L’entraîneur national du XV luxembourgeois n’est pas des plus enthousiastes en ce moment. Il faut dire que les temps sont particulièrement durs pour les rugbymen, dont le sport est à la fois collectif et de contact…
Après plus de deux mois d’arrêt pratiquement complet, le sport commence, petit à petit, à reprendre ses droits un peu partout dans le monde. Le Luxembourg ne fait pas exception à la règle, mais, comme partout ailleurs de toute façon, il n’est pas encore question du sport d’avant.
La reprise s’effectue progressivement dans des conditions extrêmement strictes afin que les règles sanitaires – gestes barrières et distanciation sociale notamment – soient, bien sûr, respectées.
Certains sont, il est vrai, mieux lotis que d’autres. Les cyclistes ont toujours pu rouler. Depuis le 4 mai, les nageurs et les athlètes peuvent à nouveau pratiquer leur sport, alors que les meilleurs pongistes peuvent également taper la balle. Les joueurs de tennis ont à nouveau le droit de s’entraîner.
Mais qu’en est-il des rugbymen? Jonathan Flynn répond à la question : «Désormais, les joueurs à partir de 14 ans peuvent s’entraîner. Mais ce n’est pas ça, le rugby», constate l’entraîneur national du XV luxembourgeois.
Et de lister les règles on ne peut plus draconiennes pour étayer ses propos : «Nous entrons dans une première phase à la durée indéterminée. Pendant cette période, il faut moins de dix personnes dans une séance, une distance d’au moins deux mètres entre chacune, voire dix mètres en cas de course, on ne peut pas mélanger les groupes, un ballon par personne et interdiction de se faire des passes, des séances d’une durée maximale de 60 minutes avec une intensité ne pouvant pas aller au-delà de 80 % de la fréquence cardiaque maximale…»
«On a tout le temps les mains sur le ballon»
Effectivement, à la lecture de toutes ces contraintes, on est vraiment loin du rugby que l’on connaît. De tout ce qui fait l’essence de l’ovalie. «Le problème, c’est qu’on est à la fois un sport collectif et de contact. On a tout le temps les mains sur le ballon. Notre sport, c’est attraper et donner le ballon. Dans ces conditions, c’est forcément compliqué.»
Le technicien écossais ne cache d’ailleurs pas sa tristesse devant la situation. Mais, évidemment, il ne peut rien y faire. Et surtout, il n’a aucune idée concernant un éventuel retour à la normale : «En Allemagne, ils sont optimistes sur le fait de pouvoir reprendre en septembre. De notre côté, on attend toujours des nouvelles concernant les tournois de rugby à 7 de cet été. À l’heure actuelle, ils n’ont pas encore été annulés», constate-t-il.
En revanche, pour la saison à XV, c’est bien terminé. Et le XV grand-ducal, qui avait réussi l’exploit de pratiquement valider son maintien en Conférence 1 Nord grâce à un succès en Suède (0-13) en novembre dernier, en sera donc quitte pour répéter le même genre d’exploit lors de la prochaine saison : «On devrait repartir dans la même division avec les mêmes adversaires», confirme encore Jonathan Flynn.
Et de prévenir : «Les Tchèques et les Suédois seront encore plus forts.» Mais les Luxembourgeois aiment ce genre de challenge. Le prochain sera peut-être, pour World Rugby, d’imaginer le rugby d’après. Pourquoi ne pas envisager de jouer avec des gants, même si ça ne résoudrait évidemment pas tout…
«Retirer la mêlée, ça n’a pas de sens»
En tout cas, il est une rumeur qui court qui ne trouve absolument pas grâce aux yeux du sélectionneur luxembourgeois : «J’ai entendu dire que certains pensaient retirer la mêlée. Ça n’a pas de sens! Bien sûr, cela ferait moins de contacts mais il y a plein d’autres phases avec contact. Les mauls, les rucks, les placages. Je me souviens d’un match contre l’Ukraine où on avait effectué 180 placages dans le match. Et une bonne dizaine de mêlées…»
Durant ces longues semaines, Jonathan Flynn a, comme tout le monde, passé énormément de temps sur… Zoom : «Des réunions avec World Rugby, avec Rugby Europe, avec les arbitres. Notre sport a des règles qui évoluent chaque année et il faut bien se tenir au courant.»
Habitué à arpenter les terrains, à encourager ses mecs et à vibrer à leurs exploits, Jonathan Flynn est clairement en manque : «Pendant cette période, c’est incroyable de voir la quantité de contenus qui s’est offerte à nous. Des Zoom, des webinars, beaucoup de matériel généré par les fédérations. Et le plus frustrant, c’est qu’on n’a pas l’opportunité de mettre tout ce qu’on a appris en pratique. C’est vraiment l’opportunité d’entraîner qui me manque.»
Alors, retour en septembre? Pour les plus optimistes, peut-être. Mais la vérité, c’est que personne ne sait quand Jonathan Flynn pourra retrouver les pelouses… avec ses joueurs.
Romain Haas