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Homicides de Leudelange et du Fräiheetsbam : le sang ne provenait pas du gibier…


Au fond du parking du Fräiheetsbam entre Strassen et Bridel, le corps sans vie de la prostituée avait été découvert le 14 novembre 2016 au petit matin. À part pour une ballade avec son chien, Lee K. déclare ne pas y avoir mis les pieds. (Photo : Fabrizio Pizzolante)

Depuis mardi, la 13e chambre criminelle se penche sur les deux homicides de Leudelange et du Fräiheetsbam qui avaient frappé l’actualité début novembre 2016. Sur le banc des prévenus, Lee K. (36 ans) et Alden S. (24 ans). Vendredi, l’enquêteur a retracé comment les deux hommes ont été arrêtés. C’est la mère du trentenaire qui s’était manifestée à la police après avoir découvert la Mercedes ensanglantée de son fils avec la vitre latérale brisée. Dans un premier temps. Lee K. avait déclaré avoir tué un chevreuil avec son pistolet.

Le dealer et la prostituée sont morts d’une balle dans la tête. Dans les deux cas, le crime a été perpétré la nuit. Les deux corps sans vie ont été déposés dans les environs de la capitale : la forêt de Leudelange et le parking du Fräiheetsbam. Les deux victimes ne présentaient pas de traces de défense. Toutes deux ont été retrouvées sans portable ni carte d’identité… Et tout cela en l’espace de quelques jours. «Deux homicides si rapprochés, c’est plutôt rare au Grand-Duché», a donné à considérer l’enquêteur qui a remonté le fil de l’enquête, vendredi matin, au 4e jour du procès.

Assez vite, la police avait reconnu l’existence de certains parallèles entre les deux crimes. Grâce aux appels à témoins lancés de manière répétée dans la presse, elle avait pu récolter 32 indices, dont onze pour le premier fait et 21 pour le second. Au final, ce sont des bris de verre retrouvés à proximité de la victime sur le parking du Fräiheetsbam qui ont fait avancer l’enquête. «On pouvait supposer que le tir avait eu lieu à proximité d’une voiture.»

«Un coup de grâce»

Et en effet, en date du 16 novembre 2016, une mère s’est manifestée pour signaler que la vitre côté passager de la Mercedes A170 utilisée par son fils était cassée. Sachant que ce dernier était endetté, avait des problèmes de drogue et était un passionné d’armes, elle avait contacté la police. «Dans la voiture, il y avait pas mal de sang», se souvient l’enquêteur de la police judiciaire de la section homicide. C’est ainsi que l’unité spéciale de la police procède à l’arrestation de Lee K. en fin d’après-midi chez lui à Strassen.

Si aujourd’hui on sait qu’il reconnaît avoir été à bord du véhicule lorsque le dealer a été tué, au tout départ, c’est une tout autre version qu’il avait livrée aux policiers. Confronté aux vêtements ensanglantés saisis dans son coffre, il avait raconté avoir tué à Schoenfels un chevreuil percuté par une voiture. «Un coup de grâce en vue d’abréger les souffrances de l’animal blessé.» Le sang aurait coulé sur son pantalon, avait encore précisé celui qui se décrit comme un ami des animaux.

L’alibi du chien

Évidemment, les enquêteurs avaient passé tout son emploi du temps au crible. Un quotidien rythmé, selon ses déclarations, essentiellement par son travail, des sorties au fast-food et des promenades avec son chien. La fameuse nuit du 9 au 10 novembre et celle du 13 au 14 novembre, il déclarait avoir été chez lui. Un détail avait toutefois particulièrement étonné l’enquêteur : la sortie avec le chien le samedi 12 novembre au soir sur le parking du Fräiheetsbam. «En gros, il était normal que l’on y trouve des traces de lui. Car elles proviendraient de sa promenade avec le chien.»

Pour la vitre latérale brisée de la Mercedes, Lee K. avait aussi une explication : le dimanche 13 au soir, il avait prêté le véhicule à Alden S. pour que ce dernier puisse aller chercher quelqu’un à l’aéroport. Cette personne aurait claqué trop violemment la porte, la vitre serait tombée en mille morceaux. En voulant nettoyer l’habitacle, il se serait blessé… d’où toutes ces traces de sang!

Revirement toutefois chez le juge d’instruction. Lors d’une déclaration spontanée, Lee K. affirme alors que le sang vient du «corps dans le bois». C’est là qu’il évoque pour la deuxième fois la personne d’Alden S. Le soir du 9 novembre, l’homme qui l’accompagne aujourd’hui sur le banc des prévenus aurait voulu acheter de la cocaïne. Ils avaient donc récupéréle dealer à la gare de Lamadelaine. Mais en route la discussion sur le prix aurait dégénéré. Alden S., assis sur la banquette arrière, se serait emparé du pistolet Walther P99 et aurait tué le dealer qui avait pris place sur le siège passager. Lee K. dit avoir été choqué.

Tué pour 5 g de cocaïne?

D’autres détails filtreront lors de sa deuxième audition. Le crime aurait ainsi été perpétré entre Pontpierre et Leudelange, sur la petite route parallèle à l’autoroute A4. Ensuite ils auraient déposé la victime au bord d’un chemin dans la forêt entre Leudelange et Schléiwenhaff. Une fois partis, ils auraient fait demi-tour pour récupérer une boule de 5 g de cocaïne.

Mais pour la mort de la prostituée, Lee K. maintiendra sa position jusqu’au bout. Il ne la connaissait pas. Et il n’a rien à voir dans cette affaire. Lui ne ferait même pas de mal à une mouche. N’empêche que lors de la perquisition, la police avait découvert le passeport de la jeune femme. Dans une grosse benne, une cannette de Red Bull et un paquet de cigarettes Lucky Strike comportant ses traces ADN avaient également été saisis. Des dépositions du père de Lee K., il ressort que, un peu «comme un miracle», il était apparu à l’heure au travail le lundi 14 novembre. Ce qui ne lui était que très rarement arrivé les mois précédents. D’autres membres de son entourage avaient déclaré à la police que d’habitude Lee K. n’était jamais prêt à prêter sa voiture…

En tout état de cause, le trentenaire se trouve en détention préventive depuis son arrestation. Le prévenu Alden S., pour sa part, avait été interpellé à la suite des dépositions de Lee K. Suite du procès mardi matin.

Fabienne Armborst

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