Au lendemain de son élection historique à la tête de l’OGBL, Nora Back a dévoilé ses grandes priorités et revendications. «On place le dialogue avant la confrontation sociale», souligne-t-elle.
Le deuxième et dernier jour du 8e congrès de l’OGBL a permis de dresser les grandes lignes de l’action du premier syndicat du pays pour les cinq années à venir. Son programme restera dominé par la «continuité» qui «avait toujours et continuera à avoir une grande importance au sein de l’OGBL», promet Nora Back. Au lendemain de son élection historique à la tête du syndicat eschois, la première présidente de l’OGBL a lancé un appel à l’unité, une nécessité absolue «pour affronter les défis du futur».
Celle qui succède à André Roeltgen sait qu’elle pourra compter sur de «nouveaux syndicalistes, jeunes et pleins d’ardeur et qui démontrent qu’un syndicat n’est pas quelque chose de vétuste». Nora Back n’oublie cependant pas les «plus expérimentés» qui ont permis à l’OGBL de devenir le premier syndicat du pays, fort de ses quelque 70 000 membres. «On a beaucoup de travail devant nous», lance encore Nora Back avant d’envoyer depuis l’hémicycle du Kirchberg plusieurs messages forts à l’adresse du gouvernement et du patronat.
«On place le dialogue avant la confrontation sociale», souligne d’emblée la nouvelle femme forte de l’OGBL. En présence du ministre du Travail, Dan Kersch, Nora Back place les autres partenaires sociaux, et plus particulièrement l’Union des entreprises luxembourgeoises (UEL), devant leurs responsabilités : «Le dialogue sociale est un synonyme de négociation. Une négociation pour trouver des compromis. Si cela n’est pas possible, le conflit sera inévitable. Et l’OGBL est préparé à ce conflit», lance-t-elle.
Le soutien du gouvernement semble rester assuré au camp syndical. Sans citer le patronat, le ministre Dan Kersch a lancé une mise en garde lors de son allocution devant le congrès de l’OGBL en mentionnant que «ce ne serait pas le premier train qui arrive en gare sans quelques passagers importants à bord. Des passagers qui ont oublié de monter à temps.» Quitter le modèle luxembourgeois, qui repose sur le dialogue tripartite – comme menace de le faire l’UEL –, serait donc une grave erreur. «Pendant plus de 40 ans, le dialogue social a été d’une valeur inestimable pour le développement économique et social du pays», rappelle Nora Back.
«De bons salaires, de bonnes pensions»
«Il faut continuer à discuter l’avenir du pays entre partenaires sociaux», clame encore la présidente. Mais, comme cela a déjà été annoncé en semaine par le président sortant André Roeltgen, l’OGBL est décidé à «construire l’avenir» avec ou sans le concours du patronat.
La feuille de route du premier syndicat du pays est claire. La base doit rester «un État social progressif et une bonne sécurité sociale». «Nos modèles sociales, qui se sont historiquement construits à travers l’Europe, sont attaqués depuis des années et démontés peu à peu», dénonce Nora Back. Pour trouver les réponses adéquates au changement climatique ou la numérisation de l’économie, il faudrait toutefois continuer de miser sur «de bons salaires, de bonnes pensions et de bonnes prestations sociales» afin que «l’avenir se construise sans peur».
Au-delà des considérations plus philosophiques, l’OGBL pose aussi des revendications concrètes. La lutte contre les inégalités reste ainsi une des premières priorités. «C’est un scandale que le Luxembourg connaisse en tant que pays riche un risque de pauvreté pointant à 18 %», fustige Nora Back. La prochaine réforme fiscale doit permettre de rectifier le tir, notamment avec la «création d’un équilibre entre l’imposition des entreprises et celle des ménages». Une plus forte imposition du capital et des gros salaires est une autre revendication de l’OGBL.
Afin d’éviter que les salariés ne tombent dans la précarité en raison de la transformation de l’économie, l’OGBL revendique l’ancrage dans le code du travail d’un «plan de sécurisation du parcours professionnel». Une réorganisation du temps du travail et le droit à la déconnexion doivent, selon Nora Back, être fixés dans le cadre de conventions collectives ou d’accords interprofessionnels. «Tous ces défis liés au nouveau monde du travail concernent l’ensemble de la société. Ils doivent donc être ancrés dans une réforme du droit du travail qui se veut forte et protectrice», conclut Nora Back.
David Marques
Inscrire le dialogue social dans la Constitution
Alors que le dialogue social est menacé, l’OGBL lance une nouvelle proposition pour renforcer ce même dialogue entre gouvernement, patronat et syndicats. «On a besoin de plus de démocratie dans le monde du travail, mais aussi dans la société dans son ensemble. C’est pourquoi le dialogue social doit être inscrit dans la Constitution», a réclamé samedi Nora Back. Vu que la révision globale de la Constitution ne se fera pas, le débat sur la question peut encore être lancé.