Le foot reprend le chemin des terrains. Sauf que les très nombreux frontaliers français de l’élite doivent composer avec un couvre-feu fixé à 18h. Ce qui les angoisse… modérément.
Face au coronavirus et aux mesures sanitaires, il n’est plus du tout question de discuter des heures, comme depuis des années, afin de savoir si les footballeurs du pays sont professionnels, amateurs, non amateurs… Non, ils sont tous ravis de reprendre le chemin de l’entraînement, et tant pis si, en Moselle, les autorités ont décidé d’instaurer depuis le 2 janvier et pour au moins quinze jours, un couvre-feu : tous, sans distinction de nationalité ou de statut professionnel, ont reçu leur petite attestation de déplacement.
«Ça dit que c’est notre métier quoi, que c’est comme ça qu’on gagne notre vie», synthétise Zachary Hadji, l’avant-centre du Fola. La question de la crédibilité de ce bout de papier lors d’un contrôle de police, avec à la clef une amende potentielle salée, reste cependant encore à prouver. Le risque est énorme : 135 euros pour une première infraction, 200 euros en cas de récidive sous quinze jours, 3 750 euros et… six mois de prison pour un troisième contrôle sans justificatif en moins d’un mois.
La perspective fait rire jaune Serge Wolff, le coach de Mondorf, qui quitte son domicile à 17h30 et y rentre à 22h, les jours d’entraînements : «C’est vrai qu’on est dans une situation un peu floue. Aucun de mes joueurs frontaliers n’a encore été contrôlé avec son attestation mais il faut qu’on se dise que si un seul joueur français du championnat en prend une, cela veut dire que le papier qu’on a tous n’a pas de valeur, qu’on est tous en danger et il faudra alors trouver une solution».
S’il faut, j’irai au commissariat et je leur présenterai mon contrat de travail
Dans l’interview qu’il nous a accordée, mardi, Paul Philipp, le président de la FLF, a insisté pour dire qu’en aucun cas les clubs ne pourraient faire valoir ce genre de problème pour se substituer à une rencontre de championnat, les premières étant censées se dérouler le 7 février. Le championnat avancera désormais à marche forcée, quitte à devoir se passer d’une partie non négligeable du contingent de joueurs. Et rien qu’en DN, cela concerne au bas mot 70 joueurs environ…
Cette perspective ne gâche pas le plaisir de Bilel El Hamzaoui, le milieu de terrain pétangeois qui, chaque jour, fait le déplacement en covoiturage avec Mounir Hamzaoui, Nestor Kodjia et Sohny Sefil. «On n’a encore jamais été contrôlés mais ça ne nous angoisse pas. Dans la voiture, on est tous très régulièrement testés, on porte nos masques et on habite à Terville, à trente secondes de l’autoroute. Il n’y a vraiment que vers le rond-point de Lamadelaine qu’on pourrait se faire contrôler. Alors sachant ça, on est vraiment contents de retourner s’entraîner, même avec le couvre-feu». «Et puis on n’est pas là pour resquiller ! lâche Joël Wolff. Si je me fais interpeller, on peut discuter non ?»
On peut aussi prendre une grosse «prune». «Je me demande si le club la paierait, sourit El Hamzaoui… Tiens, je vais demander à mon directeur sportif». «Ce serait logique, lui répond Hadji, qui quitte justement son domicile à 18h pétantes. Mais personnellement, je ne suis pas inquiet. Si on me dit que mon attestation pose problème, je demanderai aux policiers de me convoquer pour le lendemain au commissariat et je leur présenterai mon contrat de travail, parce que désolé, mais je ne me promène pas avec. Et je ne vais pas commencer à m’amuser à prendre des petits chemins pour essayer d’échapper aux contrôles. Non, je fais comme d’habitude parce que je vais au travail».
Julien Mollereau