiel, ce qui a de fait une incidence sur le salaire, puis, inéluctablement, sur les pensions des femmes. Pour cette raison, les féministes militent pour une réduction du temps de travail pour tous, sans perte de salaire. Un moyen, assurent-elles, de mieux répartir les tâches entre les sexes. Les hommes sont d’ailleurs 39 % à déclarer s’occuper de la cuisine ou des tâches ménagères au moins une heure par jour… contre 78 % des femmes.

À cet égard, les féministes réclament aussi une réforme du congé «paternité» : ouvert à tous et à toutes, son extension à trois mois sans perte de salaire (au lieu des dix jours actuels), accorderait non seulement une égalité entre les couples hétérosexuels et homosexuels, mais empêcherait aussi des discriminations liées aux grossesses et à la parentalité dans le monde du travail, voire même modifierait «les stéréotypes de genre, terreau des discriminations et des faits de violence», a expliqué Emilie Kaiser,  du Planning familial.

Tatiana Salvan

Depuis plus d’un siècle

C’est aux États-Unis, le 20 janvier 1909, qu’est organisée la première Journée nationale de la femme, dans le but de soutenir la revendication au droit de vote des femmes. La première Journée internationale se déroulera en Europe le 19 mars 1911 (au Danemark, en Allemagne, en Autriche et en Suisse), avant d’être fixée au 8 mars à partir de 1921, en honneur aux femmes russes qui ont mené une insurrection le 8 mars 1917 à Saint-Pétersbourg, ouvrant la voir au renversement du régime tsariste. Les Nations unies officialiseront la Journée en 1977.