Y aura-t-il une 10e journée de Division nationale? Alors que l’épidémie galope de nouveau et que tout le reste du football a été mis à l’arrêt vendredi soir, coaches et présidents recommencent à envisager le pire : l’arrêt des compétitions.
On a longtemps cru, bien au-delà des résultats sportifs, que l’événement le plus important de ce week-end serait le 102e congrès de la FLF, qui pourrait accoucher de réformes profondes avec, entre autres, un allongement de la période estivale des transferts, l’ajout d’un joueur transféré supplémentaire (de 4 à 5) sur les feuilles de match ou encore des extensions significatives du principe du joueur sélectionnable.
Depuis quelques jours, on sait que non, tout cela, ces votes cruciaux pour l’avenir à court et moyen terme des clubs, pèse bien moins lourd que cette effrayante crainte qui saisit tout le monde d’un nouvel arrêt sine die des compétitions. Vendredi après-midi, l’information a fini par tomber : reconfinement quasi-total de tous les footballeurs du pays à l’exception de la BGL Ligue. Pour combien de temps?
En Belgique, les footballeurs amateurs ont été mis aux arrêts de rigueur. En France métropolitaine, la Moselle reste une exception très locale et l’on n’y a pas encore pris les mesures de couvre-feu instaurées dans 54 départements, mais si les joueurs sont finalement empêchés de se déplacer en soirée pour aller s’entraîner?
Déjà, les clubs de DN se prémunissent. À Mondorf par exemple, Serge Wolf et ses dirigeants commencent à envisager des plans B : des attestations pour permettre la circulation de leurs frontaliers, des séances d’entraînement moins tardives, voire une séance le samedi, qui en remplacerait une autre. De l’autre côté du pays, Wiltz, qui a vu Burkic placé en quarantaine préventive, a déjà édité des certificats pour ses Belges. «On leur a signé une dérogation qui dit qu’ils travaillent pour le club au cas où ils se feraient arrêter par la police», indique Dan Huet. Tout à l’Est, Rosport et son staff ont eux par exemple «interdit» aux frères Soladio d’aller rendre visite à leur famille en Belgique. Le danger de les voir coincés loin de Rallingen est trop important.
«C’est reparti!»
Chacun prend de petites mesures à son échelle. Et ceux qui sont touchés aujourd’hui ne diront jamais que ces petits détails ne font pas la différence tant ils savent ce que signifie une mise à l’arrêt. Régis Brouard et son RFCU se retrouvent par exemple à la maison pour la deuxième fois depuis la reprise et c’est un vrai drame. «C’est reparti!, se lamentait-il vendredi. J’espère que cela ne sera pas comme la dernière fois (NDLR : en tout début de saison, fin août) parce que c’était terrible à vivre, très lourd à porter. Et puis après ça, c’est très dur de faire revenir au niveau les mecs qui ont été touchés, d’autant que dans le travail collectif, avec les disparités de conditions physiques et de besoins de chacun, vous devenez fou. Nous, on avait réussi à le masquer contre le Swift (NDLR : victoire 1-2), mais après… Le Progrès est touché aussi et je peux vous le dire : ils vont le payer. Je vous le dis, ce n’est pas marrant! Alors quand j’entends que certains disent que des clubs trichent avec ça…»
De toute façon, on n’en est déjà plus à se demander comment gérer le football d’élite sous épidémie. Mais plutôt à se demander s’il y aura encore du football d’élite sous épidémie. «Je suis presque sûr qu’on ne finira pas l’année», lâche Marc Thomé, qui ne recevra pas le Progrès ce dimanche et en profitera pour aller superviser ses deux prochains adversaires très théoriques que sont le Fola et le Swift.
Dan Huet, dans le Nord, est encore plus péremptoire : «En fait, je me disais même que notre match contre le Fola mercredi soir serait le dernier.» Serge Wolf anticipe peut-être même un peu trop, riant à moitié et spéculant sur un arrêt… définitif : «On ne se rend peut-être même pas encore compte de notre victoire de mercredi soir à Hamm», qui évite à Mondorf de se retrouver dans une position trop périlleuse, comme en mars dernier, avant que la FLF ne décide de tout geler.
Pourtant, au risque de se répéter, Paul Philipp a insisté tout récemment encore pour dire que dans le respect, bien évidemment, des consignes ministérielles, la fédération entendait cette fois tout mettre en œuvre pour continuer à jouer aussi longtemps que possible. Quitte à avoir recours au huis clos. Et contrairement à la levée de boucliers du mois de mars, il semblerait qu’un consensus large se dessine derrière lui.
«Il faut envisager le huis clos»
Régis Brouard s’entendait ainsi dire que sa présidente au Racing, Karine Reuter, aussi patronne désormais de la Ligue, se trouve dans «la démarche de jouer! Elle pense qu’il faut continuer.» Et elle n’est pas la seule à le penser. Sébastien Grandjean, coach du Fola, par exemple : «Pour moi, il faut continuer. Par contre, il faut que la FLF prenne position. Déjà pour déterminer un seuil de joueurs positifs au-dessus duquel on peut remettre un match. Comme c’est le cas à l’étranger. Reporter parce qu’on a un seul cas positif, ce n’est pas possible. Il faut surtout éviter qu’on puisse mettre en doute l’honnêteté d’un club ou qu’on puisse se servir de cette épidémie pour ne pas jouer.»
D’accord, mais jusqu’à présent, le conseil d’administration installé à Mondercange a toujours refusé de fixer des seuils lisibles, préférant décider d’éventuels reports au cas par cas. Se positionner sous-entendrait d’imposer sa propre feuille de route aux ministères des Sports et de la Santé pour sauver l’activité.
Fabrizio Bei, le président differdangeois, lui aussi privé de football ce week-end, l’y encourage : «Je m’attends au pire, mais j’espère qu’ils ne vont pas tout arrêter. Le problème, c’est de mettre tout le monde en quarantaine pour un seul positif. En Italie, Gênes a joué alors qu’ils ont neuf positifs… Le président Philipp a raison : même si financièrement on aura des pertes, il faut envisager le huis clos. On doit le faire pour le foot. On ne peut pas se permettre d’arrêter pour trois mois une deuxième fois.» Après tout, le danger de propagation du Covid est effectivement plus en tribunes que sur le terrain.
Julien Mollereau (avec J. C.)