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[Musique] Brigitte Fontaine : «Je ne suis pas folle… Je suis extravagante !»


Brigitte Fontaine assure s'être calmée : "J'ai arrêté de faire le clown." Mais l'artiste continue quand même à jouer le décalage... (Photo AFP)

L’ultime «mamie» du rock est de retour avec un 19e album, Terre neuve. À 80 ans, éternelle reine de «Kékéland», Brigitte Fontaine dynamite, une fois encore, le paysage musical français. Plus punk que la «demi-clocharde» de l’île Saint-Louis, tu meurs!

D’abord, le look. Ensuite, la voix rauque. Et puis, les albums et les livres. Bienvenue dans le monde de Brigitte Fontaine, née à Morlaix, Finistère. À 80 ans, elle est l’ultime mamie rockeuse – ce qu’elle confirme avec son nouvel album, Terre neuve. Une fois encore, ça déchire grave, même si ce sont des mots rares en son île Saint-Louis, à Paris.

Avec une pointe de sourire, même si elle est enthousiaste pour évoquer ce nouveau CD avec ses dix-sept chansons et intermèdes (appelés là «break»), la critique parisienne glisse que «Mamie fait de la résistance» et ne manque pas de répéter que Brigitte Fontaine est folle. Superlookée de la tête, avec lunettes rondes et casque d’aviateur, aux pieds, avec des baskets siglées Margiela, elle répond : «Je ne suis pas folle. Je suis extravagante… Ce sont ces têtes de cul de la télé qui m’invitent pour que je vienne faire le clown et qui, après, parlent de foldingue.»

On l’a aussi qualifiée de punk – tout juste si elle n’a pas été intronisée marraine du mouvement, ce qui lui fait préciser : «Mais j’étais punk avant même d’enregistrer mon premier album!» C’était dans les années 1960… Débarquée de sa Bretagne natale – enfance à Morlaix, adolescence à Brest où elle s’imaginait, adulte, comédienne et écrivain, elle fait la connaissance à Paris de jeunes comédiens, Rufus et Jacques Higelin. Ils écrivent une pièce à six mains, la jouent.

Un 19e album à 80 ans

Puis c’est le temps de la chanson. Chez Saravah, le label de Pierre Barouh. Il y aura, en 1968, un duo Fontaine-Higelin pour une chanson magnifique, Cet enfant que je t’avais fait : «Cet enfant que je t’avais fait / Pas le premier mais le second / Te souviens-tu? / Où l’as-tu mis, qu’en as-tu fait / Celui dont j’aimais tant le nom. Te souviens-tu?». En 1970, ce sera l’album Comme à la radio, enregistré avec les musiciens Areski Belkacem (qui deviendra son mari), Leo Smith et l’Art Ensemble of Chicago. Un album devenu culte, vénéré au Japon qui fait de la chanteuse non pas une superstar mais mieux : une diva!

Bien que n’ayant jamais totalement disparu du monde de la chanson, l’habitante de l’île Saint-Louis et voisine, un temps, de Georges Moustaki et de Daniel Auteuil est revenue au premier plan du PMF (le Paysage musical français) au carrefour des années 1990-2000. Ce furent quelques chansons, telles Le Nougat, Les Zazous (en duo avec Mathieu -M- Chedid) ou encore Kékéland qui donne son titre à l’album où Brigitte Fontaine, elle, la «demi-clocharde» autoproclamée, se présente comme la «reine des kékés». Elle qui avait, pour l’occasion, rameuté de bonnes pointures de la pop (Les Valentins), du rock (Sonic Youth) et aussi du jazz (l’immense Archie Shepp). Presque vingt ans plus tard, elle est toujours là, se définissant toujours comme «poétesse».

Après sept ans d’absence discographique, elle s’est lancée à la découverte d’une Terre neuve parce qu’elle avait envie d’avancer. À quatre fois 20 ans, elle assure s’être calmée, «j’ai arrêté de faire le clown». Et continue, quand même, à jouer le décalage, la déglingue – pour cacher des blessures profondes, intimes comme les quatre avortements que, jeune femme, elle a subis?

Brigitte Fontaine, c’est une reine populaire!

En 1984, dans une émission télé, elle expliquait qu’«il est souhaitable que, quand on écrit quelque chose, on soit le plus exact possible vis-à-vis de ce qu’on voit ou ce qu’on ressent, alors peu importe si c’est noir ou rigolo, ou rigolo et noir en même temps». Elle complétait : «J’ai une prédilection personnelle pour la rigolade avec quelque chose de carabiné. Je fais pas exprès, mais, souvent, c’est comme ça que ça se passe.»

Quelque temps avant de partir définitivement en 2018, Jacques Higelin, son ami et complice de toujours, avait dit simplement : «Brigitte Fontaine, c’est une reine populaire!» Gloire, alors, à Sa Majesté de Kékéland!

De notre correspondant à Paris, Serge Bressan

Terre neuve, de Brigitte Fontaine. CD Verycords.

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