Anthony Moris, le portier des Roud Léiwen, est chaud bouillant avant de visiter le stade Alvalade. Et de se mesurer à l’immense Cristiano Ronaldo.
Dites donc, six clean sheets sur les sept derniers matches de championnat, ça va pas mal pour la défense de Virton et, par extension, pour vous ?
En fait, cinq sur six car il y a un des matches que j’ai raté puisque j’étais en sélection justement. Et puis lors du dernier match contre Westerlo, on nous l’a un peu donné (NDLR : Westerlo a marqué un but, le ballon ayant franchi la ligne sur une frappe lointaine, mais le trio arbitral ne l’a pas validé). Mais bon, oui, ce sont de belles statistiques auxquelles j’ai contribué avec quelques beaux arrêts sur ma ligne. Mon niveau actuel est assez satisfaisant. Assez pour répondre à ce genre de match en tout cas.
Et pour répondre à un match contre le Portugal ?
Ce n’est pas du tout comparable comme niveau. La préparation de ce genre de rencontre aussi, est totalement différente. Mais en D1/B, j’estime aujourd’hui avoir le niveau pour survoler le championnat à mon poste. À l’international… c’est d’autres clients.
Comme vendredi. Le stade Alvalade, Cristiano Ronaldo, Bernardo Silva, João Felix…
Je m’en fous complètement ! En toute honnêteté. Ce sera la même envie que pour un match de D2 belge. À 29 ans, j’ai connu assez de galères pour ne retenir que le positif, que le plaisir.
Revenons brièvement à Virton. Votre club n’a encaissé que quatre buts en neuf rencontres de championnat. C’est assez exceptionnel.
C’est exceptionnel, oui. Et pourtant, on commence par deux défaites 1-0. Le travail pour s’y remettre a été assez exceptionnel. C’est bien simple, avec ce staff, on sait tout sur tout au niveau de l’adversaire. On est préparés à tous les scénarios possibles et on n’arrive jamais dans l’inconnu. Dans cette division, si on parle organisation interne, infrastructures, certains clubs ont dix ans d’avance sur nous, mais pourtant, on est le vent de fraîcheur de ce championnat, une petite équipe qui s’assure systématiquement 60 % de possession de balle. On pratique un football différent, un football « propre », un football dur à contrer, dans un championnat qui valorise énormément le physique et les duels. En fait, c’est le même football à peu près qu’on pratique en sélection avec des nouvelles idées, des idées modernes. Même s’il est plus facile à mettre en place à Virton qu’au Luxembourg parce qu’en club, les joueurs se voient tous les jours.
C’est un effet Toppmöller en quelque sorte ?
Je suis archi-fan! Je retrouve un peu la sensation que j’ai pu avoir avec Jankovic à Malines : une vision moderne du football, celle d’un gars qui veut jouer au foot, qui dit les choses. Toutes proportions gardées, je pourrais mourir pour lui sur un terrain.
Il vous a donné le brassard de capitaine aussi…
C’est gratifiant car cela fait aussi écho à tout le boulot abattu la saison passée en D3. J’avais toujours été un leader de vestiaire, d’autant que mes coéquipiers ont confiance en moi pour les guider.
Bientôt le brassard en sélection ?
(Il sourit) Laurent Jans me semble encore parti pour de très longues années.
Virton ne commence-t-il pas à rêver de montée en D1/A ?
On est obligés de dire qu’on joue le maintien et que c’est la priorité, mais l’appétit vient en mangeant. Et chaque semaine, on fait un nouveau grand pas. On est à un point du leader et comme je le dis souvent, en foot, le train ne passe qu’une fois. Et là, on est dans le bon wagon. Alors oui, on y pense…
Alors que le débat reste vivace sur le poste d’avant-centre en sélection, Dave Turpel joue pas mal pour sa première année en tant que pro à l’étranger, mais marque peu. Comment va-t-il ?
Il y a une grosse différence d’intensité entre la DN et la D2 belge dont se rendent compte tous ceux qui nous ont rejoints en provenance de Dudelange. Cela prend à certains plus de temps pour s’adapter qu’à d’autres. Mais je pense que Dave et Kevin (Malget) ont fait le bon choix pour franchir le pas vers le professionnalisme.
Que disent-ils, vos coéquipiers de Virton qui vous voient partir pour un tel rendez-vous ?
C’est toujours gratifiant pour eux de voir qu’ils font partie d’une équipe qui possède des joueurs sélectionnés dans leur pays. Et cela doit donner des idées à certains. Ils peuvent y arriver dans leurs pays respectifs. Quand je vois le niveau d’Edisson Jordanov à l’heure actuelle et quand je vois celui de la Bulgarie, j’aurais du mal à comprendre que sa sélection ne s’intéresse pas à lui…
La sélection luxembourgeoise, où en est-elle ?
Toujours en progression. Il y a encore un cap à franchir. Pour ne pas perdre, voire gagner des matches qu’on finit par perdre 1-0. Surtout quand tu sais que tu peux, voire que tu dois le gagner. Mais on est parvenus à un degré d’exigence comme le pays n’en a jamais connu : si on veut gagner, c’est tout le temps, pas une fois tous les cinq matches. On peut être fiers d’une chose : maintenant, les gens nous demandent de gagner. Alors on cherche des réponses tactiques et techniques sur le terrain pour y parvenir. En pratiquant ce fameux football propre dont je parlais tout à l’heure.
Vers quoi faut-il se diriger désormais ?
Vers des joueurs qui, individuellement, évoluent à un autre niveau. Que Virton monte en D1/A belge par exemple. Que ceux qui évoluent en D3 ou D2 allemande montent en D2 et D1… Il faudrait que tous nous franchissions un cap supplémentaire. Dans deux ou trois ans, ce groupe va atteindre son pic de forme avec des joueurs phénoménaux. C’est une sacrée génération. Il ne lui manque plus que la maturité.
C’est ce qui explique, aussi, que vous nous disiez aujourd’hui vous « moquer » de ce match contre le Portugal ? Ce n’est qu’une étape ?
J’ai déjà vécu personnellement de très grands matches, contre la Belgique, l’Italie, qui comptent parmi les meilleures nations au monde. Alors là, à Lisbonne, je n’aurai aucune pression parce que j’ai confiance en notre équipe pour bien faire dans le contenu. Je n’ai même pas fait attention à ce que donnait Cristiano Ronaldo en ce moment. On verra bien son état de forme vendredi…
Entretien avec Julien Mollereau