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L’Azerbaïdjan hisse son drapeau à Latchin, troisième district rétrocédé par l’Arménie


Dès le 25 novembre, le drapeau de l'Azerbaïdjan flottait sur Kalbajar (Photo : AFP).

Les soldats azerbaïdjanais ont levé pour la première fois depuis presque trente ans mardi leur drapeau à Latchin, dernier des trois districts rétrocédés par l’Arménie en vertu du cessez-le-feu ayant mis fin à six semaines de combats au Nagorny Karabakh.

Peu après minuit, une colonne militaire azerbaïdjanaise est entrée dans le district, qui était sous contrôle des forces arméniennes depuis une guerre dans les années 1990 ayant fait des dizaines de milliers de morts et des centaines de milliers de déplacés.

Des journalistes de l’AFP ont ensuite vu un groupe d’une dizaine de soldats participer à une courte cérémonie dans la cour d’un bâtiment officiel de la ville, au-dessus duquel a été hissé le drapeau azerbaïdjanais.

Le district de Latchin, comme celui d’Aghdam rendu le 20 novembre et celui de Kalbajar rétrocédé le 25 novembre, formaient une zone tampon entourant la république autoproclamée du Nagorny Karabakh, à majorité arménienne.

Quatre autres districts ayant la même fonction avaient déjà été repris par Bakou au cours des six semaines de combats meurtriers ayant éclaté à l’automne. Tous échappaient au contrôle de l’Azerbaïdjan depuis la fin de la guerre en 1994.

Montagneux et actuellement enneigé, le district de Latchin court du nord au sud jusqu’à l’Iran, le long de la frontière est de l’Arménie. Il est surtout connu grâce au corridor du même nom, contrôlé par les soldats de la paix russes, devenu l’unique route reliant le Nagorny Karabakh à l’Arménie.

« Parti de zéro »

Les habitants n’avaient pas attendu pour quitter les lieux, détruisant et désossant les maisons ou les infrastructures des terres qu’ils abandonnent. Certains ont cependant choisi de rester, comme Levon Gevorguian, propriétaire d’une épicerie-bar sur la place principale de Latchin.

« Cela fait 22 ans que je suis installé ici, je suis parti de zéro, j’ai tout construit », raconte l’homme de 48 ans: « J’espère que je vais pouvoir continuer, j’ai encore un crédit. Si je dois partir je brûlerai tout ».

Valera Levonian, co-propriétaire d’un supermarché et d’un hôtel, disait aussi vouloir rester, comptant sur le corridor routier menant à Stepanakert, la capitale du Nagorny Karabakh: « Les gens peuvent s’arrêter ici, manger, boire du thé et du café. Pas seulement les Arméniens, mais aussi les Russes et les étrangers ».

David Davtian, membre de l’administration locale, avait affirmé lundi à l’AFP que les habitants avaient jusqu’à 18H00 locales pour quitter les lieux, à l’exception d’environ 200 personnes « utiles à l’administration » autorisées à rester, notamment pour s’occuper du corridor.

« Je ne sais pas où aller »

A Aghavno, un village du district, des habitants quittaient justement leurs maisons lundi, chargeant leurs meubles et du bois dans des véhicules. Araksia Gyokchakian, 60 ans, a choisi de rester: « Je ne sais pas où aller. Je suis restée ici pendant la guerre. C’est ma maison », a-t-elle dit à l’AFP.

A la fin de la première guerre en 1994, l’exode inverse s’était produit, la population azerbaïdjanaise fuyant ces régions repeuplées ensuite par des Arméniens.

Beaucoup d’habitants du Nagorny Karabakh qui avaient fui les récents combats ont commencé à se réinstaller dans la région séparatiste. Mardi, l’armée russe a indiqué qu’elle avait jusqu’à présent aidé au retour de plus de 26.000 personnes.

Moscou a ajouté que ses soldats ont déminé les alentours du corridor routier de Latchin et aidé à réparer une ligne électrique détruite.

Le cessez-le-feu du 9 novembre, signé alors que la situation militaire était catastrophique pour l’Arménie, consacre la victoire de l’Azerbaïdjan et lui accorde d’importants gains territoriaux.

Il permet néanmoins la survie du Nagorny Karabakh, amoindri, et voit le déploiement de 2.000 soldats russes de maintien de la paix

Signé sous patronage russe, le cessez-le-feu a rappelé le rôle déterminant de Moscou dans son pré carré caucasien mais aussi l’influence grandissante de la Turquie, soutien de Bakou.

La Turquie a d’ailleurs annoncé mardi un accord avec la Russie sur l’établissement d’un centre conjoint d’observation qui aura pour mission de surveiller le cessez-le-feu au Nagorny Karabakh. Des démineurs turcs sont aussi arrivés lundi, la région étant réputée être la plus minée d’ex-URSS.

A l’inverse, les pays occidentaux semblent en perte de vitesse et ni la France, ni les Etats-Unis, médiateurs en tant que membres du « groupe de Minsk », chargé dans les années 1990 de trouver une issue durable à la crise, n’ont obtenu de résultats probants.

AFP