Hasib Selimovic reprend le surprenant Mühlenbach, qui s’était donné les moyens humains de monter, sans se dire qu’il faudrait après avoir les moyens structurels de se maintenir.
Vos infrastructures minimalistes vous posent-elles concrètement problème ?
Hasib Selimovic : Bon, déjà, au comité, on ne parle que de jouer à la maison nos matches de championnat. Pas ailleurs. Alors il faut qu’on s’organise parce qu’on n’a qu’un terrain pour deux équipes. Bref, on a un gros problème de terrain. Alors pendant tout le début de la préparation, les joueurs n’ont pas touché beaucoup le ballon. Ils l’ont plus touché en deux matches amicaux que sur les deux premières semaines de préparation, mais les joueurs doivent comprendre que c’est pour leur bien. On a des bois tout autour alors on va au bois. Je sais que cela ne se fait plus trop à notre époque, mais on se doit de protéger notre terrain si l’on veut pouvoir jouer dessus cette saison. On n’a pas toutes les facilités des autres clubs de DN.
Alors oui, les jambes sont lourdes, mais la condition physique, au moins, ça ira (il rit) : les clubs pros vont s’entraîner dans les Alpes ? Nous on a les Alpes juste à côté ! Sinon, il y a des clubs en ville qui bénéficient d’infrastructures meilleures et avec lesquels nous pourrions ou devrions peut-être envisager une fusion, à terme. Et commencer à travailler aussi avec des jeunes (NDLR : le club n’en possède pas). Ce serait un parcours idéal alors si l’occasion se présente…
Comment reprend-on une équipe montée avec un autre coach ?
Vous savez, moi, j’étais monté de Division 1 en Promotion et après, quelqu’un s’était glissé dans mes chaussons. Il est d’ailleurs reparti assez vite et Kuduzovic était arrivé. Il a fait un bon travail. Exceptionnel même. Il devait continuer, je crois même qu’ils avaient trouvé un accord. J’ai demandé pourquoi il n’était pas resté (NDLR : il a finalement signé à l’Eintracht Trèves), on ne m’a pas dit. Mais bon, je reviens alors que j’ai commencé dans ce club en Division 3. J’ai réalisé plusieurs montées avec lui et j’ai toujours dit qu’il était taillé pour jouer un jour en DN.
Alors finalement, même si ce n’est pas moi qui ai réalisé la montée en DN, on dirait que le destin voulait que cela soit moi qui soit aux commandes en DN. Maintenant, il me reste à assurer le maintien. Vu nos conditions, ce serait un immense pas. Si on le fait, il faudra vraiment travailler sur les infrastructures.
Débuter contre le f91, c’est une fête ou une misère ?
Quand ils ont entendu ça, plusieurs joueurs ont râlé, moi je considère que c’est le plus beau des cadeaux parce que c’est, avec la Jeunesse, l’équipe qui a le plus fait pour le football luxembourgeois ces vingt dernières années. Que peut-on rêver de mieux ? D’autant plus que la saison passée, on a vu à quel point cela pouvait aller vite : ils étaient engagés en Coupe d’Europe, devaient faire tourner, et ont quand même lâché des points en championnat bien qu’étant favoris.
Alors si on crée une surprise, tant mieux, mais je préférerais de loin perdre et être sûr d’avoir une continuité derrière. Je ne veux pas de bonnes surprises contre les gros et de mauvaises surprises contre les petits. Je veux de la continuité. Ça n’aurait pas de sens de commencer par un très bon match contre le F91 si ensuite, c’est pour tout lâcher.
La perte de Rachid Boulahfari est-elle grave ?
Quand je suis arrivé, j’ai bien évidemment parlé avec le joueur pour tenter de le faire changer d’avis. Je le connais depuis des années, c’est quelqu’un de très discipliné et qui nous aurait fait beaucoup de bien. Mais il a sa famille et il m’a répondu : « Je ne peux pas m’entraîner plus deux fois par semaine et je ne veux pas prendre la place de quelqu’un qui s’entraîne plus. » Ce genre de joueur, on n’en trouve pas partout. Certains diraient au contraire, je peux très bien m’entraîner deux à trois fois seulement et être performant. Le club lui a donc offert un poste de directeur sportif, mais vous savez… il a toujours ses crampons avec lui. Alors si à un moment on doit et on peut le repousser vers l’équipe… D’ici là, il faut respecter son choix.
Quelle sera l’identité de jeu du promu, un statut qui en général condamne à la relégation ?
Presque toute l’équipe est restée ensemble. Peut-être que certains, à ce niveau, auront plus de difficultés à s’installer dans l’équipe que la saison passée en PH, mais je sens que tous ont envie de faire quelque chose, de prouver qu’on est à notre place. Je sais ce qui nous attend. Je sais qu’il y a des différences entre la PH et la DN même si parfois elles ne sont pas énormes. Chaque dimanche sera une finale de Coupe pour nous et je sais d’avance que bien des clubs se disent « oh, c’est Mühlenbach, on va prendre les points. » Mais on ne sera pas une équipe qui va défendre. Contre des équipes installées depuis longtemps, on va proposer des choses concrètes et être l’équipe-surprise de la saison.
Entretien avec Julien Mollereau