Chypre a annoncé mercredi avoir l’intention de retirer la nationalité à 26 personnes, dans le cadre d’une enquête sur de possibles violations d’un dispositif dit « investissement contre passeport », décrié par Bruxelles.
Le ministre de l’Intérieur chypriote, Constantinos Petrides, a affirmé que le gouvernement allait « lancer le processus de retrait de la nationalité » à l’encontre de 26 personnes. Il n’a pas précisé leur identité. Chypre avait annoncé fin octobre l’ouverture d’une enquête sur des informations selon lesquelles des proches et des alliés du Premier ministre cambodgien Hun Sen avaient acquis la nationalité chypriote via le dispositif « investissement contre passeport ».
Ce système permet à des citoyens d’obtenir un passeport chypriote en échange d’investissements conséquents dans l’île méditerranéenne. Selon l’agence Reuters, des membres de l’élite cambodgienne, proches du Premier ministre, ont acquis des passeports chypriotes en 2016 et 2017. Parmi eux figure le chef de la police Neth Savoeun, dont les forces « interpellent les opposants politiques (…) et empêchent violemment les manifestations antigouvernementales », selon Reuters. D’après la même source, Neth Savoeun, son épouse et leurs trois enfants sont sur la liste noire américaine de restriction de visas pour menace à la démocratie.
Passeport pour blanchiment et fraude fiscale
Selon le quotidien chypriote Politis, l’homme d’affaires malaisien Jho Low a également acquis la nationalité chypriote après avoir acheté une luxueuse villa dans la ville balnéaire d’Ayia Napa. Jho Low est au cœur d’un vaste scandale de détournement de milliards de dollars d’un fonds souverain malaisien. Chypre, membre de l’Union européenne depuis 2004, ne dévoile pas l’identité des bénéficiaires de son dispositif « passeport contre investissement », qui bénéficie principalement à de riches Russes et Chinois.
L’UE estime que celui-ci « présente un certain nombre de risques », « en termes de sécurité, de blanchiment d’argent ou encore d’évasion fiscale ». Le dispositif avait été introduit après 2013, lorsque le Fonds monétaire international et l’UE avaient accordé à Nicosie un prêt d’urgence de dix milliards d’euros pour sauver son économie et son système bancaire au bord de la faillite. « Le dispositif a aidé le pays dans des temps particulièrement difficiles », a estimé mercredi Constantinos Petrides, reconnaissant toutefois que des « erreurs ont été commises ».
Le processus a été durci en février dernier, avec une série de mesures visant à le rendre « plus fiable », selon les autorités qui ont fait état notamment de contrôles plus stricts sur les personnes demandant la nationalité. Selon les nouvelles dispositions, un citoyen d’un pays hors UE obtiendra un passeport chypriote en échange d’un investissement de 2,5 millions d’euros contre deux millions d’euros auparavant.
LQ/AFP