La Chambre des députés envisage de passer au virtuel au cas où les députés se retrouveraient dans l’impossibilité de siéger. Pandémie ou pas, l’opposition exige une présence physique.
Il ne manquait plus que cela pour faire sortir de ses gonds l’opposition parlementaire déjà bien excitée après la sortie du Premier ministre, le week-end dernier sur les ondes de 100,7, sur la possibilité d’un retour à l’état de crise. Voilà que la majorité à la Chambre des députés ne voit aucune objection à tenir les séances plénières à distance, par visioconférence, pour limiter les risques d’infections. Ces plénières virtuelles ne serviraient pas seulement à limiter les contacts physiques, mais elles répondraient surtout à un réel besoin au cas où un certain nombre de députés ne seraient plus en mesure de siéger, touchés par la maladie. C’est la question qui a occupé les députés de la commission du Règlement, mercredi à la Chambre, tous penchés sur «une note de recherche élaborée par l’administration parlementaire qui étudie l’opportunité et les aspects législatifs et constitutionnels d’une participation et d’un vote à distance grâce aux technologies de visioconférence». Impossible selon l’opposition, qui brandit l’article 62 de la Constitution qui oblige la Chambre à réunir au moins la majorité de ses membres, soit 31, pour pouvoir prendre une résolution. La Loi suprême ne dit pas, cependant, si la réunion doit être physique ou virtuelle. Pour l’opposition c’est entendu, les débats se déroulent au Parlement et pas dans son salon devant un écran. Ce dispositif ne lui dit rien qui vaille. Le débat démocratique est organisé au sein de la Chambre des députés et la pandémie ne doit pas créer un précédent que l’opposition juge «dangereux».
Et si un minimum de 31 députés est nécessaire pour procéder à un vote, la proposition de modification ne dit pas si les députés participant virtuellement à la séance font partie de ce nombre ou pas. Enfin, certains représentants de l’opposition ont su rappeler que des lois ont été votées qui prévoient par exemple que les enseignants et le personnel de santé puissent travailler même s’ils sont en quarantaine. Les députés devraient pouvoir en faire autant. La majorité ne se laisse pas impressionner.
Cheval de Troie de l’état d’urgence ?
Elle a plutôt vanté les avancées technologiques qui permettent une retransmission en direct d’une séance publique «où quelques députés sont connectés par vidéo», explique la Chambre des députés. La majorité essaie encore de convaincre l’opposition en évoquant le risque de toute une fraction politique en quarantaine. Mais le président de la commission du Règlement, Roy Reding, a rappelé qu’il existait pour cela le vote par procuration même par l’intermédiaire d’un député d’une autre fraction ou sensibilité politique. L’opposition est décidée à ne rien laisser passer à la majorité et à se dresser comme un seul homme pour défendre le bon fonctionnement du débat démocratique. Xavier Bettel, qui semble vouloir aller plus vite que la musique, envisage de se passer du Parlement pour prendre des nouvelles mesures pendant cette pandémie, donc de repasser à l’état d’urgence. Il a déjà utilisé ce joker lors de la première vague et au maximum, soit trois mois. Et à moins de considérer la seconde comme une nouvelle crise, il ne peut plus décréter d’état d’urgence. Or rien n’a changé et c’est ce que l’opposition reproche au gouvernement dans sa gestion actuelle de la pandémie. La Chambre des députés a pu prouver au contraire qu’elle était capable de prendre connaissance, de débattre et de voter une loi en trois jours alors que le Conseil d’État, comme toute autre institution amenée à aviser une loi, est également capable de la même promptitude.
Geneviève Montaigu