L’année 2019 n’aura pas été de tout repos pour le géant de l’acier, ArcelorMittal, dont le siège est à Luxembourg.
Jeudi, à l’usine de Differdange, la direction d’ArcelorMittal, premier employeur industriel du pays avec 3 851 employés, est revenue sur les grandes tendances de l’année dernière à l’occasion de la présentation de ses vœux.
En tout premier lieu, Michel Wurth, président du conseil d’administration d’ArcelorMittal Luxembourg, a abordé le sujet de la sécurité au travail. «Nous travaillons toujours pour atteindre l’objectif zéro accident», a assuré Michel Wurth. Ce dernier, et l’ensemble de la direction, n’ont pas manqué de partager leur peine à la suite du décès d’un salarié l’année dernière à Differdange.
Avec un taux de 0,71 accident pour un million d’heures travaillées (1,24 en y incluant ArcelorMittal Italie), l’homme fort de la sidérurgie luxembourgeoise a rappelé les efforts du groupe pour réduire les accidents. «Les aspects de sécurité et de santé de nos collaborateurs sont les plus importants pour nous, tout comme le respect et les conditions de travail et de vie», a-t-il précisé tout en rappelant, statistiques à l’appui, que ce taux était jusqu’en 2018 en baisse, passant de 3,1 accidents pour un million d’heures travaillées en 2007 à 0,69 en 2018. «En comparaison, les acteurs sidérurgiques mondiaux sont à des niveaux bien plus élevés. Mais je le rappelle, notre ambition est d’atteindre un objectif zéro accident.»
Une politique européenne incohérente
Du côté des aspects économiques, le géant de l’acier a également passé une année difficile. «Avec les velléités de guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine, ainsi qu’avec l’Europe, il y a eu une dégradation de la confiance et une économie mondiale en baisse à cause de l’incertitude. Cela a fait baisser les investissements et donc impacté le secteur sidérurgique. Sans oublier la crise qui frappe l’industrie automobile qui doit faire face à de grands défis», a expliqué Michel Wurth.
Dans le détail, l’ensemble de ces tensions n’a pas permis d’écouler l’excédent d’acier qui s’est monté à 400 millions de tonnes en 2019, soit «deux fois la consommation annuelle d’acier de l’Europe. Et avec une offre toujours supérieure à la demande, les prix baissent», argue Michel Wurth. La Chine continue d’ailleurs à jouer les trouble-fêtes avec ses surcapacités.
Il faut encore ajouter que le prix du minerai de fer a presque doublé, passant de 60 dollars la tonne à une centaine de dollars à la suite du dramatique accident au Brésil l’année dernière où un barrage minier a cédé, mettant à l’arrêt un pilier majeur de la production de cette matière première vitale pour la sidérurgie.
Il faut en plus ajouter une politique européenne jugée «incohérente» par Michel Wurth.
En effet, face aux tensions commerciales, l’Europe a joué la carte de l’ouverture. «Pendant que nous sommes impactés par la taxe carbone et que nous investissons pour réduire notre impact environnemental, la Chine continue d’exporter de façon sauvage en Europe qui laisse faire. C’est d’une absurdité. La Commission européenne a une vision trop européenne de la sidérurgie dans la mesure où elle considère le sujet en tant que marché européen où il faut selon elle réduire les concentrations, mais la sidérurgie est un marché mondial», a pesté Michel Wurth. Ce dernier a encore expliqué : «À cause de cette vision européenne, qui n’est pas la réalité, nous avons dû nous séparer d’une usine comme Dudelange avec regret et plus globalement de 8 millions de tonnes de capacité de production.»
Enfin, ArcelorMittal a mis en avant ses avancées en matière de réduction de son empreinte carbone. «Nous sommes le seul sidérurgiste à avoir édité un rapport d’action pour le climat aussi clair», a souligné Michel Wurth en montrant un document de 42 pages où ArcelorMittal décrit l’ensemble de ses procédés et des techniques pour réduire son impact. D’ailleurs, le sidérurgiste a investi 250 millions d’euros dans le développement technologique de procédés plus durables. «L’acier est le meilleur matériau pour la transition énergétique, car il est à 100 % recyclable. L’acier propre existe déjà et les solutions existent aussi. Mais ces technologies font passer le prix de revient du simple au double. Nous souhaitons aller dans cette voie, et la solution est peut-être d’augmenter fortement la taxe carbone, mais qu’elle soit applicable à tout le monde», a terminé Michel Wurth.
Jeremy Zabatta