Le gouvernement belge a dévoilé jeudi les grandes lignes du « virage fiscal » qu’il entend mettre en œuvre pour alléger le coût des salaires et renforcer la compétitivité du pays, et décidé de nouvelles économies garantissant selon lui le retour à l’équilibre des finances publiques en 2018. Électricité, tabac et alcool seront davantage taxés.
« Mission accomplie! », s’est réjoui le Premier ministre, le libéral francophone Charles Michel, qui avait fait de l’allègement des charges sur les salaires et de l’assainissement budgétaire deux des principales priorités de son gouvernement, entré en fonction en octobre 2014.
Le Premier ministre, qui travaillait dans la discrétion depuis plusieurs semaines, pouvait se targuer d’avoir réussi à souder sa majorité de droite pour affronter l’opposition socialiste, qui a dénoncé, par la voix du député Ahmed Laaouej, une « supercherie de plus ». Le PS a regretté l’absence d’une taxe sur les plus-values boursières ou d’un impôt sur la fortune dans les mesures annoncées.
« Nous sommes très loin d’une réforme qui rétablisse la justice fiscale et assure la transition vers une société plus durable. Le gouvernement ne fait que redonner d’une main une partie de ce qui a été pris de l’autre », a abondé le parti vert Ecolo dans un communiqué, en écho aux réactions des syndicats qui ont dénoncé « un échec social et fiscal ».
M. Michel a toutefois annoncé que les bas et moyens salaires seraient augmentés de 100 euros par mois à partir de 2016 grâce à une révision de l’impôt sur le revenu. Il a estimé que ce train de mesures constituait « un moteur pour la croissance et l’emploi » et qu’il débouchera sur une « baisse de la pression fiscale globale » en Belgique, l’une des plus élevées d’Europe.
Le gouvernement a expliqué avoir garanti la « trajectoire budgétaire » qui doit permettre au pays de retrouver l’équilibre en 2018.
Un nouvel « effort » de 978 millions d’euros a été inscrit dans une version révisée du budget de 2015 et 782 millions additionnels sont déjà d’ores et déjà prévus dans l’ébauche budgétaire pour 2016 que la Belgique rendra à la Commission européenne à la mi-octobre. « C’est important pour la confiance dans notre pays de garder la trajectoire. Cela permettra de maintenir les charges de la dette le plus bas possible », a estimé le vice-Premier ministre libéral francophone, Didier Reynders.
Avec le report de l’âge légal du départ à la retraite à 67 ans à partir de 2013 et un gel temporaire des salaires, le « virage fiscal » était l’une des grandes mesures promises lors de l’arrivée au pouvoir l’automne dernier d’une coalition de quatre partis dominée par les indépendantistes de la Nouvelle alliance flamande (N-VA).
Le gouvernement avait déjà pris des initiatives d’inspiration libérale, en limitant par exemple certaines allocations pour encourager les demandeurs d’emploi à chercher du travail.
Avec la nouvelle orientation fiscale, Charles Michel évalue à présent à « 7,2 milliards à l’horizon 2018 » les mesures prises pour renforcer la compétitivité. La décision la plus spectaculaire annoncée jeudi est une baisse des cotisations patronales, qui passeront de 33% à 25% dès 2016. « Nous avons fait le premier pas. Nous invitons maintenant les employeurs à faire le deuxième », a commenté le chef de file des ministres N-VA, Jan Jambon.
La Fédération des entreprises de Belgique (FEB) a d’ailleurs salué une « étape cruciale en vue de la poursuite du rétablissement de la compétitivité ». Selon le vice-Premier ministre libéral flamand Alexander De Croo, le « handicap salarial » de la Belgique par rapport à ses principaux voisins va être réduit « de huit points » et se situer sous les 10%.
Des économies dans le fonctionnement des services de l’Etat (pour 550 millions d’euros), par un retour à 21% du taux de la TVA sur l’électricité (qui avait été abaissée à 6% en 2013), ou encore une augmentation des taxes sur le gazole, le tabac, l’alcool et les boisons gazeuses, devraient par ailleurs rapporter 700 millions d’euros en 2016.
Les chrétiens-démocrates flamands, qui insistaient pour que les revenus du capital ne soient pas épargnés, ont obtenu notamment l’instauration d’une taxe sur les opérations boursières spéculatives (actions détenues moins de six mois), qui devrait rapporter quelque 28 millions d’euros.
AFP