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États-Unis : la Cour suprême donne son feu vert à une méthode controversée d’exécution


Une chambre d'exécution au Texas. Les condamnés à mort sont tués par injection. (photo AFP)

Malgré plusieurs exécutions problématiques, la Cour suprême des Etats-Unis a donné son feu vert lundi à une méthode controversée d’injection létale, dans une décision très attendue par les Etats américains qui avaient suspendu le châtiment ultime.

La plus haute juridiction du pays, qui se prononçait pour la première fois sur la peine capitale en sept ans, était saisie par quatre condamnés à mort de l’Oklahoma (sud) qui craignaient de mourir dans des souffrances inconstitutionnelles, après la mort de quatre prisonniers au terme d’une longue agonie.

Les cinq juges conservateurs, contre les quatre progressistes, ont estimé que les plaignants n’avaient pas montré « un quelconque risque substantiel de souffrances » en cas du recours au midazolam, un anxiolytique, pour exécuter un condamné.

Lisant la décision de la majorité, le juge Samuel Alito a estimé que « les prisonniers n’avaient pas identifié une méthode d’exécution disponible et alternative qui implique un moins grand risque de souffrance ». La haute Cour a, en conséquence, jugé cette méthode d’exécution conforme au 8e Amendement de la Constitution qui interdit les souffrances « cruelles et inhabituelles ».

« En protégeant même ceux qui ont commis les crimes les plus odieux, le 8e Amendement réaffirme le devoir d’un gouvernement à respecter la dignité de toutes les personnes », a estimé la juge Sonia Sotomayor, au nom des quatre juges progressistes de la minorité. « Aujourd’hui, cependant la Cour donne l’absolution à l’Etat de l’Oklahoma (…) et impose à un condamné d’identifier lui-même un moyen d’être exécuté », a-t-elle dit.

Pénurie d’anesthésiants

Les 31 Etats (sur 50) qui autorisent la peine de mort souffrent d’une pénurie d’anesthésiants, que les fabricants européens refusent de fournir à des fins d’exécutions. Devant l’impasse, certains Etats sont revenus à d’anciennes méthodes d’exécution: le peloton d’exécution pour l’Utah, la chaise électrique pour le Tennessee et l’inhalation d’azote pour l’Oklahoma. D’autres encore ont recours à des préparateurs en pharmacie non homologués pour obtenir des produits et continuer à exécuter.

D’autres ont suspendu leurs exécutions, dans l’attente de la décision de la Cour suprême. Dix Etats au total n’exécutent plus pour diverses raisons tandis que 19 Etats ont purement et simplement aboli la peine de mort.

Stricto sensu, la question que se posait la haute Cour portait sur la constitutionnalité du midazolam, un anxiolytique utilisé surtout par l’Oklahoma et la Floride (sud-est) avec l’intention de rendre le condamné inconscient avant l’administration du produit mortel.

« La peine de mort est-elle constitutionnelle ? »

Mais à l’audience le 29 avril, comme en rendant la décision lundi, le débat a porté sur l’injection létale, approuvée il y a sept ans par cette même Cour, et l’avenir de la peine capitale aux Etats-Unis. Deux juges progressistes ont estimé lundi qu’il était temps de se poser une question basique: « est-ce que la peine de mort elle-même est constitutionnelle? », a demandé le juge Stephen Breyer.

Confirmant la polémique qui entoure cette question, le juge ultraconservateur Antonin Scalia lui a rétorqué qu' »à la différence du mariage gay, la peine de mort est approuvée par la Constitution ». « La plus grande partie de l’Amérique a tourné le dos à la peine de mort, seule une poignée de comtés persistent à mettre les gens à mort, il est temps de mettre fin à cette désastreuse expérience de la peine capitale », a jugé la puissante Union américaine de défense des libertés.

Dale Baich, l’avocat des quatre plaignants condamnés à mort, a promis qu' »en dépit du refus de la Cour d’intervenir dans cette question de fond, et en raison d’un risque substantiel de souffrances, la bataille judiciaire ne s’arrête pas là ». « Nous continuerons à oeuvrer devant les tribunaux pour (…) empêcher les exécutions problématiques à l’avenir », a souligné l’avocat. Le midazolam était en cause dans plusieurs exécutions récentes apparemment accompagnées de souffrances.

Le 16 janvier 2014, dans l’Ohio (nord), Dennis McGuire est mort au bout de 26 minutes après avoir visiblement suffoqué. Le 29 avril, en Oklahoma, Clayton Lockett a succombé au bout de 43 minutes de râles et gémissements. Le 23 juillet, Joseph Wood en Arizona (sud-ouest) a péri 117 minutes après l’injection, contre une dizaine de minutes habituellement.

Le Quotidien / AFP