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Coronavirus : la BCE prête à renforcer et prolonger son arsenal


L'économie de la zone euro pourrait se contracter de 5 à 12 % cette année en raison de la crise du coronavirus, a déclaré Christine Lagarde, directrice de la Banque centrale européenne, ce jeudi. (photo AFP)

Face au cataclysme économique déclenché par la pandémie de coronavirus, la Banque centrale européenne s’est dite « prête » jeudi à renforcer son programme d’urgence et le prolonger au-delà de la fin 2020, après sa série de mesures exceptionnelles prises depuis mars.

« La zone euro fait face à une contraction économique d’une magnitude et vitesse jamais vues en temps de paix », a souligné la présidente de l’institution monétaire Christine Lagarde face à une salle de presse vide, toutes les questions étant posées à distance. La BCE s’attend à un repli de « 5 à 12% » du produit intérieur brut de la zone euro cette année, reflet de la « grande incertitude » autour des dégâts économiques causés par la pandémie, a-t-elle expliqué.

Cette violente récession, aux conséquences sociales encore impossibles à évaluer, devrait être suivie d’une « reprise » si les mesures de confinement sont progressivement levées. Mais « sa vitesse et son ampleur » sont elles-mêmes « hautement incertaines », a poursuivi la Française. L’institution a donc affiché sa détermination à accroître si nécessaire la taille des rachats massifs de dette décidés le 18 mars, dans le cadre du programme d’urgence PEPP doté de 750 milliards d’euros d’ici la fin de l’année, et à les prolonger « au-delà de 2020 ».

Dans l’immédiat, les gardiens de l’euro ont cependant confirmé pour l’essentiel les mesures prises depuis la mi-mars, destinées à éviter que les conditions de financement ne se durcissent et n’aggravent l’impact économique de la crise. Seul changement : les prochaines vagues de prêts géants aux banques (dits TLTRO) se feront à des conditions encore plus généreuses. Le taux le plus favorable va descendre de -0,75% à -1%, pour la période allant de juin 2020 à juin 2021, pour peu que les banques prêtent suffisamment à l’ensemble des secteurs économiques. Par ce biais, la BCE entend stimuler le crédit pour éviter une vague de faillites, donc de licenciements, sans pour autant modifier ses taux directeurs qui campent déjà à leur plus bas niveau historique.

Se concentrer sur les pays les plus fragilisés

L’institut va aussi lancer jusqu’en septembre 2021 plusieurs séries de prêts aux banques sans poser de conditions, proposés à un taux de -0,25%. Une mesure ciblant les petites banques et qui a été poussée par la Banque fédérale allemande, décrypte une source dans l’entourage de la BCE. « La décision de laisser tous les autres instruments inchangés montre que la BCE veut d’abord faire le point sur les mesures récentes », tout en « gardant de la poudre au sec » pour renforcer son action, décrypte Carsten Brzeski, de la banque ING.

Côté rachats d’actifs, la BCE va dépenser 120 milliards d’euros supplémentaires d’ici décembre au titre de l’assouplissement quantitatif ou « QE », un programme lancé entre mars 2015 et fin 2018 puis réactivé en novembre dernier. L’institut compte par ailleurs utiliser toute la « flexibilité » du PEPP, a promis Christine Lagarde, à la fois en termes « de classes d’actifs », de pays concernés et « dans le temps ».

En clair, ce bazooka forgé dans l’urgence permet à la BCE de concentrer ses efforts sur certains pays particulièrement fragilisés, par exemple l’Italie. L’institut monétaire s’est en effet affranchi, dans le cas du PEPP, de la règle lui interdisant de détenir plus du tiers de la dette émise par un pays donné. Plus largement, les aides publiques déployées dans toute la zone euro devraient créer une montagne de nouvelle dette souveraine estimée à 1 000 milliards d’euros rien que pour l’Allemagne, la France, l’Italie et l’Espagne, que la BCE a la capacité d’absorber à son bilan.

Christine Lagarde n’en a pas moins réitéré son appel à une « action commune » en zone euro, qui « montre de la solidarité envers les plus affectés par la crise actuelle ». La semaine dernière déjà, elle avait mis en garde les dirigeants européens contre le risque « d’agir trop peu, trop tard ».

AFP/LQ