Les députés étaient tous unanimes, hier. Il est loin le temps où ils se chamaillaient pour abaisser ou non l’alcoolémie. Plus personne n’ose critiquer ce combat.
L’insécurité routière est un fléau qui s’abat chaque jour. Il est temps de retrousser ses manches et de passer à l’action. Un plan est prévu à cet effet que salue la Sécurité routière qui a présenté le matin même une «to do list» qui va au-delà des simples revendications. Agir et vite.
On revient de loin», rappelle la directrice de la Sécurité routière, Isabelle Medinger, à l’issue du débat concernant le plan d’action «Vision zéro : zéro mort, zéro blessé grave» qui a trouvé une belle unanimité hier à la Chambre des députés. Le ministre du Développement durable et des Infrastructures, François Bausch, prend le taureau par les cornes pour combattre le fléau qui s’abat sur les routes du pays.
Le gouvernement installera les radars automatiques (fixes et mobiles) dès début 2016, pour l’heure, il durcit les peines et compte multiplier les contrôles et ainsi tabler sur la prévention et la sensibilisation. François Bausch désespère du comportement des automobilistes et il le dit haut et fort. «En dépit de notre vaste campagne annonçant le durcissement des peines pour l’utilisation du téléphone portable au volant, 54 contraventions ont été dressées ces deux dernières semaines!», lâche-t-il.
Dix-huit morts depuis le début de l’année
Pour combattre l’insécurité routière, une dizaine de défis ont été identifiés qui s’accompagnent de mesures dont certaines ont déjà été mises en place comme le durcissement des sanctions et les radars automatiques qui doivent être installés début 2016. La directrice de la Sécurité routière se souvient des débats houleux qui avaient accompagné l’abaissement du taux d’alcool dans le sang de 0,8 à 0,5 g d’alcool par litre de sang (qui avait fait dire à de nombreux députés que ce serait le début de la fin du permis de conduire).
Hier, chaque intervenant était sur la même longueur d’onde et personne n’a critiqué le catalogue des mesures contenues dans le plan d’action et qui reprend les attentes de la Sécurité routière. Le matin même, l’association avait présenté une «to do list» qui va au-delà des revendications, cela pour dire au gouvernement qu’il est temps d’agir pour réduire drastiquement le nombre d’accidents sur les routes. Les derniers chiffres sont d’ailleurs effrayants avec cinq morts en l’espace d’une semaine dont une policière dans l’exercice de ses fonctions! «Depuis le début de l’année, nous avons eu 18 morts et de nombreux blessés graves, 80 % à cause de la vitesse ou de l’alcool ou les deux combinés», rappelle le ministre.
Il faut donc que cela cesse, et pour cela, il faut agir. Les préconisations de la Sécurité routière qu’a présentées le président Paul Hammelmann suggèrent, en plus du plan d’action du gouvernement, l’introduction de l’infraction de «mise en danger de la vie d’autrui» qui existe déjà en France depuis 1994. Elle s’applique pour toute «violation délibérée d’une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi», selon la législation française.
Dans ce combat, il s’agit aussi d’analyser systématiquement les causes des collisions. Quand sait-on si l’utilisation d’un téléphone portable est en cause, par exemple? Quasiment jamais. «On prévoit une telle analyse pour les accidents de train et d’avion, mais pas pour les accidents de la route», regrette Paul Hammelmann.
Pour lutter contre la vitesse excessive sur les routes hors agglomération, il est question de diminuer de 90 à 80 km/h la vitesse autorisée, cela d’autant plus que 54 % des tués le sont sur ces routes hors agglomération. Le plan national reprend cette idée et personne ne l’a combattue, hier, à la Chambre. L’idée des «radars de feux rouges» fait son chemin et un projet pilote pourrait être mené dans ce sens. En Suisse, chaque feu grillé est flashé…
L’urgence à abattre les arbres dangereux
Sur la trentaine de mesures proposées dans le plan qui est toujours en discussion, les deux tiers se rapportent à la prévention et à la sensibilisation. Car il s’agit bien de changer les mentalités. Pourquoi est-ce que l’on roule vite dans le pays? C’est une question qui attend des réponses. La relation des Luxembourgeois avec leur voiture est particulière et enfreindre le code de la route est malheureusement entré dans les mœurs. Les contrôles de police devront être mieux organisés et servir vraiment la cause de la sécurité routière. Il ne s’agit pas non plus de multiplier les panneaux de signalisation, mais, au contraire, de permettre une meilleure visibilité, comme il ne s’agit pas de mettre des zones 30 partout en agglomération. Surtout pas là où il y a de véritables boulevards. En revanche, il y a urgence à abattre les arbres potentiellement dangereux et à ne pas en replanter de nouveaux.
L’insécurité routière est un débat permanent, mais au moins, hier à la Chambre, le combat contre ce fléau a fait l’unanimité. La Sécurité routière pourra regretter, en revanche, que personne n’ait pipé mot sur la «Charte de la sécurité routière» signée par le gouvernement il y a deux mois, dans laquelle il reconnaît que cette lutte relève d’une responsabilité partagée exigeant une action concertée de l’ensemble des membres du gouvernement. François Bausch était bien seul, hier, face aux députés.
Geneviève Montaigu