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Le vin face au coronavirus


Le temps n’est pas propice aux grands rassemblements qui regroupent des visiteurs de tous les continents… (Photo : messe Düsseldorf ctillmann)

Le monde du vin, très internationalisé, commence à souffrir de la panique née de la propagation du coronavirus sur les cinq continents.

Le salon ProWein à Düsseldorf, le plus important en Europe, aura lieu du 15 au 17 mars. Enfin, c’est ce qui est prévu. Désormais, il est difficile d’être sûr de quoi que ce soit tant la crainte du coronavirus provoque des annulations d’évènements en cascade. Y compris dans le secteur du vin. Il faut dire que l’an passé ProWein avait accueilli 6 900 exposants et 61 500 visiteurs venus de 140 pays. Un sacré brassage de population qui, aujourd’hui, est plus de nature à inquiéter les visiteurs qu’à rassurer les marchands.

Ces derniers jours, par exemple, le plus grand salon des vins et spiritueux de Chine, qui devait avoir lieu à Chengdu du 26 au 28 mars, a été reporté par les autorités chinoises à une date encore inconnue. Le salon Vinexpo Hong Kong, qui devrait avoir lieu en mai, risque le même sort. Le directeur général de Vinexpo, Rodolphe Lameyse, a fait part de son inquiétude au blog «Côté châteaux» : «Personne ne sait quand il y aura le pic de l’épidémie, là on parle peutêtre d’avril. On a des inquiétudes. Pour le moment, le salon de Hong Kong est maintenu en mai, mais si les choses devaient durer, j’ai éventuellement prévu un scénario de repli sur le mois de juillet.»

Aujourd’hui, ProWein ne semble pas encore sur la sellette. «Il n’y a pas de raison d’annuler, reporter ou raccourcir ProWein», affirmait mercredi dernier Erhard Wienkamp, le directeur général de l’organisateur, au site Vitisphère. Claire Sertznig, qui pilote la promotion des vins luxembourgeois à l’Institut viti-vinicole et gère la présence des vignerons luxembourgeois à Düsseldorf, confirme cette position : «On ne nous a  rien dit sur une éventuelle annulation.»

Les Italiens seront là

ProWein affiche toutefois sur la page d’accueil de son site les mesures de précaution à prendre vis-à-vis du virus. Rien d’extraordinaire toutefois. On y trouve les mesures d’hygiène courante (se laver les mains, éviter les contacts physiques…), l’assurance que le nettoyage sera plus fréquent que prévu… On n’annule pas, donc, mais on n’oublie pas non plus. Ceci est d’autant plus vrai que la délégation italienne sera importante et que le nord de la Botte qui compte de nombreuses régions viticoles est actuellement sous les projecteurs car particulièrement touché par la présence du coronavirus. Toujours dans Vitisphère, le directeur de l’agence de promotion des vins italiens (ICE), Francesco Alfonsi, explique que «L’ICE sera présente (à Pro- Wein) avec un pavillon de 26 entreprises. Je ne peux pas dire si cela va changer selon la situation, y compris concernant la participation de sociétés individuelles. Dans tous les cas, nous suivrons les mesures des autorités italiennes et allemandes.» ProWein accueillera également 24 producteurs de prosecco. Les annulations et les craintes qui entourent les grands salons ne sont pas faites pour créer la confiance. Voilà qui est problématique car, justement, ce sont eux qui permettent de créer les contacts pour lancer les exportations. Les gros acteurs sont donc dans l’expectative.

Les exportations en baisse

Les salons tremblent, mais les marchés aussi. Sur le plan international, la Chine est le principal vecteur de croissance, un levier essentiel pour les grandes maisons et les marchands. Le pays est même devenu capital pour les vins français qui souffrent de la taxe Trump (25 %, elle touche les vins tranquilles de moins de 14 degrés français, allemands et espagnols) qui plombe les exportations aux États-Unis. La Chine est même devenue la principale destination des grands crus bordelais à l’international. La grande crainte des négociants serait l’organisation de nouvelles mises en quarantaine, particulièrement dans des zones portuaires par lesquelles transitent les caisses de vin qui seraient bloquées dans des conteneurs sous le soleil, qui sait pour combien de temps. Dès le début février, l’agence de notation Moody’s prévoyait un impact inéluctable de l’épidémie de coronavirus sur les plus grands acteurs du marché : Rémy Cointreau, Pernod Ricard et Diageo. Si la réaction des marchés et des consommateurs est similaire à celle observée lors du SRAS, Moody’s anticipe une baisse des ventes d’alcool significative mais brève, due aux restrictions sur les voyages et aux mesures de quarantaine.

Si l’on était cynique, on dirait que le Luxembourg s’en laverait presque les mains. Dans un pays où l’écrasante majorité de la production est consommée sur place, ces considérations macroéconomiques ne prennent que très peu de place. Parfois, être petit et bien intégré se trouve être un vrai avantage : les fondations de l’économie du vin luxembourgeois sont particulièrement saines et solides. Aujourd’hui, personne ne s’en plaint!

Erwan Nonet