Malgré la recrudescence de cas de Covid au pays (et dans les clubs), la FLF n’est pas inquiète : la reprise du championnat n’est pas encore remise en cause. Mais des questions monumentales se posent.
Il reste 27 jours à attendre. C’est un détail : alors que la reprise de la DN est programmée pour le 23 août, cela fait déjà 143 jours qu’on n’a plus vu le moindre match officiel de football au pays. Mais cela, c’est à supposer que l’on puisse effectivement reprendre…
Tout récemment, des chercheurs ont en effet extrapolé sur le fait que le système de santé luxembourgeois sera saturé fin août. Et si actuellement, tous les clubs du pays ont déjà repris les matches amicaux et les entraînements comme si de rien n’était, certains dans le milieu ont acquis la certitude que le temps continue de jouer contre le football plutôt que pour lui : « Si vous me dites on reprend demain, je vous réponds pas de problème, assure ainsi Christian Strasser, président de l’US Mondorf. Si vous me dites que ce sera le 23 août, je vous réponds que je ne sais pas du tout où l’on en sera ».
Christian Strasser avait été l’un des présidents de BGL Ligue les plus véhéments et intransigeants quand l’épidémie avait commencé à frapper aux portes, en mars. Il avait demandé à tout arrêter pour de bon bien avant les autres. Revenir le voir, à moins d’un mois de la reprise du championnat était donc tout naturel, ne serait-ce que pour mesurer son degré d’inquiétude. Or il a basculé… dans le scepticisme le plus total, ne serait-ce que parce qu’une liste de questions longue comme le bras reste en suspens.
« Pas de report envisagé pour l’instant »
Pour l’heure, pourtant, la FLF, elle, ne doute pas une seule seconde que ses compétitions débuteront, comme prévu, le week-end du 23 août. « Il n’y a pas de report envisagé et à l’heure actuelle, on reprend ! D’autant que nos clubs peuvent rejouer et disputent des amicaux », synthétise Joël Wolff, secrétaire général de la FLF. Les conditions, d’ailleurs, n’ont pas évolué d’un iota et la fédération, en lien direct avec les ministères de la santé et des sports, suit sans sourciller les recommandations qui viennent d’en haut. « On n’a pas reçu de directive spéciale, confirme ainsi Joël Wolff. Pas besoin d’imposer des tests aux joueurs. Le public peut entrer au stade à partir du moment où il est assis et masqué si l’on ne peut respecter une distance de sécurité. Nous devons juste encore déterminer avec les autorités s’il convient d’instaurer une jauge maximale. Mais pour l’heure, même si cela semble étranger, vous pouvez tout à fait remplir une tribune de 500 places avec 500 personnes, du moment qu’elles portent des masques et qu’elles sont, donc assises ».
Dit comme cela, tout semble aller pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles et de prime abord, le docteur Langinier, qui officie au Progrès et a été d’emblée un acteur majeur de la mise en place du protocole sanitaire chez les clubs européens, admet qu’il n’y a, a priori, « aucune raison de tout refermer », ne serait-ce que parce que tous les cas recensés officiellement chez les joueurs, jusque-là, « sont asymptomatiques et « négativent » tous après quatorze jours ».
« Nos dirigeants vont interpeller la FLF »
Sauf que voilà, la FLF et ses clubs, qui représentant 40 000 licenciés, et a de quoi devenir un magnifique cluster institutionnel, se retrouve confronté à une réalité moins reluisante à presque trois semaines de sa reprise : un supposé laisser-aller bien dérangeant à l’échelle de la société. Les clubs européens, au taquet sur les tests et les mesures de précaution, s’inquiètent en effet officieusement de ce que le reste de la DN ne suit pas forcément les mêmes règles. Pas du tout même.
« Certains clubs utilisent la politique de Donald Trump : ils ne testent pas et donc sont sûrs de ne rien trouver », indique un dirigeant désireux de rester anonyme. « Je sais d’ailleurs que la Jeunesse ou le F91 ont eu des cas positifs. Je peux même vous donner les noms. Pourtant, ils n’ont pas arrêté leurs entraînements ou leurs matches amicaux ». Une affirmation d’autant plus étonnante et inquiétante que si elle est avérée, elle indiquerait que certains s’affranchissent des règles de santé publique. « Ce n’est pas vraiment ça, témoigne Arsène Menessous, de la Jeunesse. En fait, on n’est pas testés du tout. Donc quand un gars a les symptômes, il est juste renvoyé à la maison mais les autres continuent à s’entraîner ». De quoi bien énerver le Fola, qui a renvoyé tout le monde à la maison pour une semaine après que trois de ses éléments ont été testés positifs.
« Nos dirigeants vont interpeller la FLF à ce sujet », croit savoir le docteur Langinier. Que se passera-t-il, effectivement, si un club européen se retrouve avec plusieurs cas positifs dans ses rangs après un match de DN contre un adversaire qui n’a pas pris la peine de faire tester ses joueurs et avant un match international ? « De toute façon, si on suit strictement les lois du pays, embraye le médecin du Progrès, au moindre cas positif, toute l’équipe doit être placée en quarantaine et cela sous-entend d’office l’annulation de la rencontre ».
Cela sous-entend, donc, des tests. Or pour l’heure, la FLF n’a pas prévu d’en demander puisque les ministères ne les lui demandent pas. Cela évite peut-être aussi, pour l’heure, de révéler l’ampleur du nombre de contaminations dans les clubs de BGL Ligue. D’ailleurs, les clubs européens ont dû étendre leur offre pour les joueurs : le laboratoire BioneXt va épauler Ketterthill, qui n’arrivait plus à suivre, d’autant que les joueurs de foot ne sont pas prioritaires, n’étant pas une population fondamentalement à risque. Finalement, le 23 août, c’est encore très loin.
Julien Mollereau