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Le Grand Est, déjà submergé, retient son souffle avant « la vague »


Des évacuations de patients du CHR Metz-Thionville vers l'Allemagne ont notamment déjà été organisés. (photo AFP)

Avec plus d’un tiers des décès enregistrés en France, le Grand Est paie le prix fort pour l’épidémie de coronavirus, ses hôpitaux, déjà en surchauffe, s’apprêtant à affronter cette semaine une « nouvelle vague importante » de patients.

« La situation continue de s’aggraver » : la phrase revient en boucle dans chacun des communiqués de presse de l’Agence régionale de santé (ARS) Grand Est sur la progression du Covid-19. Et chaque jour aussi depuis le début de l’épidémie, le nombre de contaminations et de décès ne cesse d’augmenter. Lundi soir, dans les dix départements de la région, l’Agence dénombrait ainsi 2 348 personnes infectées par le virus, dont 526 en réanimation. 335 personnes ont succombé. C’est plus d’un tiers des morts dénombrés en France, où la maladie a fait 860 morts.

Parmi eux, cinq médecins, dont quatre issus de l’Est du pays, décédés ce week-end. Deux exerçaient dans le Haut-Rhin, foyer majeur de contamination après un rassemblement de quelque 2 000 fidèles d’une église évangélique, fin février à Mulhouse. Contaminés, certains d’entre eux ont ainsi répandu le virus à travers la France.

Depuis, la situation n’a cessé de d’empirer et a même connu une brutale aggravation lundi : outre l’annonce du décès des quatre médecins, l’ARS et la préfecture ont annoncé la mort « en lien possible avec le Covid-19 » de vingt résidents d’un Ehpad des Vosges, à Cornimont, où vivent 163 personnes âgées.

« La vague est là » : cité dans le Journal du Dimanche, Emmanuel Macron avait résumé en quelques mots la rapide progression du virus dans l’Hexagone. Lui faisant écho, le Premier ministre Édouard Philippe a averti lundi soir que le temps du confinement des Français, initialement fixé à au moins quinze jours, pourrait « durer encore quelques semaines » avec des règles durcies.

Metz sous haute tension

Dans le Grand Est, où plusieurs hôpitaux sont déjà proches de la rupture, le monde médical s’attend à ce que l’épidémie franchisse un nouveau cap, avec l’afflux de très nombreux autres patients. « Nous nous préparons sans surprise à aborder une vague assez importante », expliquait lundi Marie-Odile Saillard, directrice générale du CHR de Metz, qui dispose de 74 « lits Covid » de réanimation. Mais « nous n’avons ni les lits, ni les locaux, ni les équipements, ni les personnes pour augmenter comme ça nos capacités dans des proportions extrêmement importantes », prévient-elle, alors que la Moselle compte déjà 99 patients Covid en réanimation.

« On est en ordre de marche, la difficulté va être la hauteur de la vague. Le pic est attendu en milieu de semaine et va durer quinze jours, trois semaines, mais ce sont des prévisions avec beaucoup d’aléas », renchérit Bernard Dupont, directeur général du CHRU de Nancy. « L’organisation qu’on a ne va pas durer huit semaines », s’inquiète-t-il.

900 lits disponibles

Pour faire face, l’ARS Grand Est a doublé « les capacités d’accueil en réanimation ». « Près de 900 lits » sont disponibles sur l’ensemble d’une région où, avec 58 patients en réanimation, les départements de Champagne-Ardennes sont moins touchés (contre 258 en Alsace et 210 en Lorraine). Des évacuations de patients vers d’autres hôpitaux français mais aussi vers plusieurs pays limitrophes (Allemagne, Suisse…) ont d’ores et déjà eu lieu pour soulager plusieurs hôpitaux, notamment celui de Mulhouse, renforcé cette semaine par le déploiement d’un hôpital de campagne militaire.

Cela suffira-t-il pour affronter la déferlante qui s’annonce ? Car le personnel soignant, en manque de bras, de masques et de matériel, est en première ligne. Aux Hôpitaux universitaires de Strasbourg, 253 des 12 500 salariés ont ainsi été testés positifs, selon son directeur général. L’établissement a mis en place « un protocole de dépistage systématique » des personnels présentant des symptômes et ceux qui sont positifs « ne travaillent pas ».

LQ/AFP