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L’herbe est plus verte

Ah, le Luxembourg, pays de Cocagne où les routes embouteillées sont pavées d’or, où un balayeur de rue gagne plus qu’un professeur d’université en Belgique mais ne parvient pas à se payer de logement, où l’herbe est plus verte. Je caricature à peine. Le Luxembourg fait envie, cela ne date pas d’hier. Les uns, pères-la-morale jaloux, lui tapent dessus à coups de paradis fiscal, les autres sont bien contents de pouvoir y travailler. Certains lui sont tellement reconnaissants d’améliorer leur niveau de vie qu’ils voudraient carrément être absorbés par ce pays voisin. Voisins ? Non, cousins éloignés, frères… séparés par une frontière par les aléas de l’Histoire et pourtant si proches. Un peu comme un membre fantôme que l’on sent toujours après une amputation. Qui, quand le temps change, se rappelle à nous.

Cette fois, c’est un groupe Facebook qui milite pour la réunification des deux Luxembourg. Le projet a l’air sérieux et s’inscrit dans la durée. Les membres du groupe proposent des garanties prouvant que leur idée n’est pas qu’une lubie, mais bien un désir réel de quitter un pays qui oublie la province pour en rejoindre un autre qui, jusqu’à présent, ne leur a fait aucune promesse. Un petit pays prospère au cœur d’une Grande Région dont les pays qui la composent ont connu bien des remaniements géographiques et des changements de nationalité au cours des siècles. Les mouvements indépendantistes sont nombreux en Europe. La province ne cherche pas l’indépendance. Il semblerait que ce désir d’émancipation pour s’unir et trouver plus de sécurité et de stabilité ailleurs soit bien belge. Le Rassemblement Wallonie-France, parti politique fondé à la fin des années nonante à Charleroi, milite toujours en faveur d’une union de la Wallonie et de Bruxelles avec la France, si le royaume de Belgique venait à se diviser.

«Li cia qui vwè voltyi s’payi, vwè voltyi les cias dès oûsses ossi», dit un proverbe wallon (NDLR : celui qui aime vraiment son pays aime aussi celui des autres). Pour «sauver» leur province, les Luxembourgeois belges sont prêts à aimer un autre pays.

Sophie Kieffer