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Attraper le coronavirus dehors ? Rare mais pas impossible


En gare de Toulouse, les distributeurs ont été mis dehors (Photo : AFP).

La quasi-totalité des contaminations documentées au nouveau coronavirus se sont produites dans des espaces intérieurs, mais les experts estiment que le port du masque dehors se justifie car le risque n’est pas zéro.

Et ce d’autant plus dans les endroits bondés où les gens se parlent à proximité et pendant longtemps, du type fêtes ou meetings électoraux.

Risque relatif

Depuis le début de la pandémie, les études ont décrit des contagions dans des restaurants, des maisons, des usines, des bureaux, des conférences, des autocars, des avions… Une étude d’avril a identifié un seul cas de transmission extérieure, entre deux villageois en Chine, sur plus de 7.000 étudiés.

Dans une analyse de 25.000 cas, et non évaluée indépendamment, 6% des cas étaient liés à des environnements ayant une composante extérieure, du type sport, fêtes ou concerts: des lieux bondés où la distanciation physique n’était pas respectée, où les gens restaient souvent longtemps, circulaient et parlaient fort ou chantaient.

« Nous n’avons quasiment pas trouvé de cas dans des circonstances extérieures du quotidien », dit l’auteur Mike Weed, de l’université Canterbury Christ Church, qui cite des marchés ouverts en Chine et en Amérique latine, ou un chantier à Singapour.

Les données disponibles indiquent que « l’extérieur est bien plus sûr que l’intérieur, pour une activité et une distance similaires », écrit un groupe de scientifiques et d’ingénieurs spécialistes de la propagation des virus respiratoires et de la qualité de l’air, dans une foire aux questions résumant l’état des connaissances.

Dilution dans l’air

« Le risque de transmission est bien plus faible dehors que dedans car les virus libérés dans l’air peuvent rapidement se diluer dans l’atmosphère », poursuivent ces experts, qui font la comparaison avec la fumée de cigarette.

Depuis février, de multiples études ont accrédité la voie de contamination dite aérienne, par les nuages invisibles de gouttelettes microscopiques que nous libérons rien qu’en respirant (aérosols) — pas seulement par les gouttelettes relativement plus grosses que nous expulsons en toussant et en éternuant, et qui peuvent atterrir directement sur le visage d’une personne dans un périmètre d’un ou deux mètres.

Les plus petites gouttelettes flottent dans l’air pendant des minutes ou des heures, selon la ventilation. Dans une pièce mal aérée, mais aussi dehors entre deux bâtiments sans courant d’air, elles peuvent s’accumuler et être inhalées par quelqu’un d’autre.

On ignore la dose de particules virales nécessaire pour créer une infection, mais plus elle est conséquente, « plus la probabilité d’infection augmente », dit Steve Elledge, généticien spécialiste des virus à Harvard.

Le temps passé près d’une personne contagieuse sera un facteur clé: une seconde sur un trottoir ne semble pas suffire, il faut sans doute plusieurs minutes au moins.

« Bien que ce ne soit pas impossible, il n’y a pas de preuve que le Covid-19 ait été transmis quand des gens se croisent à l’extérieur », conclut le groupe de chercheurs, qui recommande le masque dans les lieux bondés.

Principe de précaution

Linsey Marr, experte très citée à l’université Virginia Tech, dit à l’AFP qu’elle recommande le masque dehors si la zone est très fréquentée, et que « vous croisez les gens fréquemment, par exemple plus d’une personne par minute, à peu près, ce n’est pas une règle absolue ».

« Quand on croise les gens dehors, on peut inhaler un peu de l’air qu’ils expirent. Toute exposition unique et brève comporte un risque très faible, mais ces expositions s’additionnent avec le temps. Mon conseil est fondé sur un principe de précaution et sur le fait que porter un masque ne fait pas de mal », ajoute la scientifique.

Sur les terrasses de restaurants, le groupe conseille de garder une bonne distance entre les tables et de se masquer quand on ne mange pas.

Il y a trop de variables pour chiffrer le risque exact sur un trottoir ou dans tel parc, cela dépend du vent, du nombre de gens mais aussi du soleil. Les rayons UV désactivent le virus, mais plus ou moins vite selon l’intensité (de quelques minutes à une heure).

Les connaissances sont limitées car les scientifiques ont du mal à mesurer les concentrations de virus en extérieur, et à faire des expériences comme en laboratoires.

En termes de santé publique, les experts pensent in fine qu’il est plus efficace d’avoir une consigne simple et claire.

« Une recommandation universelle est la stratégie la plus sûre », dit Kristal Pollitt, professeure d’épidémiologie et d’ingénierie environnementale à l’université Yale.

Sans compter que sur un trottoir, un passant peut éternuer à l’instant où vous le croisez, rappelle-t-elle.

AFP