Le reconfinement en Angleterre, qui pourrait faire replonger le pays en récession, est « vraiment dévastateur » pour l’économie britannique déjà à genoux en raison de la pandémie, a prévenu lundi l’organisation patronale CBI.
Sa directrice générale Carolyn Fairbairn, qui s’apprête à quitter son poste, s’est montrée alarmiste en ouverture de la conférence annuelle de la CBI.
Cette traditionnelle grand-messe des entreprises se tient en ligne cette année et est lancée quelques jours avant l’entrée en vigueur jeudi d’un nouveau confinement dans le pays destiné à enrayer la propagation rapide du virus.
Mme Fairbairn a publiquement regretté l’absence du Premier ministre conservateur Boris Johnson dont les relations avec le monde des affaires sont houleuses et qui s’est décommandé à la dernière minute, alors qu’il doit s’exprimer dans la journée devant le Parlement.
M. Johnson a finalement été remplacé par le ministre auprès des Entreprises Alok Sharma.
« C’est dommage que le Premier ministre ne se joigne pas à nous. Nous espérons que nous pourrons l’entendre » d’ici la fin de la conférence, qui dure trois jours, a déclaré Mme Fairbairn.
Son successeur, Tony Danker, devrait avoir comme priorité de retisser des liens de confiance avec le gouvernement, après des années de tiraillements autour du Brexit.
Lors de la conférence, la gestion de la crise sanitaire par le gouvernement a été vivement critiquée par Keir Starmer, le chef du parti d’opposition travailliste, qui a assuré se tenir aux côtés des entreprises.
« Ils n’ont pas appris. Ils n’ont pas écouté. Et ils n’ont pas dirigé. Le résultat est tragique mais beaucoup trop prévisible », a lancé M. Starmer, accusant le gouvernement d’avoir trop tardé à agir fermement contre le virus.
La CBI a elle estimé que les entreprises étaient « mieux préparées » pour ce nouveau confinement. « Il est nécessaire de garder l’économie aussi ouverte que possible », a prévenu Mme Fairbairn.
« Cauchemar avant Noël »
Les nouvelles restrictions, notamment la fermeture des bars, restaurants et commerces non essentiels au moins jusqu’à début décembre, tombent au pire moment notamment pour la distribution, où les deux derniers mois de l’année sont traditionnellement les plus chargés avec le « Black Friday » puis Noël.
La fédération britannique des commerçants, le BRC (British Retail Consortium) a évoqué « un cauchemar avant Noël ».
« Cela va causer des dégâts incalculables pour les commences de centre-ville et les emplois et retarder la reprise de l’économie, avec un effet minimal sur la transmission du virus », selon Helen Dickinson, sa directrice générale.
Les propriétaires de pubs s’insurgent eux contre la décision d’interdire la vente d’alcool à emporter pendant le prochain confinement, ce qui pourrait les conduire à jeter de la bière en grande quantité.
Face à ce nouveau choc pour l’économie, le gouvernement a immédiatement décidé de prolonger d’un mois, jusqu’à fin novembre, son dispositif de chômage partiel qui voit l’Etat payer la majorité des salaires des travailleurs privés d’activité.
Mais Mme Fairbairn demande « davantage de clarté sur le calendrier », craignant une nouvelle vague de suppressions d’emplois une fois le mécanisme retiré.
Les regards vont se tourner désormais vers la Banque d’Angleterre, qui doit dévoiler jeudi les conclusions de sa réunion de politique monétaire.
L’institution monétaire pourrait renforcer son programme de rachats d’actifs afin de soutenir l’économie et rassurer les marchés, tout en poursuivant sa réflexion sur la mise en place de taux négatifs.
La pandémie ne sera pas le seul sujet au menu des discussions de la conférence du patronat, qui s’inquiète de la lenteur des discussions entre Londres et Bruxelles sur la relation post-Brexit.
Mme Fairbairn a une nouvelle fois plaidé pour la conclusion rapide d’un accord avec l’UE. « Nous en avons besoin désespérément », a-t-elle dit, afin d’éviter un double choc pour l’économie.
L’économie britannique devrait quoi qu’il arrive connaître une fin d’année très difficile, avec une chute de l’activité en novembre liée au confinement, ce qui devrait entraîner une rechute au quatrième trimestre après le rebond de l’été.
« Les conséquences sur la croissance seront considérables », notent les économistes de Deutsche Bank, qui anticipent un plongeon du PIB entre 6 et 10% en novembre et une contraction « probable » sur le trimestre.